JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
j\o 3395
33me année.
7PR.3S, 13 Avril.
REVUE POLITIQUE.
LES BIENFAITS DES L1BÊRALISTES.
Rien n'est attrayant et beau comme rat
tachement sans bornes qu'affiche le soi-
disant libéralisme aux intérêts de la gé
néralité. Mais aussi, rien n'est plus hypo
crite et plus chimérique que ces égards,
Sue cette considération, que cette estime
ont le parti dominant se targue.
Avant d'être pouvoir quelles ne furent
les promesses que la tourbe libéraliste fit
sonner aux oreilles des contribuables?
Quelles flatteries, quels projets éblouis
sants et dorés ne semèrent les apôtres de
la politique nouvelle pour recruter des
suffrages au grand jour des comices?
Aux cultivateurs ce fut la prospérité et
le salut de l'agriculture qu'on garantissait
si les candidats libéràtres pouvaient sortir
victorieux de l'urne. Aux industriels et aux
commerçants ce fut protection, encoura
gements de tout genre; chaque citoyen
ce fut respect pour sa religion et ses li
bertés, aux contribuables en général ce fut
décroissement des impôts et des charges
publiques, économie stricte et sage.
A l'amorce de si pompeuses promesses
que de gens se sont laissé prendre! Attraits
par l'odeur mielleuse et suave de la coupe
libéraliste que de bons citoyens, sans y ré
fléchir ont avalé un mortel poison!
L'expérience est là qui le confirme: les
maximes du faux libéralisme, ont répandu
leur vénin dans toutes les veines sociales.
L'homme des champs dans son aveugle
confiance les a adoptés dans la personne
des députés libéralisles et déjà il déplore
son égarement sa folie. Oui, trop bien,
celte heure, le campagnard apprécie la
valeur des promesses de la politique nou
velle: les pauvres qu'un ministre, ennemi
juré de la bienfaisance publique a privés
peut-être de maints dons de la philan
thropie Belge, en venant assiéger ses portes
témoignent des sentiments qui animent le
ministère l'égard des malheureuses fa
milles. La loi concernant l'importation des
céréales étrangères est une preuve non
moins péremploire du peu de sympathie
que rencontrent auprès du cabinet actuel
les intérêts graves de l'agriculture.
Inutile des'étendresur les bienfaits dont
le libéralisme aurait gratifié le commerce
et l'industrie. La mesure récente prise par
le gouvernement relativement la fabri
cation des toiles Russias, traduit assez lit
téralement le grand mot libéralisme.
Indépendamment de ces intérêts spé
ciaux et particuliers, il en est d'autres que
le parti dominant froisse et foule indigne-
LE PRINCE D'UN JOUR.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Mr Charles Van Praet, d'Ypres, ancien
élève du collège S' Vincent de Paul, vient de
passer avec distinction son examea de candidat
en philosophie et lettres.
Mr Hector Bossaert, de Langhemarck, vient
également de passer le même examen.
Le bruit de l'empoisonnement de Pie IX est
démenti aujourd'hui par tous les journaux français.
Ce bruit, sorti de quelque officine montagnarde,
dit une correspondance parisiennea été heureu
sement aussitôt démcoli que répandu. Mais le seul
fait de sa mise en circulation avait agité non-seu
lement l'Assemblée législative et le public qui se
trouvait dans les tribunes, il avait encore excité au
dehors une profonde douleur. Cette occasion a
servi a faire éclater les sentiments de vénération et
d'affection que tous les honnêtes gens de Paris pro
fessent pour un Pontife aussi bon qu'éclairé et
libéral.
L'élection de Paris! voilb toujours la grande
question a l'ordre du jour; on en comprend si bien
l'importance qu'on ne saurait s'occuper d'autre
chose. Et cependant le parti de l'ordre ne fait rien
pour prévenir l'insuccès dont il est menacé. Cha
que fraction de l'opinion modérée continue a bonder
1 Union électorale et b marcher isolément Le Con
stitutionnel seul arbore hautement aujourd'hui la
candidature de M. Foy, en tête de ses colonnes.
Rien n'est décidé encore relativement aux bases
principales de la loi sur la presse. La commission
n'a adopté aucune disposition définitive.
On assure que les citoyens Flocon, Marrast et
Goudchaux se sont fait inscrire comme candidats
l'élection du 28 avril.
Le bruit courait hier b Paris que le gouverne
ment venait de recevoir d'importantes nouvelles de
Sl-Pétersbourg, mais on ne disait pas de quelle na
ture étaient ces nouvelles.
Le différend anglo-grec qui avait mis toute
l'Europe en émoi, est terminé, dit-on. Lord Pal-
merston avait adressé a M. Wyse des instructions
portant que le ministre anglais devait se conformer
b la décision arbitraire du médiateur français.
