Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement.
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Un fi n
Dimanche, 50 Octobre 1904.
64e année. M* 44
l'union fait la force.
i0arai*ttfnil ie Dimanche
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Toute personne k'h-
boniifviit pour* UN AN
recevra, dès présent
jusqu'au ,'îl I )écembre
prochain, titre gra
cieux, le Progrès
La montagne a accouché.
La paille et la poutre.
La loi tle 1X79.
Un faiseur de miracles.
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Le Journal d'Ypres revendique
pour lui, avec une naïve indignation,
les avantages précieux de la liberté de
penser,et s'octroye, après d'énergiques
protestations contre toute tyrannie
dans 1e domaine de la conscience, le
monopole exclusif de l'ignorance
Nous convenons aisément que celui-ci
défie toute concurrence et nous ne
songerons jamais contester ses droits.
Usant des prérogatives que lui procure
une situation qui lui paraît aussi avan
tageuse, il nous défend ayee acariâtre-
té de discuter les arguments que son
omnipotente inconscience nous a four
nis, en réponse notre désir de voir
exposer par lui la signification du Vrai
dont les théories contraires auraient
provoqué la Commune de 1871 et la
Révolution de 1796. Le Journal
n'avait pas obtempéré ce désir, et
nous nous étions permis de lui repro
cher la désinvolture, peu scrupuleuse,
avec laquelle il s'était lancé dans uue
foule de considérations étrangères au
sujet traiter.
Nous saisissons ici sans peine l'utilité
des mobiles qui l'ont poussé lancer
cet édifiant appel en faveur de la libre
manifestation de la pensée. Il n'est
que trop vrai que l'amour de la liberté
a aussi son hypocrisie et son culte, 3es
cafards et ses cagots.
Sans vouloir s'attarder discuter
la rigueur peu scientifique du moyen
auquel le Journal a recours, de dé
finir un objet par son contraire, nous
aimons cependant de soumettre i'ap-
préciation de nos lecteurs les défini
tions du contraire du Vrai fournies par
notre confrère et leur application aux
questions historiques qui nous intéres
sent.
Le Vrai, en juger d'après sa prose,
c'est l'Amour; puis il noiiB dit qu'a
vaut de professer le Vrai, il faut cesser
de mentir, donc il faut dire la vérité
D'où lions concluons que le Vrai, c'est
la Vérité.
Nous omettrons de considérer des
définitions de ce dernier calibre.
Le Journal voudrait-il nous ex
pliquer en quoi les théories qui ont
provoqué la Révolution de 1796 et la
Commune de 1871 sont contraires
l'Amour ISons lui en serions très re
connaissants mais s'il entre dans ses
intentions de recourir de nouveau ce
moyen très expéditif mais peu coura
geux de déblayer ce que nous lui de
mandons, nous considérons la polémi
que comme terminée, en plaignant
notre confrère d'avoir brûlé son tem
ple d'Ephèse avant d'avoir su le con
struire.
Le Journal d'Ypres relève, daus le
discours que M. Deschanel a prononcé
la Chambre frauçaise, la phrase sui
vante Aujourd'hui un fonctionnai-
re pour être bien vu est obligé de ne
pas remplir ses devoirs religieux
et n tre coufrère de s'écrier Cette
phrase lapidaire précise le joli régi-
me imposé la France par ce mims-
tère Combiste et que les Combes bel-
ges rêvent d'établir en Belgique.
Il est vrai que M. Deschanel a com
mencé par déclarer que sous l.t ILstau-
ration les fouctionnau8s étaient obligés
de remplir leurs devoirs religieux,
.dais notre confrère passe ce passage
sous silence et pour cause.
Le Journal d'Ypres, défendeur attitré
de la politique gouvernementale belge,
est vraiment bien placé pour laDcer l'a-
natbème au gouveruement de M. Com
bes Oublie-t-il donc que, depuis 1884,
nous vivons en Belgique sous uu régi
me analogue celui qui sévissait sous
la Restauration Ignore-t-il que notre
gouvernement clérical n'a de faveurs
que pour ceux, qui sincèrement ou hy
pocritement, font leur soumission l'é
glise catholique, apostolique et romai
ne
Ah vraiment, il nous fait rire
Comme on la rencontre souvent cette
histoire de la paille et la poutre
Quoi qu'il en soit, si le régime fran
çais est tel que le dépeint M Descha
nel, il ne saurait, pas plus que celui
que nous subissons actuellement en
Belgique, être celui que nous souhai
tons, c'est-à-dire le régime d un gou
vernement libéral.
