JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3416.
33me année.
7PS.33S, 26 Juin.
ENTREPRISES LIBÉR A LISTES.
Lorsque poussé bout par les vexations
innombrablesduvoltairianismehollaudais,
le parti catholique répudia un gouverne
ment aveugle et despotique, il était loin
de prévoir qu'une partie de ces hommes
qu'alors il tirait du néant, ligués toutes
les coteries autinaliouaies, s'efforceraient
quelques années plus tard de lui ravir les
précieuses conquêtes que cimentèrent les
plus pénibles sacrifices. Et cependant il
s'est rencontré de ces hommes, qui devant
tout au concours de l'opinion catholique
ont renié leurs antécédants ainsi que leurs
bienfaiteurs, el s'évertuent chaque jour
surpasser l'intolérance protestante du roi
Guillaume.
L'on sait les mesures illibérales dont
l'administration Rogier-Frère-Dehaussy ne
craignit pas de se souiller la veille des élec
tions. Comme on pouvait le prévoir, ce
n'était là que le prélude de plus graves
empiétements!
Les comices électorales elles-mêmes ne
furent qu'une lutte sacrilège entre le gou
vernement et la conscience de l'électeur,
que les hommes du pouvoir, au jour de
leur avènement, avaient néanmoins solen
nellement promis de respecter. (Mais que
coûte la politique nouvelle le mensonge
qui s'appelle promesse?
Cependant le courage délirant du déses
poir sut grande peine les prémunir d'une
défaite entière. Aujourd'hui ils en sont
chanter victoire; car quelques jours de
cette puissance dont la soif les dévore, est
leurs yeux tout un avenir.
Mais que présagent et ces clameurs fré
nétiques l'adresse du clergé, dont les
feuilles ministériellessalissent l'envi leurs
colonnes; et ces ignobles diatribes, tissu
horrible de blasphèmes et d'impudence,
où les choses les plus saintes sont indigne
ment outragées, où l'on lit, par exemple:
faut-il citer la chaire dite de vérité, le con-
fessionnal, ces leviers puissants contre
lesquels viendront encore longtemps
échouer les lumières de la civilisation.
(Progrès, n# 953.) Que présagent ces
vociférations dignes des héros de 93, ces
hurlements nocturnes, ces cris de mort
retentissant dans les rues de Bruges, de
Louvain, d'autres villes encore, et ce lâche
guet-apens, où le rédacteur du Demerbode,
a failli périr sous les coups des libéralistes
de Diest, victime de ses convictions et de
ses droits de citoyen? Que présagent sur
tout ces menaces hautaines, qui se font
jour dans le langage de la presse doctri
naire? Nous ne savons, dit une feuille de
cet acabit, ce qui peut arriver, mais il est
facile de prévoir qu'une réaction ne se fera
pas longtemps attendre et que le clergé aura
se repentir d'avoir profané le sanctuaire
pour des avantages temporels.... (Progrès,
953.)
Ah nous n'ignorions pàs les rancunes
viles et implacablesque nourrissent contre
le prêtre vigilant el dévoué ces hommes
qui ne savent que haïr! La guerre qu'a dé
claré le ministère au catholicisme n'est pas
près de se voir terminée; défaut de preu-
vesdirectes, le iangagedu parti l'attesterait
sans répliqué. Mais les graves nouvelles,
que publie une correspondance de Rprae,
et que nous dounons ci-après, apprendront
aux plus incrédules le sort réservé notre
malheureuse patrie, si les efforts suprêmes
de ses véritables enfants n« parviennent
l'arrêter sur le bord de l'abîme où d'im
prudents pilotes tendent la précipiter.
Un grand devoir incoralbe donc tont
citoyen digne de ce nom. A l'heure de la
tempête, malheur au matelot qui s'aban
donne un lâche sommeil; l'heure du
péril, opprobre au militaire déserteur du
drapeau L'homme viril sait surmonter l'o
rage, ou s'il succombe ce n'est pas sans
honneur. Il fut un temps |.où le sort des
royaumes se trouvait conté la sagesse
des rois: de nos jours le peuple s'est senti
assez fort pour se placer ni même au ti
mon des affaires: puisse-t-il comprendre
en même temps l'immense responsabilité
qu'entraine l'exercice du pouvoir!
C. De Bruyne, vieille femme de 70 ans,
particulière, qui demeurait chez le culti
vateur J. Goemaere, Poelcappelle, allait
se coucher Dimanche dernier, au soir,
son ordinaire et le lendemain on l'a trou
vée morte dans le puits qni est dans le
verger de cette ferme. L'on attribue ce
suicide un dérangement d'esprit.
VÉBIIÉ ET JUSTICE.
