JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT,
39me année.
7??.ïS. 23 Avril.
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JACQUES D'ARTEVELDE.
>0 4,024.
PRIX D'ABONXEMEXT.
Ypres, 3 moisfr. 3
Par la posle3 5o
On s'abonne Ypres chez D. LAMBIN
MORTIER, Éditeur-Propriétaire, rue
de Lille, io, près la Grand'-Place.
Le Propagateur parait le MERCREDI
et le SAMEDI, 7 heures du so*r.
Les lettres et envois doivent "être
affranchis.
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LE PROPAGATEUR
CHEMINS DE FER
VERITE ET JUSTICE.
d'Ypres Courtrai, 55o, 11, 5—00,
de Poperinghe 20 minutes plus tôt.
De Courtrai Ypres et Poperinghe,
74°, 1055, 45o.
De Courtrai MouscronTournai et
Lille, GOf |250| 435, 615.
De Courtrai pour Gand 7 3o
10—5o, 15o, 915.
De Courtrai pour Bruges 74°j9
125, 620
Il nous arrive de Paris la lettre suivante, dit VArmonia
de Turin
Je vais vous donner une de ces nouvelles que je regarde
comme fondamentales, parce qu'elles peuvent influer sur
vos «flaires et sur le fond de votre politique. Tenez pour
certain que l'empereur Louis-Napoléon a appelé le comte
de Cavour et lui a dit que les puissances alliées ayant fait
la paix avec la Russie, le Piémont devait penser se re
concilier avec le Saint-Siège.
L'empereur a parlé du scandale qui résultait d'une pareille
rupture si longtemps prolongée; il a parlé de la religion
de la Maison de Savoie et de son ancien respect pour les
pontifes romains; il a prouvé quef les dynasties devaient
rester fidèles leurs traditions/parce qu'en les reniant,
elles reniaient en quelque sorte lKur ancienneté et retom
baient volontairement dans l'enfanSp (si redevano fanciulle.)
Un triolet faisait la joie des aimables thermido
riens. Voici cet échantillon de la poésie française
en 1794
Connaissez vous rien de plus sot
Que Merlin, Bazire et Chabot?
Pour moi je ne sais rien de pire
Que Merlin, Chabot et Bazire,
S'il n'était rien d'aussi coquin
Que Chabot, Bazire et Met lin.
Connaissez vous, dirons-Dous, rien de pire et de
plus sol parmi les soties et piètres déclamations;
rien de plus insolemment mensonger parmi les
calomnieuses imputations de la mauvaise foi, que
l'accusation lancée chaque jour contre le parti
conservateur par le parti perverlisseur, de rêver le
retour au Moyen-âge, de chérir et regretter l'In
quisition espagnole, de soupirer et languir jusqu'à
ce que toute la richesse du pays soit tombée en
main - morte? Ces stupidités là sont pourtant
l'agréable triolet que la presse clubiste joue chaque
matin sur ses pipeaux.
Comment les hommes qui pensent et qui savent
apprécient-ils, dans nos rangs, le .Moyen-âge et
l'Inquisition Écoutons l'honorable M. Dechamps
Que l'on étudie le mouvement vers l'Église
imprimé aux travaux historiques contemporains,
que l'on mesure l'incroyable distance qui nous
sépare de Voltaire, de Gibbon et du XVIII0 siècle,
et que l'on me dise si nous n'avons pas le droit de
témoigner, non pas du dédain, qu'il ne faut avoir
Un jugement que l'histoire «loit porter
SUR
{Suite.)
