48e ANNÉE.
17 Juin 1888.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Résumé politique.
l\° 49. Dimanche,
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
VIRES ACQDIRIT El'NDO.
Tout nous confirme dans l'idée que nous
avons exprimée de l'importance de la crise
Berlin. Il demeure évident pour nous que la
retraite de M. Puttkamer n'est qu'un épisode
de cette crise. Le coup, porté, de haut, atteint
plus haut aussi qu'on ne le pensait d'abord. C'est
plus enfin qu'une lutte d'influence: c'est toute
une politique qui est en question, et la presse
officieuse doit se sentir, malgré sa position spé
ciale qui allège ses responsabilités, fort gênée
dans ses appréciations par la qualité des person
nages qu'il lui faut mettre en scène.
Elle n'en a pas moins été relativement très
hardie dans ses articles: on pouvait même sup
poser que l'origine de ces articles était telle
qu'elle laissait en dehors de la polémique sa
rédaction ordinaire. Du reste, tout ce qui est re
latif cette crise, fût-elle gouvernementale,
s'efface devant la désolante gravité des dernières
nouvelles que nous recevons de Berlin et des
derniers bulletins de la maladie de l'Empereur.
La Gazette générale de VA llemagne du Nord dit au
jourd'hui que,si douloureuse q ue soit cette pensée
on doit compter avec une catastrophe immi
nente. Les symptômes les plus graves se mani
festent, la respiration est difficile et laborieuse,
les forces diminuent vue d'oeil, et l'Empereur,
ce sont les termes propres de la dépêche, ne
prend plus qu'une part passive ce qui se passe
autour de lui.
Enfin, le docteur Mackensie a, dans une en
trevue avec M. de Bismarck, déclaré que la vie
de l'Empereur ne serait plus maintenant que
d'une courte durée. Le prince a félicité N. Mac
kensie de son dévouement et a ajouté que le
peuple payerait un jour la dette contractée
envers l'illustre médecin,
D'après les nouvelles les plus récentes, ce
qu'on redoutait est arrivé le cancer a atteint
1 oesophage, et la plaie ravage tous les tissus de
puis la glotte jusqu'aux poumons, ce qui rend
l'alimentation impossible, même avec les sondes.
On annonce que l'Empereur a donné hier soir
au prince impérial de nombreuses instructions.
Le Pape Léon XIII vient de faire auprès des
puissances une nouvelle démarche en vue de l'a
bolition de l'esclavage. Il leur recommande
surtout d'empêcher la formation des bandes
qui s'organisent encore pour pratiquer la traite
en Afrique.
On avait annoncé l'occupation, par le cosaque
libre Atchinoff, d'un port situé au sud de Zeyla.
Ajoutons, ce qui aidera peut-être faire com
prendre ce que doit être au juste la pensée de
cette occupation, que le point en question est
situé dans l'Océan Indien. Nous avons indiqué, il
y a quelques mois, la possibilité de l'occupation
dont il s agit. iNous n'avions pas prévu, il est
vrai, qu'elle dût se réaliser par l'intermédiaire
d'un cosaque libre et de ses compagnons.
Mais nous ne pensons pas excéder les bornes d'une
appréciation raisonnable, d'un fait qui a encore
besoin de confirmation, en disant que cette occu
pation, qui peut être désavouée au besoin, est
conforme la politique qui rapproche insensi
blement la Russie de la mer des Indes.
MORT DE L'EMPEREUR D'ALLEMAGNE.
Potsdam, 15 Juin.
L'Empereur s'est éteint paisiblement, ce ma
tin, 11 heures.
Ypres, le 16 Juin 1888.
La journée du 12 Juin n'a pas répondu \a
notre attente pour les élections de Virton, Na-
mur, Nivelles et Anvers.
Nous connaissions la lutte fratricide de
Bruxelles et nous savions ce qui se passe dans
notre arrondissement, pour ne pas pouvoir au
gurer ce qui indubitablement devait arriver
dans la capitale et dans les autres arrondisse
ments de notre Flandre.
Anvers, il est vrai, appartient également
la partie flamande, mais nous espérions que la
grande cité commerciale et maritime, qui a
tout gagner avec les principes du libre échan
ge et du progrès moderne; qui a tout perdre
avec la politique funeste de nos maîtres, serait
assez puissante pour noyer dans le grand Océan
du nombre les votes ruraux de la Campine.
L'union du parti libéral Bruxelles, les élec
teurs de la wallonnie auraient pu sauver la
situation périlleuse dans laquelle nous contour
nons, malheureusement une déception est
venue nous surprendre. C'est recommencer.
11 dépendra de l'union et de l'entente de l'opi
nion libérale pour conjurer une crise et modi
fier dans deux ans la force des partis.