On s'abonne i "Yprès, rue de Lille, 10, près la Grande
Place, el chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'IIMIENERT, par Irlme.tre,
Yprts fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° a5.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne).
Quand M. le gouverneur de Bruges, insultant a
l'imposante minorité du 11 juin, accusait notre
opinion d'aimer l'anarchie et qualifiait son parti
de pacifique, il s'est servi d'une antiphrase hardie
que nous devons relever.
Nous avons les mains pleines de faits qui attes
tent que le cabinet a partout pactisé avec les hom
mes les plus turbulents, et que ses partisans les
filus actifs figurent dans les rangs de ceux qui ont
'habitude de braver les lois et de troubler la tran
quillité publique.
L'Observateur disait hier que le parti libéral
n'est pas le parti de l'ordre. On va voir jusqu'à
quel point cet aveu de la feuille ministérielle est
vrai.
Les faits que nous allons rapporter nous étaient
connus depuis quelques jours, ét la presse s'en est
déjà émue. Si nous avons tardé les publier, c'est
que nous avons voulu obtenir des renseignements
détaillés et positifs qui nous permissent d'affirmer
toutes les parties du récit qne nous avions faire.
Dimanche dernier M. le bourgmestre de Diest
convoqua les électeurs la maison de ville pour y
proposer une démonstration favorable M. Chris-
tiaens, éliminé de la Chambre par les représentants
léganx de l'opinion publique. Vers cinq heures du
soir, le collège échevinal, accompagné d'un grand
nombre de personnes, se rendit processionnelle-
ment vers la demeure de M. Chrisiiaens qui fut
complimenté dans des termes hostiles au clergé et
injurieux pour le corps électoral.
M. Christiaens, encore sous le coup de l'échec
du 11, se plaignit amèrement de l'intervention du
clergé dans les comices. Il l'accusa d'être descendu
de la chaire évangélique et de s'être jeté au mi
lieu de la rue pour y propager le mensonge et
la calomnie. Ainsi parle le journal de M. Chris
tiaens lui-même.
Ensuite M. Christiaens fit un pompeux éloge dn
grand parti national qui a su en i848 sauver
notre belle patrie d'une catastrophe imminente,
après avoir sauvé ceux-là même qui aujour
d'hui osent se déclarer ses plue cruels ennemis
Ceci est une variante sur le thème de M. Frère.
Passons outre, sauf demander un autre jour M.
Christiaens de quelle catastrophe imminente la
Belgique était menacée en 1848, et quelle classe
de libéraux aurait abattu révolutionnairement les
catholiques?
Comme citoyensajouta M. Christiaens veil
lons sur nos devoirs et sachons combattre avec
courage, il en est temps! (Nous copions littéra
lement le journal de l'orateur.) Un ennemi impla
cable, Vennemi éternel de nos libertés a levé de
nouveau son drapeau lugubre(La ponc
tuation aussi est de M. Christiaens.)
Ce langage violent appelait des violences. Elles
éclatèrent bieotàt.
Dans la soirée* pendant qu'on donnait une sé
rénade M. Christiaens, uo charivari retentissait
devant la demeure de l'éditeur du Demerbode,
journal officiel qui avait combattu la réélection du
héros de la jouruée.
La sérénade et le charivari ne (émuigliaient pas
d'un profond respect pour la liberté des votes, m
pour la liberté de la presse, ni pour la dignité des
électeurs. Toutefois nous n'eussions pas relevé ces
inconvenances si les libéraux de Diest en étaient
restés là.
M. Havernians, l'estimable éditeur du Demer
bode, averti dès le matin, était sorti de la ville pour
ne fournir aucun prétexte de tapage aux perturba
teurs. Rentrant chez lui le soir, il fat reconnu par
uue bande qui parcourait les rues en vociférant
contre le clergé, et entouré l'instant d'une soixan
taine d'individus parmi lesquels se trouvaient un
conseiller provincial et des fonctionnaires publics.
Cette foule surexcitée se rua sur M. Havernians, lui
donna des coups de bâton, lui cracha la figure,
et cria diverses reprises: Arrachez-lni la tète!
Jetez-le dans le Demer A bas les calotios
Cette scène affreuse, qui mit tout le voisinage
sur pied, se passait non loin de la maison de M.
Havermans, où sa femme et ses enfants se trou
vaient dans uoe situation facile concevoir. Elle
aurait eu infailliblement des suites funestes, si un
fonctionnaire communal et un ami du journaliste
n'étaient intervenus pour arracher celui-ci la
foule furieuse.
Constatons que pas un agent de police n'a été vu
sur les lieux où se commettait cet indigne guet-à-
pens, que l'autorité est restée inactive et muette,
et que des officiers indignés ont attendu en vain
l'ordre de faire agir la garnison.
Voilà comment le parti pacifique (comme l'ap-