LE GOUVERNEMENT DES CURES.
N° 47. Dimanche,
48e ANNÉE
10 Juin 1888
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
6 FRANCS PAK AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Heures de départ d'Y pues pour
Poperinghe, 6-50 9-09 10-00 12-07 3-00
■m i ii riTYPtiMWinni
Ypres, le 9 Juin 1888.
Rien n'excite plus l'ire (le nos maîtres, que
lorsqu'un homme politique ou un journal atta
que de face l'ennemi de nos institutions libéra
les, lorsqu'il montre du doigt ce cierge politique,
revèche toute idée de progrès et surtout
lorsqu'on sonne l'alarme au cri devenu histori
que, prononcé par un homme célèbre Le clé
ricalisme voilà l'ennemi.
Aussi toutes les haines des sacristies sont-
elles dirigées de ce côté.
Rien d'étonnant dès lors, que l'honorable M.
Bara, qui sait fustiger de main de maître celte
politique qui n'a d'autre but que dasservir
une nation libre un clergé insatiable de do
mination temporelle, serve de point de mire
aux attaques les plus furibondes.
Quand un radical, un socialisleou tout autre
mécontent, dans un meeting ou écrit public,
prétend que la question cléricale n'existe plus,
qu'il y a nécessité de s'occuper de réformes so
ciales, il se produit immédiatement un soula
gement dans le camp de nos adversaires. La
joie éclate de tous côtés. L'expression est saisie
avec avidité, on brode articles sur articles dans
le but de démontrer que nos prêtres ne s'occu
pent que de leur saint ministère.
Il faut que nos gouvernants soient honteux
du rôle qu'ils sont obligés de jouer, vu que
leurs rares organes,dont la rédaction sort d'une
officine laïque, font le possible et l'impossible
pour démontrer que nous ne vivons pas sous un
gouvernement de curés.
Quoique l'évidence saute aux yeux de tout le
monde, nous voyons cependant un journal de
la capitale offrir plusieurs primes et notamment
deux de 1,000 francs celui qui démontrera,
1° que le clergé ne jouit pas de plus d'avanta
ges sous les ministères Devolder et Lejeune,
que sous celui de M. lîara 2° qu'actuellement
il y a 230,000 élèves de plus dans les écoles
primaires officielles et inspectées par l'Etat que
sous le ministère de M. Van Humbeeck.
Puisqu'on convie tout le pays ce concours,
nous nous permettrons de tenter une modeste
solution.
Qu'est-ce qu'un Gouvernement de curés
Le simple bon sens donne la réponse. Ce
n'est certainement point un Gouvernement
qui subsidie plus ou moins largement les be
soins du culte, tels qu'ils sont entendus par la
lettre et l'esprit de la Constitution mais bien
un Gouvernement qui n'existe que de par l'in
fluence du prêtre et qui favorise par tous les
moyens en son pouvoir les institutions politi
ques et sociales du clergé, l'effet d'augmenter
encore sa prépondérance, déjà trop marquante,
pour faire de la population présente et de celle
venir une véritable génération de crétins,
pronostiquée par M. Dedecker.
Nous le demandons, en présence de tout ce
qui se passe tous les jours devant nos yeux,
pareille vérité a-t-elle jamais pu être jetée plus
justement la face d'un parti politique qu'ac
tuellement pour le stigmatiser de la maniéré la
plus complète.
Découvrons complètement la plaie, que d'au
cuns considèrent comme gangreneuse et qui
doit emporter notre état social, n'est-il pas
évident que nos curés el nos vicaires dirigent
nos élections, désignent les candidats, condui
sent les électeurs au scrutin comme du
bétail et fêtent avec eux le triomphe de
leurs hommes Les cloches de nos églises
n'annoncent-elles pas toutes volées les
succès électoraux des candidats du clergé? Les
sociétés tant des villes que des communes ne
sont-elles pas sous la direction de la sacristie et
celles qui n'y sont pas, ne sont-elles pas com
battues en chaire, dans le confessionnal et
l'occasion de toutes les cérémonies religieuses?