L'Avenir du Tournaisis affirme qu'au
cune loi ne fut plus soucieuse (le sauve
garder la liberté de conscience et la foi
religieuse que la loi de 1879
Mais voilà Le clergé catholique refusa de
venir donner le cours de religion l'école pu
blique, parce qu'il ne pouvait plus y entrer en
maître et soumettre l'enseignement tout entier
ses règles et ses caprices.
On demandait un jour un prélat, fameux
par ses ardeurs politiques et qui pariait tou
jours de liberté, ce qu'il entendait par là. La
liberté, répondit-il, c'est quand nous sommes
les maîtres, Quand on veut appliquer ces
gaillards-là le droit commun, quand 011 les in
vite observer, comme tous les autres citoyens,
la Constitution et les lois, ils crient comme des
oies qu'on égorge et se trouvent, parait-il,
dans line heure d'angoisse et d'indignation
Pour noue clergé, une loi qui lui donne toute
facilité pour exercer son ministère, mais qui
lui enlève en môme temps toute suprématie in
justifiée, est une loi de malheur
Le recul du temps met peu peu les choses
leur place. Les cléricaux sont bien mal inspi
rés en venant aujourd'hui essayer de glorifier
leur abominable guerre scolaire de 1819. Car,
aux yeux des générations actuelles, de tels sou
venirs De serviront qu a mettre en relief la soif
inextinguible de domination qui caractérise
l'Eglise romaine et sa prétention outrecuidante
de se mettre au-dessus des constitutions et des
lots.
Dimanche, l'Association cléricale de
Bruxelles a donné une fête ses Jeunes
Gardes.
Entr'autres discours, M. le sénateur
Braun y a dit des choses étonnantes,
stupéfiantes, renversantes.
Nous citons le compte-rendu publié
par uue feuille ultramontaine bruxel
loise
M. Braun, sénateur, fait le tableau des
persécutions dont nous serions victimes si
nos adversaires revenaient au pouvoir
non seulement nos croyances et notre ensei
gnement seraient en péril, mais aussi toutes
les libertés inscrites au pied de la colonne
du Congrès.
Feut on en croire ses yeux
C'est nous, libéraux, qui on refuse,
sous différents prétextes, le bénéfice de
la liberté de conscience et de l'égalité
des citoyens devaut la Constitution et
devant la loi. c'est nous qui sommes
les persécuteurs, les oppresseurs
C'est nous qui exigeons des catholi
ques de* formalités administrative- 't
des petits papiers pour leur accorder ia
liberté de conscience dan3 les écoles
C'est nous qui refusons des statues
aux grands hommes du cléricalisme
(■'est notiB qui faisons déserter et qui
fermons les écoles cléricales
C'est noii.s qui accaparons les places
et qui excluons les catholiques des
emplois publics
C'est nous, enfin, car il faut limiter
l'énumération, qui faisons enseigner
dans les écoles privées et même dans
les établissements officiels, que les
libertés constitutionnelles sont des er
reurs, des licences, des sources de dés
ordre et de vices
L'abbé Bataille et Mgr Rutten lui-
même ne sont que des francs-maçons
déguisés
M Braun est un grand thaumaturge;
il renouvelle en politique le miracle de
la transubstantiation.
Les persécutés deviennent des per
sécuteurs, les spoliés des accapareurs,
les libéraux des cléricaux et les cléri
caux des libéraux
M Braun sera canonisé... si le ridi
cule ne tue pas dans son parti.
Après deux années de questions vai
nes et de mises eu demeure inutiles,
nous sommes enfin parvenus obtenir
du Bien Publicpropos du repos do
minical, une manière de réponse.
Four avoir été rumiuée pendant deux
ans, la riposte du Bien Public n'est pas
forte, et, pour la trouver, ce n'était pas
vraiment la peine de thésauriser mot
par mot quelques bouts de sophismes,
ni de les serrer en avare pendant vingt-
quatre mois dans le vieux bas de laine
où notre confrère garde ses économies
de dialecticien
Nous avons, dès le jour où les cléri
caux lancèrent la fameuse distinction
entre travailler et faire travailler, po
sé la question en ces termes
Du moment que la loi défend aux patrons
d'employer leurs ouvriers le Dimanche, la
loi empêche ca* ouvriers de travailler le Di
manche pour leur patron. Donc ede les obli
ge chômer le jour du Seigneur. Donc cette
loi est contraire l'article 15 de la C insti
tution.
Au lieu de répondre cet argument,
le Bien public éprouve le besoin de le
traduire en syllogisme.
