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JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N<> 3396.
33me année
TPP.SS3 Avril.
AUX ELECTEURS.
Dans son numéro de samedi 13 avril,
la Commune d Ypres, organe de la classe
commerçante et industrielle de notre ville,
s'occupant des élections législatives du
mois de Juin, émet la candidature de M.
Jules Malou ancien ministre des finances.
De profondes connaissances administra
tives, une rare éloquence parlementaire,
un patriotisme toute épreuve telles sont
les qualités distinctives de notre éminent
concitoyen qui lui captivent l'estime et la
sympathie locales; tels sont les titres que
ta Commune fait valoir pour recommander
la candidature qu'elle propose.
Appréciateurs du mérite reconnu, dé
fenseurs constants des principes d'ordre
LE PRINCE D'UN JOUR.
vérité et Justice.
Ou s'.boune Yjires, rue de Lille, m, près la Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du P.nyaume.
PRIX DE L'AHMXEMEIT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° a5.
Ce Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (Inaction» II centimes la ligne).
REVUE POLITIQUE.
Le gouvernement français a reçu de son repré
sentant a Naples une dépêche télégraphique en date
du 9 avril, annonçant que le Pape est entré le 6 au
soir a Terracine où il a reçu un accueil de très-bon
augure, et qu'il est reparti le lendemain de grand
matin pour Frosinone.
Le Président de la République a été de nou
veau insulté hier par des hommes du peuple. Un
léger accident survenu sa voiture, l'ayant obligé
de s'arrêter au rond-point des Champs-Elysées, il
fut bientôt entouré d'une foule d'individus qui ont
fait entendre des cris séditieux.
Depuis quelques jours les nouvelles des départe
ments ne sont pas très-rassurantes en ce qui con
cerne les dispositions de l'armfe'e.
Presque partout on a constaté de nombreux cas
d'insubordination. A Angers, Rouen, a Nantes et
dans d'autres villes encore il s'est produit des faits
que les journaux conservateurs s'efforcent d'atté
nuer, mais qui ne laissent pas de répandre l'in
quiétude dans les esprits. On le voit, les leçons, les
avertissements arrivent de tous côtés; le parti con
servateur finira-t-il par y prêter l'oreille, ou bien,
s'obstinant dans sa stupide imprévoyance, se li-
vrera-t-il ses ennemis pieds et poings liés? C'est
la seule alternative qui lui reste aujourd'hui.
Depuis quelques jours, on a répandu des bruits
étranges sur le compte du Président de la Répu
blique, qui l'oa attribue l'intentiou de changer
de politique et de rompre avec la majorité.
Le Dix Décembre, journal dont les sympathies
pour Louis Bonaparte sont bien connues, vient de
preudre une attitude fort extraordinaire vis à-vis
des chefs du parti modéré, ou comme il les appelle
pour se conformer la mode révolutionnaire, les
Burgraves et les Margraves. Le Président, dit
cette feuille, a cru depuis 18 mois devoir chercher
son point d'appui pour le bien public, dans une
entente cordiale avec le parti modéré... Tous ses
efforts y ont échoué...
Cet article du Dix Décembre, qui n'est après
tout qu'une fanfaronade, a produit une impression
fâcheuse; on voulait y voir dans 1e public comme
une sorte de confirmation des bruits invraisem
blables dont nous parlons plus haut.
La vérité est que Louis-Napoléou doit être fort
embrassé de sa personne au milieu des prétentions
de toute espèce qui s'élèvent autour de lui et
enchaioent sa volonté. Cependant il serait absnrde
de croire que le Président songe s'appuyer sur la
gauche; il n'y a de salut pour lui qn'avec le parti
conservateur. Toute autre politique entraînerait
inévitablement la chute et la perte de la société.
Il paraît de plus eu plus probable qu'un nou
veau ministère sera formé après l'élection du 28
avril ou du moins que le cabinet actuel sera modifié.
Mais quels sont les éléments dont se composera ce
nouveau ministère, voilà ce qu'on ignore encore.
Toutefois on peut espérer que let'résidènî choisira
ses conseillers dans le sein de la majorité, car la
moindre concession la gauche, sous ce rapport,
serait une faute irréparable.
Ou n'a pas oublié sans doute le nom d'un garde
national, qui, devant one barricade au mois de juin,
vit tomber ses côtés son fils aîné, percé de balles.
Ou se rappelle que cet homme de cœur courut alors
chercher son second fils, âgé de 18 ans, et qu'il re
tourna avec lui au combat.
C'est cet héroïque défenseur de l'ordre que
l'opinion publique désigne aujourd'hui aux suf
frages des électeurs de Paris.
