JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
7??.3S, 5 Avril.
Un rassemblement de 4 on 500 ouvriers
belges renvoyés de France s'est présenté
lundi la frontière de Rousbrugghe, pai
siblement et sans armes, demandant ren
trer dans leurs foyers. On a dirigé quelques
forces de ce coté, et l'administration a pris
des mesures pour concilier les égards dûs
des compatriotes malheureux avec les
précautions que commande le soin de la
sécurité générale.
Hier tous les jeunes gens qui fréquentent
l'Athénée de Tournay, ont quitté cet éta
blissement. 11 paraît qu'un des professeurs
est la cause de ce départ. Un jeune homme
se plaignait ce professeur de ce qu'on lui
avait pris deux pièces de 5 fr. Le professeur
répondit que c'était probablement un élève
de réthorique qui l'avait fait par farce. Un
jeune garçon faisant partie d'une autre
classe était présent, lorsque le professeur
disait cela, et de suite le raconta aux rhé-
toriciens. Ceux-ci se présentèrent aussitôt
en masse ce professeur, lui demandant
satisfaction, avec menace de quitter l'éta
blissement s'il ne leur était pas rendu jus
tice, n'ayant reçu aucune explication sa
tisfaisante, ils ont ouvert les portes et sont
partis de suite. Les autres élèves entraînés
par cet exemple, se sont aussi débandés.
Hier le général-major Fleury-Duray, a
distribué sur la Grand'place Tournay,
aux Officiers et Soldats qui se sont distin
gués par leur courage, dans l'affaire de
Mouscron, la décoration de Léopold. Toute
la garnison était présente sous les armes
cette cérémonie glorieuse. La troupe a dé
filé devant les décorés, aux cris six fois ré
pétés de Vive le Roi, vivent les Belges. Une
énergie patriotique et martiale animait
tous les assistants. Si de nouvelles bandes
se forment elles feront bien de ne point
risquer leur attaque dans les environs de
Tournay. Toute la population se lèverait
en masse. Fusils de chasse, fourches, taulx,
bâtons, instruments agricoles, tout devien
drait arme sous la main du peuple irrité
des villes et des campagnes.
\o 3183.
31me année
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur rue
de Lille, io, Ypres. Le Propa
gateur parait le SAMEDI et le
MERCREDI de chaque semaine.
PRIX DES IXSERTIOXS.
1 1 centimes par ligue. Les ré
clames, *4 centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On a'abonne a prèsrue de
Lille, n» 10, prés la Grand'place, et
cheï les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE I.'AROXXKMEXT,
par trimestre,
Ponr Ypres fr. 4—OO
Pour les sutres localités a 4 40
Prix d'un numéro.
Nous compléterons les récit des événements de
Mouscron par l'extrait suivant du rapport du gé
néral Fleury-Duray.
Il me reste un devoir bien doux remplir,
Monsieur le minisire, c'est de vous signaler ceux
qui se sont distingués d'une manière éclatante
dans ce combat; je dis d'une manière éclatante,
car tout le monde a fait son devoir, mais quelques
y> officiers l'ont fait de manière a mériter toute la
bienveillance du Roi; Ces officiers sont: MM.
Sineets et Dubois, capitaines au 5° régiment de
ligne, et MM. Couclet et Ftaipont lieutenants
au 2" chasseurs cheval.
Ces deux derniers ont porté, a plusieurs repri-
ses, mes ordres au milieu de la ligne des tirail-
leurs pour empêcher ceux-ci de se laisser en-
traîner par leur ardeur et de dépasser les limites
de notre territoire. Ils se sont présentés chaque
fois d'eux-mêmes pour faire ce service, qui of-
frait le plus grand danger, au milieu des balles
qui étaient surtout dirigées sur les chefs.
Le capitaine Dubois a fait preuve d'une
grande intrépité dans le commandement de sa
troupe; son schako a été traversé par une balle;
mais c'est an capitaine Smeetssurtout que revient
le principal honneur de la journée. Appelé h
commander une colonne de i5o hommes, il les
a conduits au feu avec une intrépidité admirable.