Et voici comment le traducteur sa
cré, qui est un sacré traducteur, tra
vestit notre raisonnement
Le projet de loi interdit au patron de con
traindre son personnel travailler, aux
jours consacrés par l'usage pour le repos
hebdomadaire.
Or, l'article 15 de la Constitution dit que
nul ne peut être tenu d'observer les jours da
repos d'un culte.
Donc, le projet de loi est contraire l'ar
ticle 15.
Le Bien public a oublié de traduire
notre première phrase II ne veut pas
avouer que la loi proposée, en interdi
sant aux patrons d'employer ses ou
vriers le Dimanche, interdit par le fait
même aux ouvriers de travailler le Di
manche pour leur patron.
Ou comprend que le Bien public ait
laissé tomber, dans sa traduction, le
membre de phrase qui le gène Or, cet
te phrase touche précisément au nœud
du débat Elle prouve que la jésuitique
distinction entre travailler et faire tra
vailler ne répond pas la réalité des
choses. Interdire aux patrons de faire
travailler, c'est empêcher les ouvriers
de travailler. Cette simple remarque
ruine et réduit rieu toute 1 argu
mentation du Bien public.
Mais puisque notre confrère est pris
soudainement d'un si ardent amour
pour le syllogisme, nous donnerons
nous mêmes notre argument la forme
scholastique dont il a besoin d'être re
vêtu pour attirer l'attantiou des comtes
romains.
Nous raisonnerons donc de la maniè
re suivante
Le projet de loi de M. Helleputte, en
interdisant au patron d'employer ses
ouvriers le Dimanche, interdit aux ou
vriers de travailler le Dimanche pour
leur patron.
Or, l'article 15, en disant que nul ne
peut être contraint de concourir d'une
manière quelconque aux cérémonies
d'un culte, ni d'en observer les jours de
repos, reconnaît chacun le droit de
se livrer le Dimanche aux travaux de sa
profession.
Donc le projet de M. Helleputte est
iuconstitutionnel.
Si le Bien public veut s'exercer sur ce
syllogisme, nous contemplerons ses
exercices avec intérêt.
Mais qu'il ne détourne plus la mi
neure, ce qui est indigne de son écla
tante vertu
En attendant, nous voulons bien dis
cuter l'étrange raisonnement que le
Bienqmblic accroche notre syllogisme
tel qu'il l'a traduit.
La feuille gantoise écrit
L'article 15 n'a nullement pour objet de
garantir la liberté absolue du travail, mais
la liberté absolue des cultes ou, plus juste
ment, la liberté de ne professer aucun culte.
Son but est d'empêcher que personne puisse
être tenu de concourir un culte, soit en
prenant part aux cérémonies, soit en s'abste-
uant des œuvres serviles que ce culte inter
dit.
Voilà l'esprit de l'article 15.
Nous sommes d'accord.
Le projet de M Helleputte, en inter
disant au patron d'employer ses ou
vriers le Dimanche, leur interdit de
travailler le Dimanche pour leur pa-
trou. Donc, de l'aveu même du Bien
publicce projet est contraire l'esprit
de l'article 15, dont le but est d'em
pêcher que personne puisse être tenu
de concourir un culte soit en prenant
parc aux cérémonies, soit en s'abstenant
des œuvres serviles que ce culte interdit.
Le Bien public dit encore qu'aucune
société ouvrière ne demande la liberté
du travail dominical.
Il nous serait facile de rappeler pour
la vingtième fois le témoignage de MM.
Grenier et Doat, que le Bien public a
toujours passé sous silence. Nous pour
rions répondre aussi que les sociétés
ouvrières ne sont pas toute la classe
ouvrière. Mais nom n'entendons pas
que le débat dévie. La question n'est
pas de savoir ce que veulent les ou
vriers, mais de savoir ce que veut et
ne veut pas l'article 15 de la Constitu
tion. S'il vous paraît avoir fait son
temps, revisez-le. Mais aussi longtemps
qu'il n'est pas revisé, respectez-le.
C'était l'avis de Victor Jacobs.
En terminant, ie Bien public nous de
mande, d'un air triomphant, pourquoi
nous n'accussons pas l'Etat de violer
I article 15, puisque les fontionnaires
chôment généralement le Dimanche.
Nous avons répondu cent fois cette
s colle d'examinateur universitaire
L'Etat, soit lorsqu'il décide da ne pas
rendre la justice le Dimanche, soit
lorsqu'il décide de transporter le Di
manche des voyageurs et des colis, agit
dans les deux cas en qualité de patron,
et en vertu même de l'article 15.