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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3390.
33me année.
7?P.2S1_27 Mars.
REVUE POLITIQUE.
L'ENSEIGNEMENT ET LES FINANCES.
Le parti ministériel, qui l'approche
des élections se sent niai l'aise, veut
au moins, pendant qu'il trône encore
la Chambre, emporter au fil de l'épée le
vole du malencontreux projet de loi sur
l'instruction secondaire. Frappé apparem
ment de terreur panique la vue de la
réaction qui se manifeste de toute part
dans le pays, il précipite de telle sorte la
discussion sur ce sujet important, que nos
Représentants pourront grande peine
étudier les conclusions de la section cen
trale,non encore publiées. Malgré lesjustes
représentations de la droite, la discussion
en a été fixée au 9 avril prochain, c'est
dire immédiatement après les vacances de
Pâques.
Comme il convient en pareille occur
rence, le moniteur du conseil communal,
applaudit avec rage. Dans un article, moi-
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'A DO XIV E M EXT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° a5.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (insertions M 7 centimes la ligne).
Le gouvernement sarcle a protesté contre les
mesures prises par le maréchal Radetzky relative
ment a l'émigration; les ambassadeurs d'Angleterre
et de France appuient la protestation.
La question de savoir si l'on votera la Consti
tution en bloc au Parlement d'Erfurt, n'est pas
encore résolue. On remarque que les Ministres
prussiens évitent toute explication cet égard.
Une correspondance dit qu'on n'était pas sans in
quiétude dans les cercles des députés sur cette
Téserve gardée par les Minisires aussi bien dans le
Message d'ouverture de la Diète que dans les rela
tions privées.
On mande d'Athènes, la date du 12 mars, que
les nouvelles qu'on y avait reçues de Pétersbourg
avaient produit l'impression la plus favorable.
L'état des choses était toujours le même Athènes.
Le Moniteur prussien confirme la nouvelle du
rappel de la légation prussienne Wurtemberg.
Dans la séance de la Première Chambre hano-
vrienne, du 23 mars, M. le Ministre Benningsen,
répoudaut a une interpellatioua dit que le gou
vernement n'a reçu aucune communication officielle
du rappel de l'envoyé prussien et qu'il a appris par
les journaux seulement que ce rappel a uu motif
politique.
L'anulation de l'élection des socialistes de Saône-
et-Loire a produit ud graud désappointement dans
les rangs des libéraux rouges, qui, depuis huit
jours, se pavanaient et faisaieut la roue sur la crête
de la montagne. Cependant ils u'ont pas tardé
a reprendre courage, ils ne doutent pas, disent-ils,
de leur réélection. Dieu veuille qu'ils se trompent,
et que le département de Saône-et-Loire, mieux
éclairé sur ses véritables intérêts, leur substitue des
hommes probes et intelligents.
Tous les journaux de la presse parisienne sont
unanimes dans l'improbation qu'ils manifestent
coDtre la loi sur le timhre et le cautionnement.
Seulement les organes de la presse modérée met
tent une grande réserve dans l'expression de leur
opinion, taudis que le langage des feuilles rouges
est plein de menaces et de sombres prévisions.
Le suffrage universel conféré a l'armée fait aussi
l'objet des commentaires de plusieurs feuilles pari
siennes. L'une d'elles, voit dans le droit de suffrage
accordé l'armée un funeste dissolvant de la dis
cipline militaire, une transformation des soldats en
prétoriens s'insurgeant contre leurs chefs, faisant
et défaisant le gouvernement, en fournissant la
guerre civile un puissant et formidable aliment.
La nécessité de refondre l'organisation de l'armée
et de modifier le suffrage universel en ce qui la
concerne, telle est évidemment la conclusion qui
ressort de ce raisonnement. Aura-t-ou le courage
d'en venir là?
Un despote disait: Qu'ils crient, pourvu
qu'ils paient. M. Rogier disait: Quand il
est question d'enseignement ou ne parle pas de
finances. Cette voix de l'opinionque du moins
le despotisme tolère parfois, bien que pouvant la
réduire au silence, parce qu'il la inéprise, le libéra
lisme s'impatiente de ne pouvoir l'étouffer. Toutes
les concessions possibles ont été faites l'opinion
libérale pour la contenter: la moindre velleïlé de
résistance, elle devenait rouge de colère, surtout
lorsqu'on s'apitoyait sur les charges croissantes du
budjet et le sort des contribuables.
Il y a dix ans que M. Devaux se vantait déjà qne
tous les hauts postes, les emplois lucratifs, étaient
occupés presque exclusivement par des libéraux.
