JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3.842.
38nie année.
PROPAGATEUR,
VÉRITÉ ET JINTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grand
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX Di; L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uu n° a5 c.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions I J centimes la ligne.)
7?3,2S, 26 Juillet.
REVUE POLITIQUE.
Les nouvelles d'Espagne ont toujours un carac
tère inquiétant. Pendant la journée du 17 au i g
Madrid a été livrée l'émeute. Le peuple en armes a
pénétré dans les demeures des person nés les plus spé-
cialementen buttcàses ressentiments,et tous les ap
partements envahis ont été complètement dévastés.
Tout ce qu'ils contenaient a été jeté dans la rue où
les émeutiers en ont fait des feux de joie. Des ri
chesses énormes en meubles, tableaux, objets d'or
et d'argent ont été détruites par les flammes- Parmi
les persounes dont les appartements ont été ainsi
saccagés, on cite le comte de San Luis et Col
lantes, ministres; le général Vista Hermosa, Sala-
raonca, Domeneeh et marquis de Moluis.
Les émeutiers se sont également dirigés vers le
palais de la Reine Christioe; ils s'en sont emparés
nonobstant la défense des troupes restées fidèles,
et ce palais a subi le même sort que les hôtels des
personnages dont nous venons de parler.
Le sang a coulé dans la capitale de l'Espagoe;
des barricades se sont élevées sur plusieurs points
de la ville, et des collisions saoglantes ont eu lieu
entre les habitants et la troupe.Cependant des
uouvelles plus récentes annoncent que le combat
avait cessé et que Madrid était tranquille. Le nou
veau ministère, formé sous la présidence du Duc
de Rivas a déjà donné sa démission et la
Reine, dans ces circonstances critiques, a mandé
le général Espartero auprès d'elle pour former un
cabinet: Le général San Miguel a été nommé mi
nistre de la guerre. Il paraît que celle nomination
a été accueillie avec une grande faveur par le
peuple.
Espartero est-il donc encore une fois sur le
point de devenir le maître de l'Espagne? et que
fera O'Donnel, son ennemi et son compétiteur?
C'est ce que l'avenir nous apprendra.
Quant aux nouvelles des autres points de la Pé
ninsule, elles sont fort confuses et fort incertaines.
Ce qui est positif, c'est que tontes les villes prin
cipales do royaume ont adhéré au mouvement in
surrectionnel. Uu combat a été livré, dans les
environs de Grenade, entre les troupes comman
dées par le géuéral Blaser et celles qui suivent
O Donnel. Les premières ont été battues, et
Blaser s'est enfui en Portugal.
Une émeute a éclaté a Parme: mais elle a été
immédiatement réprimée par les troupes autri
chiennes et parmesaues. Des tentatives de désordre
ont également eu lieu Modène.
Il n y a pas encore pour le moment de nouvelles
importantes du théâtre de la guerre. Du côté du
Danube, les deux armées prennent leurs positions,
se fortifient beaucoup et gardent jusqu'ici une
altitude d'observation.
Orner-Pacha a fait occuper OltenitzaTuroo
Simoilza, et toutes les îles près de Silislrie on les
Turcs établissent de fortes batteries. Ils ont établi
de longues rangées de canons sur le rivage du
Danube entre Silislrie et Rassowa.
A la date du 16 juillet, go,000 Turcs avaient
franchi le fleuve près de Gitirgewo. De temps
en temps il se livre, notamment dans les en
virons de cette dernière ville, des escarmouches
d'avant-postes assez vives où les Russes paraissent
avoir le dessous. D'après une dépêche de Vienne
récente, le prince russe Burtaclin a été grièvement
blessé dans l'un de ces combats.
Il parait certain que les troupes russes ont
peu près complètement évacué la Dobrutscha. A
fur et mesure de cette évacuatiooles Turcs
reprennent les positions auparavant occupées par
l'ennemi, et déjà ils ont avancé jusqu'à Hirsowa.
On peose qu'ils ont l'intention de s'approcher
des bouches du Danube avec le gros de leur
armée.
D'un autre côté, tout indique que les Russes
s'appiêtent défendre la Valachie avec une
grande vigueur. D'après une dépêche de Bucharest,
iis dirigent des forces considérables de la Moldavie
vers les ligues de l'Aluta. La division du général
Liprandi s'approche de Slatina marches forcées.
On annonçait également, il y a quelques jours,
que les troupes turques, qui avaieot occupé jus
qu'ici les principaux points de la petite Valachie,
opéraient uu mouvement de conceutraliou et se
mettaient en marche vers l'Aluta.