Uu document inédit reprend M. de Letten-
hove, suspendit un instant mon opinion. Au mois
de mars 133gpeu après le combat de Beerst où
Louis de Nevers avait été défait, les Gantois se
rendirent Ypres, et on lit dans un rôle conservé
auxarchives de cette ville: A Jakeme d'Artevelde
doouei pour ce qu'il feroit le host départir qui
gtsoii dedeus le ville, car graDt griefs et périls en
pooit avoir avenu de feu et de discord entre
singulières personnes, dont graut destourbier
eus! aveou, et aussi pour esciwir les grans cous
dedens le ville et le damage et perte des Liens
dehors, escus. Ce document, où j'avais cru
d abord retrouver la trace de la terreur exercée par
Jacques d Artevelde perdit ce caractère dès qu'il
fut mieux expliqué. Il faut remarquer qu'on touchait
l'époque où allait commencer la grande foire:
non-seulement la présence des hommes d'armes
pour personne, mais notre étonnement et Dotre
pitié, quand nous entendons des hommes qui pré
tendent comprendre ce qu'ils disentnous parler
du Moyen-âge, de Luther, de la Papauté et de
l'Église, cortnte on en parlait il y a 60 ans!
Il faut qu'ils le sachent bien ce n'est plus avec
eux qu'il est besoin de discuter; la controverse
sérieuse n'est plus là. Sait on où elle est? Ce n'est
plus aux détracteurs arriérés de l'Égliseau
Moyen-âge, qu'il est urgent de répondre, c'est
plutôt aux enthousiastes irréfléchis de cette
époque quipour venger l'Églisetendent
leur insu réhabiliter les abus, les désordres et la
barbarie que l'Église a eu constamment combat
tre. L'excès même de l'admiration qui s'est
attachée au Moyen-dge a ses dangers, a dit
Ozanam; on finira par soulever de bons esprits
contre une époque dont on veut justifier les
torts.
Ces enthousiastes commettent précisément l'er
reur, en sens inverse, qu'avaient commise Gibbon
et Voltaire ils veulent faire des temps du Moyen-
âge, des moyens d'action dont l'Église a dû se
servir, un idéal de perjection, selon la remarque
de M. Albert de Broglie, comme le XVIII' siècle
avait tenté d'eu faire un idéal de barbarie. Les
uns et les autres confondent le Moyen-âge avec
l'Église, pour les identifier, les premiers pour tout
justifier, les seconds pour tout blâmer.
L'Eglise n'est pas le Moyen-âge, et ce n'est pas
le Moyen-âge que j'ai voulu réhabiliter comme le
type uuique de la société catholique auquel il
faudrait revenir. Ou explique, on justifie le passé,
mais ou ne le refait pas et l'on n'y revient pas.
Le Moyen-âge, c'était l'incroyable mélange de
la décadence et de la corruptiou romaines, et de
la barbarie que les iuvasious ont versée peudaul
plusieurs siècles sur cette corruption. De cet
hymen de la barbarie et de la mort, qu'elle disso
lution irrémédiable ne serait pas sortie, si le
christianisme n'avait pas soudé sur ces ossements
comme sur le champ d'Ezéchiel?
L'Église au Moyen-âge, a dit Ozanain, a moins
régné qu'elle n'a combattu elle a combattu
sans relâche la corruption et la barbarie dans les
mœurs, le paganisme dans les institutions, les abus
in'inwitwwwiiiiniw/w*m*.^iMima-iii IIIBHIIII—en—
pouvait éloigner les marchands étrangers, mais on
avait aussi craindre, si le séjour des Gantois se
prolongeait, les représailles des Léliaerts. Tel est
le motif qui guide la commune d'Ypres. Si elle
redoute des rixes et des troubles, elle n'a déplorer
aucun acte de pillage, et même ici Artevelde s'offre
nos regards comme le digne chef de nos communes,
quand nous lisons dans le même rôle qu'à son entrée
Ypres, il avait côté de lui un prince qui tenait
de plus près Gui de Dampierre que Louis de
Nevers lui-même, et qui se souvenait que son père,
Henri de Flandre, avait combattu au Mont-en-
Pevèle et n'avait jamais consenti partager l'hu
miliation de Robert de Béibune.
