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JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N<> 3386.
Mercredi. 13 Mars 1850.
33me année.
REVUE POLITIQUE.
LES COLLÈGES DÏPRES.
ALDOYRAIDUS JIAGNUS.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Place, el chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIT DE LMROWKYIHT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fi 3 5o. Uu n° a5.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (insertions 19 centimes la ligne).
7P3.3S, 13 Mars.
Le Lloyd de Vienne dit que le projet de Consti
tution bavaroise accorde aux États allemands le
droit de former des confédérations restreintes dans
la confédération générale et que ce projet loin
d'être hostile au système prussien est au contraire
fait dans un esprit tendant rendre possible et
même vraisemblable l'accession de la Prusse.
Le gouvernement espagnol a obtenu de plusieurs
capitaliste de Madrid les 3o millions, qui doivent
être cdftsScrés aux travaux de défense de Cuba.
Cet emprunt a été conclu, dit-on, a raison de g
p. c. d'intérêt; deux millions et demi seront paya
bles pendant l'année i85i.
Les fonds ont eucore baissé, le 3 p c. a été fait
28 1 j±.
Les nouvelles particulières de Grèce confirment
la continuation du blocus, M. Wyse el l'amiral
Parker ne font que redoubler de rigueurs'a l'égard
du gouvernement hellénique. On assure même
qu'ils s'efforcent visiblement de provoquer de nou
velles complications. Le cabinet'de St-James, on
le voit, n'avait accepté la médiation de la France
dans la question grecque, qu'avec des restrictions
qui rendent cette médiation tout b fait illusoire.
L'affaire de Schleswig paraît se compliquer. On
annonce que les hostilités sont b la veille de re
commencer. Cette nouvelle mérite confirmation.
En Bosnie, l'insurrection prend de l'extension.
Les révoltés de la Croatie turque se sont emparés
du fort de Bihac.
Le traité de Constitution de Munich a été ra
tifié par la Bavière et le Wurtemberg; la ratifica
tion de la Saxe ne se fera pas attendre.
La prochaine réunion du Parlement d'Erfurt
occupe beaucoup les esprits en Allemagne. On se
demande ce qu'il sortira d'une Assemblée composée
d'éléments dont la conformité des vues est bien
moins que certaine.
On disait le 10 b Paris que les rouges avaient
pensé b faire une grande manifestation b la'place
de la Bastile, mais que la crainte de compromettre
le résultat des élections déjà très-douteux pour
eux et plus encore l'appréhension de se voir
réprimés par la force publique, les ont fait renoncer
b ce projet.
Le Napoléon qui a paru le 10 recommande très-
chaudement les (rois candidats du parti modéré
aux électeurs de Paris. Il dit qu'ils vont voter
pour ou contre la société, pour le drapeau tricolore
ou le drapeau rouge.
Lg Progrès habitué b calomnier sans pudeur
l'enseignement qui se donne dans les établissements
dont l'influence religieuse n'est point bannie, n'ose
pourtant pas uier que les langues anciennes ne
soient dans les collèges ecclésiastiques l'objet d'une
étude plus approfondie que dans les institutions
purement libérales, c'est b dire destituées du con
cours du clergé. Mais il soutient l'inféiiorité des
maisons catholiques d'éducation, et notamment de
notre ^lustitut de S' Vincent de Paul, en trois
branches: les mathématiquesl'histoire et la géo
graphie.
Si cette infériorité relative du collège épiscopal
était réelle, encore faudrait-il, admirer te dé
vouement des habitants d'Ypres, qui par des sa
crifices pénibles, oui su, pour la conservation de la
foi et des mccurs, soutenir de si près la balance
avec des ressources privées, contre le formidable
acharnement de l'autorité communale n'épar-
gnaut aucune peine pour détruire cette précieuse
glorieuse fondation.
Tandis que la Régence dotait l'ancien collège
hollandais de quinze a seize mille francs de sub
sides, elle accordait a contre cœur trois mille francs
a S1 Vincent.
Plus tard, ce subside fut retiré.
Plus tard, le local fut retiré également, dans le
moment précis ou le personnel ne savait où se ré
fugier. Le personnel enseignant fut obligé de se
séparer des élèves. Deux maisons particulières
furent occupées. Le terrain était retiré sous les
pieds, l'expulsion était complète: le collège y
survécut. Les attaques de l'organe cynique de la
Régence n'ont point cessé, on n'a point reculé
devant les menaces, les basses manœuvres chez les
parents, et d'autres pratiques de supériorité très
réelle et très efficace. Néanmoins le collège sub
siste, et de temps a autre il a jeté des éclats de
splendeur.
Les défaites que le collège communal a es
suyées devant le jury devraient modérer sa joie
d'avoir fait passer sans distinction, comme le
Progrès le rappelle d'une façon assez piquante,
quelques élèves. Il y a de quoi pâmer de rire des
embarras que le confrère éprouve pour reprocher
b l'autre collège l'éèbec de l'an dernier. Après
Métanre, il faudrait pourtant se souvenir encore de
Trébie, Trasimène el Cannes, quand on se targue
surtout de connaitre la géographie et l'histoire.