Les mouvements de troupes entre Varna et le
Danube continuent sans interruption.
Il est certain maintenant que les batteries fortes
établies par les Russes la Sulina, ont été com
plètement détruites par des bâtiments de l'escadre
alliée. La flotille russe se trouve errante sur le
Danube, et risque beaucoup d'être détruite ou de
tomber entre les mains des alliés.
Les dernières nouvellesannoncent que le général
baron de Hess a franchi la frontière Valaque près
de Barlscherowa.
A Odessa on s'attend un nouveau bombarde
ment de la part des flottes alliées.
Lorsqu'il y a une dizaine d'années la
Belgique se couvrit tout-à-coup d'une
innombrable quantité de clubs, qui, de
tous les points du pays, se mirent crier
anathème aux hommes et aux choses du
temps passé, gloire et honneur au li
béralisme homogène et indivisible, qui va
relever la patrie de ses ruines et inaugurer
le règne de l'âge d'or; alors les élec
teurs furent comme étourdis de tout cet
immense fracas, et commencèrent mau-
dir en leur cœur ces gredins de cléricaux,
qu'ils croyaient sur le point d'attirer sur
la Belgique les sept plaies de l'Egypte.
Donc, ils votèrent avec enthousiasme pour
tous les candidats qui avaient endossé la
livrée des clubs, et qui devaient, disait-on,
opérer des merveilles comme on n'en
avait point vu dans les siècles passés. Le
parti des loges fut victorieux sur presque
toute la ligne. Lu ministère nouveau est
hissé au pouvoir. Sa mission, c'était de
répudier le glorieux héritage de notre
révolution, de réagir contre tout ce qui
s'était fait depuis 1830, et d'exploiter le
pouvoir au profit de la cupidité, des ran
cunes et des haines des clubs. Ceux-ci
voulaient surtout qu'une guerre outrance
fût faite l'influence religieuse, et on peut
affirmer qu'aussi longtemps que leurs
affidés se sont trouvés la tête des affaires,
la consigne, cet égard, a été observée
avec une ponctualité impitoyable. Aussi
voyez pendant que les journaux de leur
bord s'acharnaient tous les jours contre
les prêtres, contre l'Église et ses institu
tions avec une rage digne de l'enfer, les
ministres de leur côté organisent contre
le clergé tout un système de tracasseries;
comme l'a dit un honorable député, ques
tion du droit du clergé en matière d'en
seignement, questions de charité, ques
tions de fabriques, de cimetières, de suc
cursales, de sœurs hospitalières, etc.,
011 remue tout; et bien entendu, on décide
invariablement contre l'Eglise. Une
année, deux années, trois se passent ainsi,
durant lesquelles les affaires semblent
marcher souhait. Tout plie, et le pays
paraît enfin devoir se faire au joug du
libéralisme des loges.
Mais arrive, comme l'on dit, le com
mencement de la fin la 4' et dernière
année du règne de MM. Rogier et Frère,
les électeurs s'aperçoivent enfin que les
grands hommes, qui tiennent de l'Etat,
sont les serviteurs d'une coterie et non les
serviteurs du pays; ils les voient bien plus
occupés traquer les prêtres, distribuer
leurs créatures des honneurs, des places
et des subsides, qu'à faire renaître l'âge
d'or tant promis. Dès ce moment les
mystères de la politique nouvelle sont percés
jour. Les hommes considérables, parmi
les libéraux modérés, effrayés des tendan
ces du libéralisme exclusif, abandonnent
successivement sa cause qu'ils avaient
d'abord soutenue, et vont grossir les rangs
du parti conservateur; leur tour les
électeurs regimbent contre le despotisme
des clubs qui veulent les regenter leur
guise, et ils commencent user du droit
de choisir des mandataires comme il leur
plaît. Qu'est-ce dire?Le règne des
clubs est fini. De toute part on accourt se
ranger de nouveau sous le drapeau de
1830, l'union fait la force.
Ce vieux drapeau c'est notre gloire et
notre force, puisque c'est sous lui que les
Belges ont marché la conquête de leur
nationalité. Qu'il soit donc un signe de
ralliement pour tous ceux qui aiment la
patrie.
Au risque de déplaire certaines per
sonnes, nous dirons que seule tunion a fait
des choses grandes et durables, et que seule
elle est capable d'en faire. C'est elle qui a
fait notre révolution, qui a présidé notre
émancipation politique et la confection
de notre charte constitutionnelle. Elle
nous a fait ce que nous sommes. Rompe?