JOURNAL D'ÏPRES ET DE ARRONDISSEMENT.
No 2708.
Samedi, 16 Septembre, 1843.
27me année.
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clames, tS centimes la ligne.
vérité et justice.
7PR3S, 16 Septembre.
LES COUVENTS D'ARGOVIE ET LE
LIBÉRALISME.
La confédération Suisse est composée de 22 can
tons les uns catholiques et les autres protestants,
unis par un pacte solennellement juré, qui déter
mine les devoirs réciproques des cantons et de la
confédérationet des cantons entr'eux. Comme il
y a plusieurs cantons dont la population est mixte,
le pacte fédéral a garanti toutes les croyances la
pleine liberté de leur culteet la conservation de
tous leurs biens il a voulu empêcher que la majo
rité catholique d'un canton, n'opprimât la minorité
protestante, ou que la majorité protestante n'op
primât la minorité catholique. Cette disposition
était essentielle sons le régime démocratique ou
chacun vote pour soi, sans qu'un pouvoir placé
audessus des partis puisse tempérer ce que la
passion ou l'aveuglement populaire pourraient ap
porter d'injustice dans l'expression du vœu de la
majorité
L'article 12 du pacte fédérai garantit en parti
culier aux catholiques, la possession libre et perpé
tuelle des monastères, couvents, fondations qu'ils
possèdent. Ces possessions leur étaient garanties
par la foi publique de tous les cantons, par les
serments solennels de la confédération entière.
Mais les libéraux suisses, qui ressemblent aux
libéraux de tous les pays du. monde, se sont
efforcés depuis longtemps rendre cet article illu
soire et a dépouiller les anciens abbayes, au profit
des gouvernementscantonnaux et des administra
teurs laïcs, qui étaient chargés de la bonne admi
nistration des bieDS ecclésiastiques.C'est ainsi que
fut dépouillée la fameuse abbaye de St-Gall, une
des plus anciennes et des plus célèbres d'Europe,
qui avait échappé aux bâches françaises, grâce aux
montagnes qui l'entourent. C'est ainsi que d'autres
fondations catholiques sont devenues la proie d'une
rapacité barbare.
Le canton d'Argovie, dont un tiers environ de la
population est catholique, a voulu suivre des
exemples aussi édifiants. Le gouvernement étant
choisi par la majoritéqui est protestante, exerce
depuis longues années une tyrannie démocratique,
mille fois plus oppressive que la tyrannie despoti
que, sur le tiers de la population catholique soumise
son autorité, et ne cherche qu'à l'exploiter avec
une partialité criante, en faveur des deux tiers pro
testants. 11 serait trop long de signaler tous les
traits odieux de cette tyrannie légale, qui constitue
les catholiques d'Argovie, dans une espèce d'es
clavage au sein de leur propre patrie. Qu'il suffisse
de dire qu'une faible partie de la population catho
lique ayant vu sanctionner pour dix ausla tyrannie
qui pesait si cruellement sur elle, manifesta l'in
tention de résister a la force par la force, et de
protester ainsi contre les vexations dont elle était
l'objet. Quelque peu nombreux que fut ce parti
convaincu de la justice de sa cause, il inspira une
grande terreur au gouvernement d'Argovie, qui
implora le secours du canton de Berue aussi tyran-
nique et aussi libéral que lui l'égard des calholi-
ques, et au moyen de ces troupes, il parvint h
désarmer quelques centaioes de paysans, qui de
mandaient seulement a être traités comme tous les
autres habitants du canton. Le gouvernement vain
queur déploya toute la générosité dont un cœur
vraiment libéral est susceptible. Il accabla la po
pulation catholique toute entière de logements
militaires et de réquisitions il la désarma, et pour
qu'on ne put douter du vrai mobile de ses actes, il
supprima le lendemain de sa victoire tous les
couvents et monastèresqui existaient dans le
cantonet cela en dépit des protestations des
catholiques, et du pacte fédéral, qui garantissait
ces propriétés sans réserve aux populations qui les
possédaient.
