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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N<> 3418.
33me année.
ATTITUDE DU LIBÉRALISME.
Plus ou moins l'inquiétude augmente et
l'horizon s'assombrit. Les intérêts finan
ciers, les relations diplomatiques, la haute
administration, les convictions religieuses,
les nouvelles politiques, tout prend une
teinte légère encore de malaise dont la
cause est rapportée en partie au gouver
nement, plutôt l'opinion qu'il représente.
Le commerce est froissé par l'insou
ciance qui nous a valu embarras qu'amène
la démonétisation des monnaies d'or néer
landaises. Le Moniteur se débat en vain dans
des banalités confuses pour disculper ses
patrons au sujet de la position où ils se
trouvent avec la Cour de Kome. On laisse
s'accréditer auprès des Puissances la pen
sée que les sympathies belges sont pour
le régime de persécution intronisé Turin,
la démagogie Suisse et les utopistes de la
France. Un gouverneur de province pro
clame publiquement sans hésitation que
le parti de l'ordre l'a emporté sur le parti
du désordre, au moment où les libéraux
compromettent la sûreté des personnes
partout où ils n'ont pas vu leurs intrigues
couronnées de succès, Dixmude, Lou-
vain el Diest. C'est encore sans se gêner
qu'une administration urbaine du Luxem
bourg impose d'office des candidats aux
électeurs, et la loge maçonnique de Brux
elles, dérogeant ses habitudes ténébreu
ses, fait publier au grand jour qu'elle mar
che la tête du parti libéral, le dirige et
le guidé conformément ses vues. Tandis
que le respectable Doyen de Thielt a été
naguères indignement mal mené par les
partisans du ministère, y a-t-il quelque part
un mauvais prêtre, on soutient son en
têtement contre ses supérieurs, et s'il faut
céder le terrain devant la justice des tri
bunaux ou devant le décri général, on sait
encore le trouverdigne de quelque emploi,
quand tant d'honnêtes pères de famille
courent plusieurs années, frappant inuti
lement toutes les portes, ou entendent
s'élever conlr'eux des cris de destitution.
Rien n'a été négligé pour faire dévier la
charité publique de sa mission religieuse.-
On n'a pas eu de répugnance fouiller
dans les poudreuses archives d'une époque
jamais déplorable pour en exhumer
quelques misérables prétextes de molester
des hôpitaux, des religieuses, de pieuses
personnes qui se vouent l'instruction et
au soulagement du pauvre. Depuis que la
politique libérale frédonne ses airs triom
phants, nous n'entendons parler que des
moyens pour réprimer les abus charitables
des testateurs et les illégalités bienfaisantes
des nonnes, pour supprimer ici une école,
pour restreindre là le bien que fait un
établissement et nous ne voyons jamais
que ceLte ardeur se dirige contre l'ivro
gnerie, contre la prostitution, contre l'im
piété et les vices qui trônent dans la plu
part des productions de la presse libérale.
A Bruges, lors des dernières élections,
les meneurs de la politique nouvelle ont
dépassé toutes les limites des convenances,
Louvain un drapeau rouge a été promené
dans les rues, le bureau du Demerbode a
été sur le point d'être envahi, et Dixmude
M. le Curé de Corlemarck a dû fuir po\ir
ne pas être exposé des voies de fait. Rare
ment des mesures efficaces ont été pri
ses pour prévenir des scandales qui décon
sidèrent évidemment les localités où ils se
commettent.
Au milieu de ces tristes symptômes de
désunion, le Ministère qui a déjà remué
ciel et terre pour diminuer l'influence
du clergé dans l'instruction publique,
laisse les journaux du libéralisme se ruer
corps perdu contre les catholiques, con
tre l'épiscopat et le Souverain pontife. Si
contre quelque projet de loi les Catholiques
fervents pétitionnent, si l'épiscopat ex prime
ses doléances, si le Souverain Pontife fait
entendre lui-même un cri de douleur au
sujet de la Belgique, la politique doctri
naire va son train sans écoulerni des mem
bres du Congrès, ni qui que ce soit; elle
va vociférant contre le cléricalbafoue le
clergé national, et appelle du Pape mal
informé au Pape mieux informé, comme
fesaient Luther et d'autres novateurs avant
d'avoir entièrement déposé le masque de
vant les peuples.