On n'a pas encore b Paris de nouvelles certaines
sur les intentions du S'-Père. Les journaux ont
été mal informés quand ils ont annoncé que de
nouvelles complications mettaient obstacle au re
tour de Pie IX b Rome. Ces nouvelles sontau moins
prématurées.
Les correspondances d'Italie nous apprennent
que les petites villes des Etats romains paraissent
animées d'un bon esprit, mais que c'est dans la
capitale où régnent les mauvaises passions. Rome,
quoique paisible, est encore sourdement agitée par
les menées révolutionnaires. Voila ce qui doit cer
tainement préoccuper le Saint-Père, et surfont les
personnes qui l'entourent; c'est aussi ce qui a
donné lieu aux suppositions de quelques journaux
d'un nouvel ajournement de l'entrée b Rome.
11
(Suite.)
Car Philippe le Bon voulait qu'oD fit croire b ce
pauvre homine qu'il était le prince souverain.
Comme il ne répondait point, un page lui prit
la main, dans laquelle il frappa doucement pour
l'éveiller.
Willem entr'ouvrit les yeux, puis les frotta
comme pour dissiper un éblouissement, puis les
ouvrit tout grands, regarda autour de lui d'un air
effaré; et sans doute persuadé qu'il était bercé par
un doux songe, il se retourna pour s'endormir, le
sourire sur les lèvres.
Mais on le secoua plus vivement; on l'éveilla
de nouveau et de nouveau le maréchal de Bour
gogne s'approcha et lui dit
Monseigneur...
Hein répondit Willem en tressaillant vous
avez dit: Monseigneur. A qui parlez-vons donc
la? Est-ce qu'il y a ici un prince?
Il mit encore la main sur les yeux, regarda d'une
manière indéfinissable tout autour de lui, et surpris
de ce qu'il voyait:
Si c'est un rêve, dit-il en se parlant b lui-
même, c'est un beau rêve.
Il s'était mis sur son séant.
Monseigneur, reprit très-gravement le ma
réchal de Bourgogne, voici l'heure où votre altesse
se lève.
Monseigneur, répéta Willem, en se parlant
derechef b lui-même, Monseigneur!... où snis-je
donc.9
Alors,sans attendre la réponseb la question qu'il
se faisait, il se mit b tâter les rideaux splendides qui
garnissaient son lit, la riche courte-pointe brodée
qui le couvrait, les draps fins dans lesquels il était
couché. Il ôta sou bonnet de soie,dont l'élegance le
consterna. Il flaira ses mains, qu'on avait lavées avec
des odeurs suaves et qui en étaient encore parfumées.
Où suis-je? reprit-il, et qn'est-ce que c'est
que tout cela
Ne reconnaissant autour de lui ni le cabaret, ni
sa boutique, il se touchait et se pinçait pour s'as
surer qu'il était bien lui.
Si je suis eu prisondit-il enfin, on n'y est
pas mal.
Les spectateurs de ce reveil s'en amusaient extrê
mement. Tandis qu'il fixait d'un air presque hébété
-des officiers éclatants et les dames de la cour qui en
touraient la chambre, le maréchal de Bourgogne
revint b la charge:
Ne vous reconnaissez-vous pas, Monseigneur?
dit-il; et votre altesse aurait-elle fait un mauvais
somme? Je suis votre maréchal de Bourgogne.
Et moi, Monseigneur, votre chancelier, dit
un autre, en s'avançant.
Et moi, Monseigneur, votre grand échanson.
Et moi, Monseigneur, votre maître-d'hôtel.
Et moi, Monseigneur, votre grand-pannelier*
Et nous, Monseigneur, les pages de votre al
tesse, poursuivirent plusieurs voix lutines.
Et moi, Monseigneur, le capitaine de vos
gardes.
Et moi, Monseigneur, le maître de vo.tre ar
tillerie.
Et nous, Monseigneur, vos greffiers de justice.
Et moi, Monseigneur, l'intendant de votre
garde-robe.
Et moi, Monseigneur, le gouverneur de votre
palais de La Haye.
Tous les officiers présents passèrent ainsi en revue
devant Willem, b qui ils déclinèrent respectueu
sement leurs titres.
Une femme de chambre de la princesse vint a
son tour, dans un gracieux costume:
Et moi, Monseigneur, ajouta-t-elle, ne suis-
je pas la royale épouse de votre altesse
Ah vous êtes mon épouse! dit vivement le
savetier, en sortant avec effort de sa stupéfaction
je ne savais pas être marié encore. Mais pourtant je
ue m'en repens pas.