Les religieux de ces monastères ont prouvé
juridiquement qu'ils étaient restés étrangers a la
sédition, qui avait servi de prétexte k leur expul
sion mais cette justification ne fit point reculer les
intrépides libéraux d'Argovie; que leur importait
en effet l'innocence de ces religieux La sédition
avait eu lieu dans un seul petit district, et ils frap
paient tous les couvents k la fois; les religieux
pouvaient être soupçonnés de coopération, mais
les religieuses n'avaient point porté le fusil, ni
commandé aux rebelles!!! Or les quatre couvents
de femmes qui existaient dans le canton avaient
été supprimés avec les abbayes d'hommes, afin
que personne ne pat douter de l'intention bien
arrêtée du gouvernement d'opprimer les catholi
ques; s'il avait voulu pourvoir seulement k la
sûreté du pays, il n'eut jamais touché aux institu
tions de femmes, qui ne pouvaient en aucune
manière la compromettre.
Des agents du gouvernement se rendirent aux
monastèresse firent livrer tout ce qu'ils possé
daient et en chassèrent honnêtement les religieux.
L'affaire fut portée a la diète fédérale, par les
catholiques, qui obtinrent l'appui des petits can
tons catholiques, et du canton de Neuchatel, qui
est protestant mais conservateur. Bas le ville ap
puya par les mêmes motifs qire Neuchatel, les
réclamations des catholiques. Mais les caDtons de
Soleure et du Valais dont la population est catho
lique, firent défaut, parceque l'impartial libéra
lisme est parvenu k y maintenir par l'artifice et la
violence ouverte, une domination qu'il a perdu k
Lucerne et ailleurs.
La disposition du pacte fédéral était manifeste,
et sa violation ne pouvait être révoquée en doute
aussi les cantons où le radicalisme domine osèrent-
ils k peine la première année excuser et atténuer
la conduite d'Argovie; l'indignation publique était
grande en Suisse on jugea k propos de temporiser;
il fut statué, que les biens des couvents ne seraient
pas liquidés avant une décision définitive de la
diète Néanmoins Argovie en aliéna plusieurs
parties. Pendant les années i84o, 1841 et i842,
malgré toute la sympbatie qu'excitait la conduite
libérale d'Argovie dans le cœur des libéraux suisses,
il fut impossible d'obtenir la sanction d'une spo
liation contraire au pacte fédéral; mais la crainte
de fortifier les catholiques empêcha en même temps
les libéraux et les protestants de condamner Argo
vie. Ce canton voyant qu'il ne pouvait vaincre la
répugnance de la diète k consacrer cette violation
d'une loi fondamentale, chercha des biais, et offrit
successivement de rétablir, 2,3 et enfin 4 couvents
de femmes, k condition que cette affaire serait
considérée comme terminée.
Cet offre réservait au gouvernement les abbayes
d'hommes, les plus riches en biens fonds, en livres
et objets d'art; (celle de Mûri comptait plus de huit
siècles d'existence; et plus d'un million en biens
fonds), il parvint k fléchir les cantons vacillants
une seule voix manquait k la majorité pour ap
prouver définitivement la spoliation des catholi
ques, et cette voix fut enfin donnée cette année
par le député de St-Gall,,fqui viola k cet effet le
mandat formel qu'il avait reçu de son canton
contrairement aux usages et aux lois les plus
sacrées du pays.
Ainsi le vol public de quatre riches abbayes fut
sanctionné par la diète de cette aDnée, k la majo
rité rigoureuse des voix. L'infidélité du député de
St-Gall est traitée de félonie et de trahison par
tous les hommes modérés de la Suisse; et l'acte de
la diète est considéré comme une violation mani
feste du pacte fédéral.
Les catholiques qui ont réclamé l'observation
fidèle de ce pacte, et repoussé les transactions qui
tendaient k voiler la violation réelle qu'Argovie
désirait, auront k s'aviser pour trouver une garan
tie plus sure, que la foi jurée des cantons, et les
lois fondamentales de la confédération, qui peut
être rompue pour des siècles; si la guerre civile
éclate, si les dissentions intestines déchirent la
Suisse, on se souviendra toujours, que le vol de
quatre riches abbayes exécuté par un libéralisme
mépris des loi£ les-plus sacrées, en
qière cause.
|de faits était nécessaire pour com-
ûrance et Ltméchanceté d'un journal
le, qui approuve la conduite des