Au jury de Bruges, le collège communal comp
tait un professeur, et précisément celui des ma
thématiques. Celui qui aurait pour un liard de
délicatesse et de savoir-vivre userait-il de cette
circonstance pour crier b l'infériorité de S' Vincent
dans cette branche, alors que cet établissement ue
comptait aucun professeur parmi les jurés?
Faisons plus de concession. Si les succès acadé
miques se balancent sans que le collège catholique
ait joui d'un seul denier des ressources publiques,
c'est donc en pure perte et uuiquement pour cha
griner les habitants, pour les accabler d'impôts,
pour opprimer, que la Régence a jeté tant d'argent
inutilement par les fenêtres? Ou si ces bienfaits
eussent été répandus b titre égal sur l'institution
S' Vincent, que n'eut-on pu en atteudre? Avec
VI.
RETOUR A GAND.
{Suite.)
Antonius ne tarda pas b se passionner pour l'art
de son tuteur et se mit b travailler avec une ardeur
telle que le bon Meinlinck se vit plus d'une fois
obligé de tempérer une activité nuisible b la santé
du jeune homme. Sans compter ses travaux d'ate
lier, Antonius consacrait chaque jour quatre heures
a des études de chimie, nécessaires alors pour ob
tenir, dans la fabrication des couleurs el dans leurs
moyens d'application, des perfectionnements de
venus indispensables par les découvertes des frères
Van Eyck, découvertes dont ces derniers ne révé
laient les mystères b personne. Meinlinck était de
moitié dans toutes les expériences du jeune homme
et eut sa part dans la découverte des compositions
admirables qui contribuèrent b la confection des
couleurs d'Aldovrandtsi fameuses par leur éclat
et par leur durée. Enfin, Meinlinck reconnut assez
de talent et de supériorité a son élève pour lui
permettre de livrer ses tableaux au public. Ils quit
tèrent donc tous les quatre le village de Damme,
dout ils n'étaient point sortis depuis huit ans, et
se rendirent h Gand, où ils arrivèrent le x4 février
j5oo. Meinlinck loua une maison, la garnit de ses
tableaux et de ceux d'Aldovrandt, qui, suivant
l'usage de l'époque, latinisa son nom et signa ses
œuvres Antonius Aldovrandus.
Tandis que les deux artistes s'occupaient de ces
soins, Adrien se promenait dans les rues, s'arrêtait
devant chaque édifice remarquable et faisait tant de
stations qu'il finit par ne plus retrouver son che
min et par se perdre complètement. Timide et
craintif, il n'osa d'abord s'adresser b personne pour
demander sa route, et quand même il eût pu pren
dre sur lui de tenter un tel acte de courage, cela
ne lui eut guère servi, car il avait oublié, en sortant,
de s'enquérir du nom de la rue où se trouvait la
maison nouvellement louée par Memlinck. Il mar
chait donc et s'aventurait, se perdant de plus en
plus et l'estomac vide. Du reste, il se sentait beau
coup plus tourmenté de l'inquiétude où devaient
se trouver ses amis de ne point le voir revenir que
des souffrances que lui causaient le froid et la faim.
Tandis qu'il marchait au hasard et qu'il se perdait
de plus belle, il entendit sonner successivement
toutes les heures du soir jusqu'à la neuvième. En
ce moment, les cloches de chacun des édifices pu
blics et religieux sonnèrent le couvre-feu. Alors
une sueur froide coula le long de son visage, et il
se mit b marcher avec précipitation vers une grande
lumière qu'il aperçut tout-b-coup au détour d'une
rue... Il se trouva au milieu d'une cour immense,
non loin du marché du Vendrediparmi des gens
d'armes, des varlets et des pages qui s'agitaient
dans la plus grande confusion. Dès qu'on vit pa
raître Adrien en costume ecclésiastique, on jeta de
toutes parts des cris de joie.
Le voici le voici 1 Dieu nous l'envoie enfin
Et deux femmes accoururent, le prirent par la
main, lui firent monter un escalier, l'entraînèrent
parmi plusieurs corridors obscurs et l'amenèrent
dans un petit cabinet étroit, incommode, où se
trouvait une dame vêtue de magnifiques habits et
nn enfant qui venait de naître. Près de la dame,
qui paraissait mourante, uu jeune seigneur d'uDe
beauté remarquable se tenait agenouillé et pleurait
en lui tenant les mains
Oh! Jane, Jane! disait-il, si tu avais suivi
mes conseils, tu ne serais point ici sans aide et sans
secours
Un prêtre, un prêtre, je me meurs! mur
murait la jeune femme.
Adrien, b un signe du jeune seigneur, se pencha
vers elle. Quand elle le vit, son visage s'anima
C'est Dieu qui vous envoie pour me sauver,
dit-elle, écoutez ma confession et donuez-moi