Animât le soldat du geste et de la voixon le
voyait et on l'entendait sur toute la ligne des
tirailleurs; il encourageait ses soldats, les di-
rigeait, malgré une blessure qu'il avait reçue
dès le second coup de feu tiré par l'ennemi, mais
dont il n'a parlé personne avant la fin du com-
bat. C'est alors seulement qu'il s'est fait arracher
la balle qui lui avait traversé les deux cuisses,
de part en part, dans les parties charnues.
Cet officier, déjà signalé par la manière dis—
tinguée dont il sert habituellement, est un homme
de guerre comme il s'en rencontre peu; aussi,
Monsieur le ministre jamais bataillon ne pourrait
avoir un plus digne chef.
Je me plais signaler également le capitaine
d'artillerie Klezkowski pour le sangfroid remar-
quable dont il a fait preuve pendant le combat.
M. le major Neuens, faisant les fonctions de chef
d'élat-raajor près de moiin'a été d'une grande
utilité par son activité, son énergie, et la rec-
titude de son jugement.
Demain, Monsieur le ministre, je pourrai vous
signaler quelques sous-officiers et soldats qui se
sont plus spécialement distingués.
Nous avons a déplorer la mort d'un sergent
du 5° régiment de ligne; le capitaine Smeets, un
caporal et quatre soldats ont été blessés.
L'ennemi, d'après les renseignements de Lille et
de Tourcoing, aurait eu vingt-neuf morts et une
cinquantaine de blessés. On assure que plusieurs
de ces derniers sont morts h l'hôpital de Tourcoing,
où on les avait transportés.
On lit dans l'Organe des Flandres
Les attroupements se sont encore renouvelés
hier vendredi) h Gand; mais nous avons bâte de
le dire, la police a agi plus énergiquement qu'elle
ne l'avait fait jusqu'ici. C'est encore a la place
d'Armes que les rassemblements se sont formés, et
vers huit heures, ils se sont dirigés du côté du
Marché aux Oiseaux, en criant: Five la Répu
blique! Deux agents de police se sont jetés dans
un groupe et ont arrêté un individu que la foule,
nous dit-on, leur a repris.
Aussitôt les pompiers, précédés de commis
saires de police et de la gendarmerie cheval, sont
arrivés et ont dispersé les groupes. Quelques in
dividus ont été arrêtés aux environs du Théâtre
Minard et conduits au bureau de la permanence.
Des rassemblements s'étant reformés, les commis
saires de police ont ordonné a haute voix aux
agents et aux pompiers de faire usage de leurs
armes la moindre tentative qui serait opérée
pour délivrer les prisonniers. Cette attitude en a
imposé la foule qui peu 'a peu s'est dissipée.
On nous écrit de Gand, samedi soir 10 heures
Un bien triste accident est venu signaler la
soirée. Un individu qui était sur la place de la
Station,et criait Vive la Républiquea été arrêté
par un agent de police. Celui-ci demanda six
hommes au poste de la station pour conduire le
prisonnier la permanence. Arrivés dans la rue
Digue de Brabant, les soldats furent attaqués par
une foule assez nombreuse qui les assaillit a coups
de pierres. Ainsi entourés et ne sachant comment se
défendre, les soldats se retournèrent et firent feu.
Un homme a été tué, et deux autres blessés, doi.t
l'un assez grièvement.
Une correspondance particulière de Lille, adres
sée au Précurseur d'Anvers, contient les détails
suivant sur l'échauffourée de Risquons-Tout
Depuis dimanche des bandes étaient Seclin,
attendant le moment pour entrer en Belgique.
Mardi dans l'après-midi on faisait les prépa
ratifs, ils étaient daBS l'enthousiasme.
Mardi soir, a 5 heures, je savais qu'on embal
lait des fusils, et des cartouches, qui devaient la
nuit sortir de la citadelle et prendre la roule de la
frontière, sous le fallacieux prétexte d'armer les
commuues; je savais que ces armes, ces munitions
devaient être pillées, ou qu'on tendrait qu'elles
l'avaient été; mais on ne s'est guère gêné; i,5oo
fusils et 3o cartouches par individu ont été bien
tranquillement distribués, et bientôt après, com
mençait l'attaque dont j'ai parlé plus haut.