On assure que M. Foy vient de se désister de 9a
candidature en faveur de M. Leclerc. Nous espé
rons que ce fait se confirmera bieittôt, car aucune
candidature ne serait plus propre assurer le
triomphe de l'opinion modérée; elle sera ponr tons
les conservateurs Ode énergique protestation contre
les coupables tentatives des ennemis de l'ordre et
du repos public.
Le journal de M. Proudhon publie le compte-
rendu de la séance du conclave socialiste. Nous en
reproduisons un résumé qui permettra nos lec
teurs d'apprécier l'esprit de la démocratie.
Ces sectaires fanatiques de l'anarchie, façonnés
l'irréligion et au scepticisme par la bourgeoisie
française, et marchant aujourd'hui en colonnes ser
rées coutre ses maîtres, nous offrent un spectacle
plein d'utiles enseignements.
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(Suite.)
Il paraissait chercher dans ses mains les vieilles
odeurs du cuir et de la poix, qu'il n'y retrouvait
plus. Il avait l'air d'éprouver une succession de sur
prises qu'il n'osait plus exprimer mesure qu'on
l'affublait d'or et de pierreries. Quand il fut ha
billé, ou fut étonné de le voir se placer devant un
miroir, s'ajuster et se donner une contenance qui
annonçait un certain goût inné. Il sembla enfin
avoir pris son parti, demandant les choses dont il
avait besoin, mais parlant toujours avec une humble
bienveillance.
La cour le conduisit la salle manger, où l'on
avait servi un déjeûoer friand et recherché. Il fut
tellement séduit par la bonne chère et par quel
ques verres d'excellént vin qu'on lui versa, que
décidément il ne recula plus devant les consé
quences de son titre de comte de Hollande, et qu'il
se laissa faire.
Après le déjeuner il témoigna le désir de s'aller
promener dans les rues de La Haye sous son riche
vêlement. On n'a jamais bien su quelle pouvait
être sa pensée. Maison lui représenta qu'il fallait
aller la messe, et on le fit entrer dans la chapelle
de la cour, dont on admirait les trois splendides
autels, consacrés Notre-Dame, Saint Ivon et
Saint André. Comme malgré ses défauts Willem
avait toujours conservé des sentiments religieux et
qu'il remplissait ses devoirs de chrétien, ou (ut ravi
de le voir dire humblement ses prières dans une
contenance la fois grave et modeste.
Mais dix heures il fut plus embarrassé, lors-
qu'ayant été conduit la salle du trône, on lui dit
qu'il fallait présider une séance de justice et rendre
des sentences.
m
Ce serait assurément une comédie très-plaisante
que la fidèle peinture dans tous les détails, de la
mémorable journée que nous retraçons ici. Mais
n'ayant pas été spectateur de ce drame bizarre,
nous devons nous borner rapporter ce que nous
ont transmis les récits contemporains.
Dès que Willem fut assis sur le tTÔne, on ap
pela devant lui diverses causes; on fit paraître des
plaideurs. Les circonstances de ces procès bur
lesques sont pour la plupart d'une nature si tri
viale,ou du moins les documents que nous en avons
sont si altérés, que nous n'osons les consigner ici.
Le savetier-prince rendit plusieurs arrêts, avec
un aplomb qui étonna Philippe le Bon et sa cour.
Alors on fit entrer un homme qui réclamait, au nom
du maîrre d'un cabaret de la chaussée de Scheve-
niugue, une somme de onze florins que lui devait,
disait-il, nu certain ivrogne du métier des save
tiers, appelé Willem.
Je connais ce garçon là, interrompit le juge;
et il n'est pas nécessaire que vous le traitiez d'i
vrogne. S'il ne paie pas, c est qu'il n'en a proba
blement pas les moyens. Je lui veux du bien—
N'ai-je pas là un trésorier?
C'est moi, Monseigneur, dit un vieux gentil
homme en s'avançant.
Eh bien reprit Willem, faites-moi le plaisir
de payer les onze florins qu'on réclame et d'en tirer
bonne quittance. Et pendant que vous y êtes,
ajouta-t-il en s'avisant, vous allez envoyer de
suite mon ami Willem, au Korte-Poote, deux
cents bons florins tout neufs.
Votre altesse veut rire, dit le chancelier, en
appelant un savetier son ami.
Je sais ce que je dis, répliqua Willem. De
plus qu'on lui porte vingt-ciuq bouteilles de cet
excellent vin blanc que j'ai bu ce matin. Qu'on tire
reçu de tout', et alons dîner.
On fil observer au prince qu'on ne dînait qu'à
midi. On lui apporta des actes signer. Le pauvre
garçon ne savait pas écrire.