JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 4,091.
40me année.
LA JUSTICE DIVINE.
Dans la séance du 26 novembre a été
présenté aux Chambres un projet de loi
sur les denrées alimentaires. Le gouverne
ment y propose de lever la prohibition
la sortie des céréales.
iNous apprenons que dans beaucoup de
localités des pétitions circulent et se
couvrent de signatures. Partout et spécia
lement dans les villes les populations sont
vivement émues.
L'état de choses que le gouvernement
paraît vouloir modifier a beaucoup con
tribué maintenir l'ordre et la tranquillité
publique. Or nous demandons si le mo
ment est déjà arrivé où l'on pourra décréter
la suppression des mesures restrictives
la sortie.
Il est vrai qu'une baisse sensible s'est
opérée mais a-t-elle ramené un taux tel
que le travailleur puisse dire que le pain
est bon marché? Tandis que générale
ment la campagne l'ouvrage est abondant
et la vie assez facile, il n'en est pas ainsi
pour les villes et les grands centres de
population. Là, en effet, le manque de
travail se fait péniblement sentir et les
salaires ne sont pas en proportion du prix
des denrées alimentaires. La population
ouvrière des villes souffre, moins certes
que dans les années précédentes; mais
son état est triste encore, surtout quand
on considère que dans les moments de
détresse elle a dû se restreindre au strict
nécessaire et que beaucoup de besoins
impérieux de couchage, de vêtements se
font sentir, auxquels elle espère bientôt
être en état de pourvoir.
La suppression des mesures restrictives
la sortie des céréales, en ferait l'instant
hausser le prix; et voilà nos populations
tout coup frustrées dans les douces
espérances dont elles se sont bercées
depuis qu'elles connaissent combien les
récoltes ont été abondantes.
L'espoir fait vivredit-on. La patience
de nos populations a été admirable au
milieu des dures privations auxquelles
elles ont été réduites. Elles les ont sup
portées héroïquement; cette patience, celte
longanimité, qu'elles puisaient avant tout
dans les sentiments religieux qui les
caractérisent, n'en étaient pas moins sou
tenues par l'espoir d'un meilleur avenir.
Et maintenant, malgré l'abondance des
récolles qu'elles ont apprise et constatée,
nos classes laborieuses verraient de nou
veau le prix du pain monter, monter
jusqu'au taux des années précédentes! Oh!
qui dira, que déchues dans leur espoir
elles n'accusent les hommes, tout en
remerciant la Providence.
Il nous semble que ce n'est pas au mo
ment où grâce une diminution raison-
nabledansleprix des denrées alimentaires,
l'ouvrier commence respirer, qu'il faut
songer tenter des expérimentations dont
les conséquences sont loin d'être rassu
rantes.
Le producteur reçoit aujourd'hui et
recevra longtemps encore un prix large
ment rémunérateur; loin de songer se
plaindre, il s'en félicite; le consommateur
en cslsalisfait, puisqu'il leconsidère comme
raisonnable; il désire, il est vrai le voir
baisser encore; mais enfin il est content.
Quels motifs y a-t-il donc de changer
l'état des choses auquel nous devons un
résultat aussi satisfaisant
PRIX D'ABONNEMENT.
Ypres, 3 moisfr. 3
P.r la poste5o
On s'aU>nue a Ypres chez D. LAMBIN
MORTIER, Éditeur-Propriétaire, rue
de Lille, io, près la Grand -Place.
Le Propagateur parait le MERCREDI
et le SAMEDI.
Les lettres et envois doivent être
affranchis.
Insertions des annonces 17 centimes
la ligne.
LE PROPAGATEUR
vr.uiTi: et JiSTiCE.
CIJEMINS DE FER
d'Ypres Courtrai, 6,25, 11,23,4,30,
de Poperinghe 20 minutes plus tôt.
De Courtrai Ypres et Poperinghe,
8,o5, io,55, 6,15.
De Courtrai Monscron et Lille,
j,5o, 10,5o, i,5o, 4,55, 6,o5, 8,20.
De Courtrai pour Gand, G,i5, 8,00
>,45, 5,5o.
De Courtrai pour Bruges, G,3o, 8,o5,
>,55 6,00.
7P3.SS, 15 Décembre.
D'après la Nouvelle Gazette de Prusse, l'ou
verture des secondes Conférences de Paris n'aura
peut-être lieu que dans le mois de janvier, ou
même en février.
Le Moniteur annonce que l'état de siège a été
levé, le 1" décembre, dans les Marches de la
Romagne. Les provinces de Bologne et d'Ancône
sont seules exceptées de cette mesure générale, et,
sauf quelques modifications, resteront soumises
l'autorité militaire.
Les dépêches,datées du 5, coufirmeDt la nouvelle
de la prise d'Hérat par les Persans, et ajoutent que
des forces uavales anglaises ont déjà paru dans le
golfe Persique. On lit dans une correspondance de
Saint-Pétersbourg.