Le personnel de beaucoup d'administrations fut
augmenté sur les instances des libéralisles. Qui vou
lut toute force des augmentations de traitement
en tout? Les libéralisles: que chacun recueille ses
souvenirs, et il en restera convaincu. Des pensions
accordées sans discernement et sans mesure, jetées
la face de tant de personnes qni les acceptent en
haussant les épaules, surprises des largesees de la
loi, qui faut-il les attribuer? Sans les réclama
tions souvent débordées des députés catholiques,
la masse en serait bien plus considérable: tant
les clameurs hypocrites des libéralistes fongueux
étaient exigeantes en vue de leur propre cupidité,
et en vue d'une insidieuse popularité. Quelle né
cessité y avait-il d'augmenter les traitements des
magistrats, part les juges-de-paix, alors que peu
après on portait une loi dont les eflels privent les
huissiers d'un tiers de leur gain pénible et mo
dique? Les inférieurs, les huissiers, les boutiquiers,
les hôtelliers, les maîtres-de-poste, sont sans in
fluence; ils sont la matière laillable et corvéable
du pays.
Aux boutiquiers les hauts loyers et les fortes
contributions. Qu'ont obtenu les hôtelliers qui
payent sur les portes et fenêtres, sur leurs che
minées et leur mobilier, comme si leurs vastes éta
blissements étaient leur usage persouDel Qu'ont
obtenu les maitres de poste dont le chemin de fer
a mis néant les profits, et qui restent chargés de
l'entretien obligatoire d'un nombre déterminé de
chevaux oisifs l'écurie? Une chose est venue ras
surer un peu les petites fortunes, les négociants et
les rentiers, c'est que l'impôt sur les successions eu
ligue directe a été provisoirement écarté, de même
que le serment, qui menaçaient la fois la con
science et le crédit des familles honnêtes. Mais ce
n'est pas au libéralisme qu'il faut en rendre grâces.
C'est le libéralisme qui voulait ces mesures odieuses,
et qui les proposait; et c'est malgré lui qu'elles ont
échoué, du moios jusqu'à présent, sauf retour.
Chose singulière, et qui met ou le degré de
franchise ainsi que le savoir faire des libéralistes
ils voulaient de l'autorité religieuse du serment
pour faire produire davantage l'impôt destiné
payer les pensions et les traitements, et ils ne veu
lent pas de l'autorité religieuse dans Téducatioa
destinée former un jour les consommateurs du
budget. Tactiquede cupidité d'un coté, dérision
véritable de l'autre.
Dans la situation présente du pays, quoiqu'en
pense M. Rogier, nous soutenons que lorsqu'il s'agit
d'accumuler de nouvelles impositions sur la for
tune et l'activité publiques, on a le droit et le de
voir d'y porter la plus grande attention. La mesure
est une fois comblée, le niveau du possible est une
fois atteint, et nous devons en être bien près,
puisque le ministère a cru devoir débuter par deux
emprunts forcés,et que la légère augmentation pro
posée la contribution foncière, basée sur l'accrois
sement des propriétés bâties, a du être rejetée.
Recourir l'emprunt forcé, c'est bien avouer qu'on
désespère de l'impôt; rejeter une très légère aug
mentation de l'ensemble qui d'aurait pas modifié
d'une manière sensible la cote de chacun, c'est
bien dire qu'on est dans l'impuissance de frapper
le contribuable plus fort. Et en effet, quand on con
sidère les fléaux qui ont atteint toutes les industries,
la cherté des vivres, la maladie des pommes de
terre, la crise commerciale qui a précédé la révo
lution de Février, les ravages du paupérisme, les
épidémies, les secousses que la révolution de Fé
vrier est venue porter au commerce, les souffrances
de l'industrie des toiles et des dentelles, le manque
de travail, le rabais qu'entraîne la concurrence
étrangère et intérieure, est-ce le moment d'ouvrir
deux battants d'une main de Sainson les portes
de Gaza, afin de livrer passage un courant de
dépenses nouvelles, un sirocco qui desséchera
jusqu'au fond des poches. L'organisation de l'en
seignement, telle que l'enteud le minisière, sub
jugué et aveuglé qu'il est par des séides qui ne
viseut en tout qu'à la domination de leur parti, ne
tend rien moins. L'introduction de ce système
doublerait dès l'abord la gêne et l'état tendu de
ce malheureux budget qu'ou avait promis de sou
lager. Mais une fois la tempête des élections pas
sée, que sont pour le libéralisme des promesses
de programme? A cet égard et bien d'autres, le
libéralisme belge se montre d'une très proche pa
renté avec le libéralisme plus avancé qui vient de
triompher Paris. Même volubilité de promesses,
mêmes cajoleries pour le peuple, même profession
de principes,même peur affectée des jésuites, mêmes
déceptions l'aide de cette fautasmagoiie. La re
ligion et ses ministres ne flattent pas, u'éblouissent
point d'idées creuses l'esprit de parti ue peut donc
tourner ses sympathies de ce coté.
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