Ne voit-on pas bien souvent refuser les secours
de la religion aux personnes qui appartiennent
aux rares sociétés libres, qui existent encore
dans notre malheureuse Flandre
Une dernière considération topique De
grand matin, le jour des élections, avant le
départ, les curés ne convoquent-ils pas tous
les électeurs l'église, sous prétexte de faire
entendre la messe sous l'invocation du bon
Dieu et de S' Joseph pour obtenir un résultat
favorable l'opinion cléricale
Ces vérités sont patentes et évidentes comme
le jour. Il n'y a que les intéressés, les farceurs
qui vivent de l'encens et du feu du temple pour
soutenir le contraire. Il faut considérer comme
des pantins ceux qui, en plein Parlement, sou
tiennent que le prêtre politique est doux com
me l'agneau et qu'il ne se mêle jamais de nos
élections.
Nous le disons tout haut et sans la moindre
crainte de voir relever notre défi sans l'in-
lluence des curés, peut-être pas cinq représen
tants ne retourneraient,après le 12 Juin, siéger
au Palais de la Nation. Dès lors notre gouver
nement ne mérite-t-il pas l'épithète qu'on lui
décerne
Enfin cette deuxième prime de 1,000 francs
celui qui prouvera que nos écoles primaires
officielles et inspectées par l'Etat contiennent
230,000 élèves de plus que sous le Gouverne
ment do M. Van Humbeeck.
Si un parti politique avait un peu de pudeur
ou compter avec l'opinion publique, s'il ne
savait pas qu'il peut tout oser et tout braver,
sous réserve de ne pas mécontenter les curés,
oserait-il lancer, nous ne dirions pas ce défi,
maiscette bourde?Certainement non. Mais il se
dit, bravons, bravons l'opinion publique, nous
avons pour nous les curés tout puissants, nous
pouvons nous passer du reste des mortels.
Ecrivons pour les badauds, ils nous croiront.
En effet, vit-on jamais assertion plus men
songère que cette bourde de 230,000 élèves,
alors que l'on sait que, sous le Gouvernement
de M. Van Humbeeck, nos curés et nos vicaires
ont dépeuplé nos écoles officielles et que sous
le Gouvernement du pleurnichard M. Thonis-
sen, de funeste mémoire, nos écoles communa
les ont été pour une grande partie supprimées,
pour une autre remplacée par des écoles adop
tées et que tous ces simulacres d'écoles sont
inspectés pour la forme par l'Etat. Il n'y a que
les villes et les pays libéraux qui ont encore
un enseignement sérieux. L'enseignement,
tout l'enseignement est ici entre les mains des
curés dès lors quoi d'étonnant de trouver
230,000 élèves qui fréquentent les écoles adop
tées, inspectées pro forma.
Au lieu de mille francs nous offrons le double
celui qui pourra démontrer que nous ne
vivons pas sous
LE GOUVERNEMENT DES CURÉS.
X
A lire le manifeste que MM. Surmont et
cie adressent leurs électeurs, c'est faire écla
ter la rate. Jamais boniment plus doré ne vit le
jour. C'est du Mengin moins les crayons.
On a dit que les candidats cléricaux comptent
sur les chxrrues croyant en Dieu, la comparaison
est forte et nous protestons au nom de la dignité
humaine mais nos candidats n'ont pas ce senti
ment de la dignité, car pour espérer faire avaler
les pavés qu'ils décochent leurs lecteurs, il
faut qu'ils les prennent au moins pour des au
truches avec un estomac broyer des cailloux.
A les entendre l'agriculture est sauvée, les im
pôts sont diminués, la félicité est le lot commun
et ce n'est que le commencement. Encore un peu
et on n'y tiendra plusOn mourra de bonheur .Te
nez, rien que le soldat, sou sort matériel et moral
a été l'objet particulier de leur sollicitude. C'est
maintenant un plaisir d'être soldat. Ici le soldat
est riche, ce n'est pas comme au service de l'Au
triche. Enfin on l'a tellement gâté, et le mani
feste n'en parle pas, par modestie, que le soldat
pourra rester 13 ans sous les drapeaux, toujours
pour son plus grand bien et s'il y avait moyen
on l'y retiendrait jusqu'à extinction de chaleur
naturelle. Mais pour ceci les temps ne sont pas
encore propices. Attendons et cela viendra.
O autruches
Le Journal (VYpres imprime ceci, parlant de
la réunion de l'Association du 2 Juin Si ce
qu'on nous raconte est exact, la réunion a eu
quelques intermèdes comiques. Le Moniteur de
1 Association ne çourrait-il pas nous citer les
noms des deux électeurs qui ont réclamé la
lutte
Mettons que deux électeurs aient réclamé la
lutte, cela est-il si comique Y en aurait-il eu
quatre et plus qui eussent tenu combattre les
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