AVIS IMPORTANT.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Dans le monde enseignant.
Les aboyeurs.
37e ANNÉE.
21 Novembre 1897
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
On traite forfait.
Le Progrès sera envoyé gra
tuitement jusqu'au premier Jan
vier prochain, aux personnes
qui s'abonneront, pour une an
née, dater de celte époque.
L'Interpellation sur Mechveret.
A la Chambre, le ministre de la justice, M.
Begerem, a interprète d une façon judaïque la
lot sur les étrangers en défendant M Ahmet
Riza de publier en Belgique le journal où, au
nom du parti Jeune Turc, il comptait défendre
la liberté.
M. Begerem, en réponse l'interpellation de
M. Denis, n'a pas manqué d'invoquer l'exemple
de la France, où l'on a interdit le Mechveret.
Mais outre que la France a quantité de sujets
mnsulmans, la liberté n'y a jamais été comprise
comme en Belgique.
Il y a encore une censure en France, et cette
censure a été jusquinterdire la Comédie
Française la représentation de Mahometun
beau et noble drame de M. Henri de Bornier.
L'ambassade ottomane avait fait savoir au
gouvernement qu'il lui serait désagréable de
voir figurer sur la scène le prophète de llslam,
et cela avait suffi.
Au nom de la Constitution belge, il fallait
laisser M. Ahmet Riza publier son journal,
quitte le poursuivre en cas de délit constaté
d'outrage un souverain étranger.
Cela seul était régulier et légal.
Certes, il serait arrivé M. Ahmet Riza de
rappeler le souvenir des 300,000 Arméniens
éventrés, torturés et mutilés, et cela aurait pu
être désagréable au Grand-Turc.
Mais depuis quand le gouvernement belge
prend-il, d'une façon aussi insolite et avec une
pusillanimité aussi écœurante, le parti des
bourreaux contre les victimes
Comment I voilà un publiciste de mœurs
irréprochables qui défend les droits d'un peu
ple opprimé et met sa plume au service de la
plus noble des causes, et c'est lui qu'on chasse,
c'est lui qu on met au ban de la liberté, c'est
sur lui que M. Begerem crie haro
La Chambre, en vérité, a présenté un singu
lier spectacle d un côte, les socialistes rappe
lant les massacres d'Arménie, maudissant les
tortionnaires de ces populations chrétiennes,
disant ses vérités au Sultan qui encourage de
telles horreurs, et, de l'autre, les catholiques
abandonnant la (Offense des victimes, livrant
le publiciste vengeur l'arbitraire ministériel
et témoignant, avec M. Begerem, de leur
respect pour le Grand Turc
Allez en Angleterre, M. Ahmet Biza. l'An
gleterre a plus de sujets musulmans que la
France, et elle a bien d'autres intérêts en Orient
que la petite Belgique, mais elle vous donnera
asile et vous permettra d'editer votre journal.
Cest que l'Angleterre est une nation fière,
pour qui la liberté n est pas un vain mot.
L'émotion produite dans le monde ensei
gnant par les recentes nominations, ne s'est pas
encore calmée.
On se demande vainement comment un mi
nistre ait pu congédier plusieurs inspecteurs,
dépassant legerement l'âge de 60 ans et en
nommer d'autres qui dans un mois auront
atteint l'âge pour être mis la pension.
Est-ce erreur ou calcul
On ne sait pas.
Puis il y a plusieurs nominations d'inspec
teurs n'ayant que 7 10 ans de service, tandis
que des agents 1res méritants comptant près de
20 années de service sont sacrifiés.
Est-ce là la justice que le gouvernement clé
rical fait regner dans le pays
Aussi un profond découragement s'est emparé
des meilleurs fonctionnaires.
L'esprit d'intolérance règne de plus en plus,
et ceux qui ne courbent pas la tète devant les
exigences du ministre Schollaert et qui ne peu
vent produire un certificat de bonne conduite,
émanant du cierge, ne peuvent plus compter
d obtenir jamais d avancement quelconque.
Au mois d'Août dernier, M. Vandenpeere-
boom a indiqué au Parlement cinq mesures
qu il comptait introduire dans le service des
postes. La première était la réduction cinq
centimes de la taxe des lettres transporter
dans le rayon postal.