Mais sera-t-il temps encore
Nous le désirons dans l'intérét de notre na
tionalité, seulement nos adversaires, grisés de
leurs victoires successives, ne mettront-ils pas
entièrement en pratique leur programme qui
comporte les desiderata de la société pour le
redressement des griefs catholiqueslisez du
prêtre
S'il en était ainsi, nous devrions craindre
Sue les hommes libres qui existent encore
ans nos communes et villes des Flandres se
raient complètement anéantis par les ruraux.
Nous assisterions cette époque critique pour
notre nationalité, redoutée et si bien prédite
par notre premier Roi, savoir, que la supré
matie d'un parti sur l'autre est un danger na
tional. Ce danger serait d'autant plus éminent
3ue cette suprématie prend sa source dans un
ogme de religion.
Cette situation particulière, dont la cause
réside dans l'immixtion du prêtre politique
dans nos élections, devrait inspirer modération
et modestie. Mais non, les forcenés reviennent
continuellement la rescousse pour réclamer
les lois les plus anti-nationales. Ils feignent
d'ignorer l'histoire. Ils méconnaissent que les
grandes nations doivent toute leur prospérité
aux principes de l'opinion libérale et que les
pays qui sont sous la curatelle du prêtre poli
tique, sont arrivés la décadence.
Sous l'empire du cens nous avions jadis
dans nos Flandres des Conseillers communaux,
provinciaux, des Représentants, des Sénateurs
appartenant l'opinion libérale. L'abaissement
du cens a fait arriver aux urnes une couche
d'électeurs plus dépendants et plus faciles in
fluencer. Le prêtre dont le seul mandat est la
politique s'en est accaparé et, d'étape en
étape, nous avons perdu, si nous exceptons
quelques rares villes, tous nos Conseillers com
munaux et provinciaux, tous nos Représen
tants et Sénateurs. Il nous en restait un seul
Ostende, le prêtre vient de lui fermer les portes
du Parlement.
Et dire qu'en présence de ces exemples pé-
remptoires, l'opinion libérale se divise, se
chamaille Bruxelles pour une question
d'abaissement ou de disparition du cens C'est
ne pas y croire.
Si l'on désire que l'opinion libérale n'ait au
cune direction dans nos affaires gouvernemen
tales, il suffit de maintenir nos divisions, nos
querelles, le clergé se chargera du reste.
Qu'on s'entende donc pour une bonne fois ou
bien pour ne plus avoir cet embarras de luttes
et de guerres intestines, qui se repercutent jus
que dans les familles, qu'on se décidé l'inac
tion. De plus, pour obtenir tout l'idéal de la vie
terrestre en attendant celle de l'autre monde,
demandons l'abolition de toutes nos lois et au
lieu de faire agir le pouvoir par le peuple, ab
diquons complètement et disons que tous les
pouvoirs émaneront de nos seigneurs lesévéques
lesquels auront le droit de les déléguer nos
révérends curés et vicaires.
De cette manière nous aurions la vie d'au
jourd'hui moins les embarras. Ce serait simple
et commode. Nous aurions simplifié et perfec
tionné la République de l'Equateur.
On doit bien le savoir, la situation que nous
fait le clergé ne peut se modifier que par l'en
tente complète entre tous les libéraux en reje
tant bien loin toute idée socialiste. C'est avec
le drapeau de l'union que l'armée cléricale a
été maintes et maintes fois battue, c'est sous
son ombre que la lutte doit recommencer.
Nous le savons, le clergé occupe aujourd'hui
la forteresse en maître souverain et du premier
Janvier au trente-un Décembre, par tous les
moyens en son pouvoir, tant dans l'ordre spi
rituel que dans l'ordre temporel, il apporte
chaque jour une pierre pour la rendre inex
pugnable.
A nous donc d'examiner froidement, mais
sainement, la situation, de mesurer nos moyens
d'attaque puis de marcher au combat en rangs
serrés.
Pénétrons-nous bien du danger que court
notre cause. X.
L'assemblée générale de l'Association soi-
disant libérale de llruxelles a décidé dans la
séance de Jeudi soir, et conformément aux pro
positions de son Comité, c'est-à-dire de la
petite chapelle, de s'abstenir au ballottage de
Mardi prochain.
Celte décision constitue un fait sans précé
dents dans les annales du libéralisme belge et
on ne saurait trouver de termes assez sévères
pour caractériser une pareille trahison.
M. Frick, sous l'empire d'une indignation
profonde mais bien légitime, s'est écrié
Adieu, Messieurs les allies du parti catholi
que et il a eu tort d'en atténuer après coup
la portée.
L'Association libérale de Bruxelles ne compte
plus parmi le libéralisme belge elle est morte
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