Une rumeur bien grave est en ce mo
ment répandue. Le ministère aurait tâché
par l'entremise desonambassadeur Rome
d'obtenir la suppression du siège épiscopal
de Bruges. Une correspondance romaine
en a soufflé le premier mot, L'Univers reli
gieux de Paris l'a répété, Y Indépendance de
Bruxelles, qui passe pour recevoir les in
spirations du pouvoir, a éclaté en invec
tives de tout genre sur l'audace des cor
respondants étrangers sans toucher la
question, et sur l'interpellation formelle
du Journal de Bruxelles, le Moniteur s'est
nettement refusé répondre.
Cette attitude du Gouvernement envers
les habitants catholiques de la Flandre oc
cidentale n'est certes pas rassurante. 11 y
a ici la fois un intérêt catholique el social,
et un intérêt de bonne foi en même temps
qu'une question directement yproise. Il y
a un intérêt social sans doute ne point
relâcher les liens religieux de la nation
au moment où les conspirations socialistes
peuventessayer de nouveaux ébranlements
dans la France mal assise. Ce n'est pas dans
un pareil temps qu'il faut mécontenter une
province importante, franchement atta
chée la foi de ses pères. Y aurait-il boune
foi porter une pareille question devant
la Cour pontificale sans avoir consulté les
populations intéressées? et les partisans en
qui réside quelque sentiment religieux et
patriotique, que le ministère possède
Ypres, ne les perdrait-il pas, en cherchant
jouer un tour que nous nous abstenons
de qualifier au premier évêque, au premier
prince de l'Eglise que la cité a vu naître
dans ses murs, et dont elle est fière comme
du plus glorieux de ses enfants. Nous at
tendons avec impatience que le ministère
s'explique ce sujet, nous le supplions de
ne point garder un silence qui fera gran
dir les appréhensions, nous le prions aussi
de s'arrêter dans une route doublement
compromettante sous le rapport religieux
et politique, et de se roidir contre l'entraî
nement des doctrines qui prétendent le
dominer, en se rappelant que la pire des
anarchies serait celle qui dériverait et s'au
toriserait des principes du gouvernement
lui-même. Il y va de l'honneur des hom
mes distingués qui composent le cabinet,
et de l'avenir qui leur est confié de la pa
trie.
Le rôle que joue le ministère issu des
efforts croisés des républicains, des franc-
maçons et des révolutionnaires de tout
genre contre notre gouvernement établi
notre religion el nos libertés; la politique
glissante, singulièrement nouvelle que le
cabinet Rogier-Frère-Dehaussy adopte, et
les projets tracassiers et rétrogrades qu'il
couveau sujet de l'ordre des choses existant
parmi nous, commencent émouvoir l'o
pinion publique, jeter le trouble et l'in
quiétude dans l'esprit si calme des popu
lations Belges, et éveiller l'attention dé
favorable des nations environnantes.
Sujet de crainte et d'alarme pour l'a
venir, tel se montre aujourd'hui ce parti
groupé sous le drapeau du soi-disant libé
ralisme et dont l'avènement au pouvoir
fut réputé providentiel par les historiens
de l'époque; fléau du bien-être domestique
et de l'influence religieuse, telle se dévoile
au pouvoir cette faction bigarrée, hypo
crite, qui n'eut assez de protestations de
respect pour les intérêts moraux et reli
gieux alors qu'il s'agissait de hisser son
pavillon au Capitole.
Sujet de crainte pour l'avenir de la Bel
gique! Certes, adressé notre gouverne
ment, ce reproche est grave; néanmoins
il est juste et mérité. Pour s'en convaincre
il suffira de compiler les actes et la con
duite des hommes en relation intime avec
le pouvoir.
Allié aux divers révolutionnaires tels que
les démocrates, les socialistes et les ex
altés des loges maçonniques le parti li
béral au lieu de faire tendre ses efforts au
profit, au bonheur commun des Belges ne
travaille-t-il pas exclusivement l'avàntage
au gré, aux caprices des factions turbu
lentes qui lui ont conquis le pouvoir?
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Ou s'abonne Yprès, rue de Lille, 10, près la Grande
Placer el chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE LMDtIXEllENT, par trimestre,
Ypres fr 3. 4Les autres localités fr 3 5o. Uu n° a5.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (insertions 19 centimes la ligne).
3 Juillet.