Un projet de loi en ce sens va être déposé
prochainement par le ministre.
Les quatre autres mesures annoncées consis
tent dans l'augmentation du poids des lettres
dans l'institution d'une seconde distribution
quotidienne dans cinq cents communes dans
la création de nouveaux bureaux et relais, et
enfin dans l'acquisition par l Etal des bureaux
de postes établis dans des locaux loués.
Il ne me plaît pas de revenir par le menu
sur les détails de cette passionnante et mysté
rieuse affaire Dreyfus, qui émolionne en ce
moment le public et provoque dans la presse
deux courants diamétralement opposés, égale
ment passionnés faire triompher l'idée dé
fendue.
Ou Dreyfus est innocent, ou il est bien véri
tablement coupable. L'avenir, la révision
que je souhaite et qui s'imposede ce procès
tristement célèbre, pourront seuls démontrer
le bien fondé ou l'erreur de l'une ou de l'autre
de ces opinions.
Laissant de côté l'agitation qui se produit
en France et partant au sujet des dernières
nouvelles de cette affaire et des noms, de jour
en jour plus nombreux, que dévoile la presse,
je ne veux que protester contre le lâche achar
nement avec lequel on insulte cette misérable
épave d'homme, ce mort, qui git dans son Ile
maudite sous l'œil des chiourmes préposés sa
garde.
Que le capitaine Dreyfus ait forfait I hon
neur, qu'il ait trahi son pays, ou que rien de
cela ne soit vrai et qu'il soit victime de la plus
épouvantable erreur judiciaire, c'est ce que je
ne veux pas rechercher ou tenter d'établir pour
l'instant. Mais que chaque jour une presse
aboyeuse, une meute enragée de journalistes
parisiens obéissant un chauvinisme sottement
exagéré se donne pour mission d'insulter ce
forçat et de chercher entacher plus encore le
nom de celte malheureuse famille, croyant ser
vir ainsi l'opinion, voilà ce qui écœure, voilà
ce qui indigne, voilà ce qui n'est pas d'un hom
me.
Cette indignation je l'éprouvais depuis le dé
but de la campagne qui s'est ouverte elle s'est
augmentée en lisant ces lignes dans un journal
de Paris, Le Jour
La besogue infâme du syndical Dreyfus
aboutit un fiasco complet. Ce misérable traî
tre continue expier son crime et nous souhai
tons que là-bas sur son îlot maudit un gardien
ait le courage de lui tirer dessus et de le tuer,
pour qu'on n entende plus jamais parler de lui
ou des siens aujourd'hui ses complices.
L'aveuglement de la passion peut être dans
certains cas une excuse devient infâme et
reste sans pardon quand il va jusqu'à conseiller
le crime. Et quel crime I celui d'assassiner, un
prisonnier, un malheureux condamné, coupa
ble ou non, un forçat
Quelle immonde lâcheté
El d ailleurs, que vient faire en tout ceci le
nom du capitaine Dreyfus Ce n est plus sa per
sonnalité qui se trouve en jeu présent, c'est
celle d'autres officiers qui peuvent se défendre,
qui ne sont ni en prison ni l'Ile du Diable
Dreyfus est devenu le personnage de seconde
ligne, il attend que la lumière se fasse, et, quel
le qu'elle soit, le déporté n'a pas intervenir
en ceci, il n'existe plus et personne en tous cas
n'a le droit d'insulter un disparu. En attendant
qu'il ressucite, s'il le doit, Dreyfus est mort.
Qu'on n'ajoute pas aux larmes de sa femme
et de ses enfants, l'amertume horrible de voir
insulter son cadavre ou d'entendre des hom
mes conseiller aux gardiens qui le surveillent
de le trouer d'une balle de revolver.
Et pourtant cauchemar affreux pour ses
détracteurs posthumes s'il était innocent,
cet homme S'il allait quelque jour revenir de
là-bas et s'il allait, réhabilité, cracher au visa
ge de ceux qui s'acharnent aujourd'hui sur sa
lM° 93. Dimanche,
LE PROGRES
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lé restant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRES.
Ypres, le 20 Novembre 1897.
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