En relisant Froissart,je trouve dans Froissart
lui-même vingt textes qui semblent démentir le
portrait qu'il trace de Jacques d'Artevelde. Se
peut-il qu'un homme aussi cruel et aussi redouté
ait été le gendre et l'ami de Sohier de Courtray. Se
peut-il qu'il ait eu pour compère ce noble prince
que Froissart ne croit pouvoir mieux louer qu'en
disant de lui, comme de Sohier de Courtray, qu'il
de la force, le despotisme des seigneurs et des
princes, les révoltes des peuples, l'ignorance et ses
ténèbres, la décomposition qui atteignait la famille
et la société, et au contact de laquelle se souillait
quelquefois la robe du pontife et du prêtre, alors
que la voix répressive des grands réformateurs
s'élevait celle de Grégoire VII, de saint Bernard
et d'Innocent III.
Quand on nous parle des abus et des scandales
du Moyen-âge, on ne fait qu'indiquer le miracle
étonnant accompli par l'Église qui, avec ces élé
ments, a formé tous ces grands noms dont nous
avons parlé, et qui, avec de tels matériaux, a bâti
l'édifice de la civilisation moderne.
Accuser l'Eglise au Moyen-âge des désordres et
des crimes qu'elle reprimait, des violences qu'elle
apaisait, de la corruption qu'elle assainissait et des
ténèbres qu'elle dissipait, c'est accuser la inère des
fautes des enfants qu'elle corrige, qu'elle élève et
dont elle fait des hommes.
Voilà comment un esprit éminent juge le Moven-
âge. Comment un des hommes les plus compromis
aux yeux des ennemis du catholicisme parce qu'il
a la franchise de ses convictions; comment M. Ch.
Sainte-Foi parle-t-il de l'Inquisition, dans le
dernier de ses ouvrages
L'inquisition ecclésiastique a toujours existé,
plus ou moins, sous une forme ou sous une autre,
depuis que l'Église, sortie des catacombes, a pris
place dans la société; elle a toujours été douce,
miséricordieuse, indulgente, conforme en un mot
l'esprit de l'Église et de Jésus-Christ; partir du
treizième siècle, elle a pris plus particulièrement la
forme qu'elle a conservée jusque dans ces derniers
temps. Mais l'Inquisition, telle qu'elle fut établie
eu Espagne, sous Ferdinand et Isabelle, diffère
essentiellement de la première; elle est une institu
tion purement politique; les Papes l'ont vue d'un
très mauvais œil se sont opposés de tout leur
pouvoir son établissement, en ont condamné les
excès et les abus, en ont cassé les jugements,
destitué les fonctionnaires; l'Église, par conséquent,
bien loin d'être responsable des excès qui ont été
commis, y a trouvé au contraire l'occasion de
manifester son esprit de charité et de justice. N'ou
blions pas toutefois qu'aucun homme sachant l'his-
était preux et vaillant? N'est-ce pas Froissart qui
rapporte que le duc de lirabant, le comte de Hai-
naut et tous leurs chevaliers disaient, après avoir
enteudu le discours de Jacques d'Artevelde
Valenciennes, qu'il estoit bien digne de gouver-
ner la comté de Flandre?
Fidèle admirateur de Froissart, convaincu de sa
sincérité et de sa bourre foi, nous expliquerons
aisément ses erreurs. Né en 1337, l'aI)née même où
commença la puissance de Jacques d'Artevelde, il
ne put, selon son expression, s'injormer lui-même
des événements qui s'étaieut accomplis; il raconte,
dans ses poésies, qu'en se rendant eu Angleterre
fort jeune encore, il rencontra, Calais, quelques
léliaerts bannis de Flandre qu'on nommait les
avolés ou les outre-avolés. Telle fut sans doute la
source de sa première narration.
Artevelde était mort depuis quarante ans, quand
Froissart fit son premier voyage en Flandre; mais,
il se vit entouré de nouveau, au camp de l'Ecluse,
de chevaliers français ou léliaerts tout orgueilleux
du triomphe qu'ils avaient remporté, Roosebeke,