Quel que puisse être le désir du gouvernement
anglais d'étendre davantage encore l'immense
territoire sur lequel il exerce sa domination en Asie,
il trouvera la Russie prête faire face toutes les
éventualités qui pourront surgir, tôt ou tard, dans
ces lointains pays.
Une correspondance de New-York donne des
détails sur les démêlés qui ont éclaté entre Walker,
le conquérant de Nicaragua, et un de ses officiers,
réfugié havanais, qui devait se charger de l'affran
chissement de Cuba. La zizanie s'est mise entre les
deux associés, au sujet de la questiou de savoir ce
qu'on ferait de l'île après la chute du régime
espagnol.
Le Havanais voulait l'annexer aux États-Unis;
Walker, au contraire, entendait garder pour lui-
même le bénéfice de l'opération, afin de constituer
une poissante confédération d'Etats b esclaves,
laquelle établie au centre de L'Amérique, ferait
contre-poids l'action de l'Union continentale.
De Ib brouilleet révélation, lesquelles ont beaucoup
refroidi le zèle des Américains par la cause de leur
compatriote.
(Scite. Voir le u» 4>°9° du Propagateur.)
Il y avaitenviron un moisetdemi que l'infortunée
vivait ainsi dans l'isolement et le denil, et se con
sumait daus un sombre désespoir, lorsqu'un matin,
comme elle était assise devant le foyer, et machi
nalement occupée a suryeiller le pauvre repas de
ses enfants, elle vit, sur le seuil de la maison et se
disposant a entrer, un ecclésiastique qu'elle recon
nut pour le curé du village. Elle se leva, surprise,
el fit quelques pas au devaDt de lui.
Que je ne vous dérange pas, Madame, je vous
en prie; ce n'est que votre curé, et il doit jouir du
privilège des amis.
Et tout eu prononçant ces mots avec une franche
fionté, tandis que Marie l'invitait b s'asseoir, il sai-
£|ssait d'un regard l'étraogelé de cet intérieur. Le
cnré était un homme d'une moyenne taille, mais
d°nt l'aspect révélait la vigueur et la forte santé
d« habitants de la campagne: sa mâle figure,
WKM—M—R—M—U—RlUtmi-JVlB»
colorée par l'air vif des champs, respirait la franchise
et la fermeté; mais aussitôt qu'elle s'aoimait au
souffle de la parole, elle exprimait par le rayonne
ment des yeux, une charité aussi ardente q.ue
généreuse; enfin, ses cheveux, qui commençaient b
blanchir, donnaient au visage cet air paternel et
vénérable qui imprime la confiance et le respect.
Ce digne prêtre, âgé d'environ cinquante ans, avait
exercé durant de longues années son ministère
dans tes villes; il avait vu de près les infortunes
les plos grandes; bien des larmes étaient tombées
sur ses maios, toujours rendues pour les essuyer;
sou cœur s'était brisé bien des fois aux douloureux
épanchemeots pour lesquels il était toujours ouvert;
savant d'expérience et d'étude, il avait obtenu de
se retirer dans le cher pays qui l'avait vu naître,
et depuis quelques années son administration y
avait singulièrement amélioré les habitants: aussi
tous le vénéraient. A l'époque où il vint prendre
possession de sa curequoiqu'on fut déjà loin des
temps orageux de la révolution de 89, les plaies
faites b la religion par le fanatisme et l'intolérance
politiques n'étaient pas encore cicatrisées, et l'église
Dans sa séance de mercredi de la Chambre des
Représentants, le projet de loi portant création
d'un timbre d'endossement pour les effets tirés de
l'étraoger, a été discuté et l'ensemble de la loi a
ensuite été voté par soixaDte dix-neuf voix et une
abstention, celle de M. Lelièvre.
en ruine du pays n'était que la trop fidèle image des
ruines où gisait l'Église vivante des âmes Le curé
se mit aussitôt b l'œuvre avec l'ardeur et la foi d'un
apôtre: il avait trois leviers éprouvés par les siè
cles pour déblayer et relever ces tiistes décombres
la prière, la prédication et la charité. Il ne trouva
d'abord qu'uD bien petit nombre de fidèles dans
l'église paroissiale, et encore conduits plutôt par
l'habitude que par une foi véritable. Sans se dé
courager, il leur exposa chaque dimanche, dans des
instructions courtes et familières, mais fortes et
chaleureuses, les vérités de la religionla pure et
touchante morale de l'Évangile, et bientôt il eut la
consolation de voir autour de lui un petit troupeau
de vrais chrétiens, éclairés sur leurs devoirs, fermes
dans leur foi. L'exemple et les vertus de ce petit
nombre en attirèrent d'autres, et les rangs se grossi
rent insensiblement. Il y a d'ailleurs partout, en fait
de religion, une foule de geos qui, tout indifférents
qu'ils sout, ne renouceot pas absolument toute
pratique, et tieuueot eo conséquence a paraître, de
loin en loin, dans les églises. Ceux-la, pour la
plupart, chat mes de l'éclat inusité des cérémonies,