JOURNAL 0 APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 801. 9* Anif
Dimanche, 18 Novembre 1849.
Vires acquirit eundo.
INTÉRIEUR.
FEUILLETON.
Venise et l'Archipel.
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 30 c. Provinces, 4 francs.
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être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRFJ, le 1T Novembre.
Le discours du Trône a fait perdre toute re
tenue aux journaux catholiques. Pendant que
l'un le compare un air fie serinette joué par
tous les oiseleurs tous les oiseaux pipés, l'autre
éclate en injures contre le ministère et le
parti libéral qui ont l'audace de nepas suivre la
voie que les précédents cabinets leur avaient
tracée. Il faut être juste, le parti clérical ne
lient pas voir officiellement figurer ses hom
mes la tête du gouvernement. Il fait bien mieux
ses affaires par des personnages interposés soi-
disant libéraux, tirant les marrons du feu au
profit du clergé. Aucune feuille épiscopale n'a
pu laisser passer l'occasion de faire éclater son
dépit de ce que le ministère libéral montre aussi
peu de souci de ses patrons et ne fait plus
profession de dépendance leur égard. L'époque
est passée où un ambassadeur inpartibus roulait
incessamment sur le chemin de fer entre Brux
elles et Malines, pour négocier avec le cardinal-
archevêque la loi sur l'instruction primaire.
Cependant force de mentir, en répétant
sans cesse ni repos, les mêmes calomnies en
amoindrissant les actes du ministère, lesfeuilles
catholiques pourront bien faire quelques du
pes, mais nous croyons impossible qu'elles par
viennent faire chérir la domination cléricale
que nous avons subie pendant dix-sept ans. Ce
n'est pas cependant que la presse catholique
recule devant aucun efForl pour démontrer que
si le ministère libéral a fait preuve de sagesse,
de prudence, et que si la Belgique a échappé
la tourmente révolutionnaire, grâce lui, il ne
lui est dû cet égard aucune reconnaissance.
Le parti catholique qui, certes, si un mouve
ment insurrectionnel avait éclaté, eut eu tout
craindre et probablement perdu toute influence,
tout en se réjouissant en secret d'avoir échappé
l'orage, injurie ceux qui l'ont sauvé. C'est
ainsi que le parti béat, les enragés-modérés
reconnaissent les services rendus au pays. Il
n'y a pas jusqu'au commerce et l'industrie qui
avaient tout perdre, si le pays eût été entraîné
dans le tourbillon républicain, qui, en certai
nes localités, n'aient l'air de faire cause com
mune avec les catholiques-politiques, proba
blement parce que ceux-ci aur aient amené leur
ruine et que le libéralisme les a sauvés.
Un sujet de plainte que les journaux catho
liques traitent volontiers, c'est l'absence de toute
mesure protectrice contre l'entrée des céréales
étrangères introduites en concurrence avec les
productions de notre agriculture, et qui ont fait
tomber les prix du froment au-dessous du prix
rémunérateur. On pqrt de là pour crier par
dessus les toits que l'agriculture est ruinée et
que c'est la faute du ministère qui est libre-échan
giste au dépens des cultivateurs.
Mais en France où il existe des mesures
protectrices, où l'agriculture est protégée com
me le disent nos soi-disant défenseurs delà pro
priété le prix du froment est plus bas qu'en
Belgique, où la moyenne est de fr. 15-81
tandis qu'en France elle n'est que de fr. 14-82.
Comment expliqueront-ils ce phénomène, ces
avocats de l'agriculture? dans notre pays où
il n'existe pas de tarif prolecteur, les céréales
sont un prix plus élevé qu'en France, où une
échelle mobile de droits est en pleine vigueur.
Ce sont des faits qu'on ne peut nier et qui con
damnent toutes les assertions de la presse ca
tholique l'appui-de l'échelle mobile et d'un
droit fixe élevé, qu'elle voudrait voir appliquer
l'entrée des céréales. La véritable raison du
bas prix du froment et par conséquent de tous
les produits de l agricullure, n'est autre que la
fécondité extraordinaire et" l'abondance des deux
dernières récolles qui ont permis la Belgique
d'exporter des céréales elle qu'on disait ne pas
produire assez pour sa consommation.
Cependant c'est un cheval de bataille du
parti catholique qui veut caresser et les élec
teurs de la campagne et les propriétaires ter
riens qui, en fin de compte, absorbent la taxe
frappée sur les grains étrangers, sans utilité pour
le fermier qui voit élever son fermage me
sure que les produits agricoles se vendent uij
prix plus avantageux. Ce qu'il gagne d'un côté,
il le perd de l'autre, et en dernière analyse, le
pays en général paye pour sa consommation
une surcharge laquelle elle ne peut consentir,
sans faire souffrir et la classe ouvrière et les
producteurs de tout genre, y compris même les
petits fermiers.
Les journaux mixtes chantent sur une autre
gamme ceux-là ne veulent plus entendre par
ler de politique. Libéral ou catholique, ils
condamnent tout ministère qui a une couleur
de parti. Mais ils en sont revenus leur vieille
panacée des hommes d'affaires. Il leur faut des
ministres de cette trempe, et il n'y a pas long-
tempsquenous les avons vus lœuvre. Jamais
le pouvoir n'a été plus vilipendé que quand les
Nos lecteurs ne liront pas sans intérêt le fragment
bizarre d'un des ouvrages les plus remarquables qui
aient paru en Angleterre depuis longtemps. L'auteur,
M. d'Israelichef actuel du parti thory, est le premier
écrivain qui ait essayé une imitation des Confessions de
J.-J. Rousseau. Un style élevé, brillant, mais inégal; de
la force, de l'éclat quelquefois de l'obscurité tels sont les
caractères principaux qui distinguent les premiers ou
vrages de cet écrivain, dont la famille est originaire de
Venise, et dont le père, établi en Angleterre, a publié
plusieurs ouvrages remarquables. Vivian Grey et plu
sieurs autres romans de M. d'Israeli ont obtenu un grand
succès Londres. On y trouve un singulier mélange d'i
ronie fine et de mysticisme sentimental. Le dernier de
ses ouvrages, celui auquel nous empruntons le fragment
qu'on va lire, est le plus remarquable de tous, par la vi
gueur du coloris et la consciencieuse analyse des passions
et des idées. L'auteur l'a désigné sous le titre prétentieux
d'Auto-biographie Psychologique; sous cette appellation
assez ridicule, il s'est plu raconter non-seulement les
événemens de sa vie, mais les secrets ressorts de son être,
mais les mobiles de ses passions, mais tout ce qui a in
fluencé le développement de son intelligence, mais les
mouvemens intimes de son âme et les germes de ses pen
sées les plus cachées. Goethe et Rousseau, deux grands
génies, ont essayé de tracer ces annales intérieures de
l'être moral: pour intéresser le lecteur, elles ont besoin
d'un style ardent, lucide, pénétrant, qui reproduise vi
vement les sensations, qui vous associe aux douleurs et
aux joies intimes de celui qui se soumet cette analyse
volontaire. Quelque inférieur que soit l'ouvrage de M.
d'Israeli au modèle immortel donné par Jean-Jacques, il
a souvent réussi dans l'accomplissement de celte tâche
difficile. Une profonde énergie respire dans quelques-
unes de ses pages. Nous avons choisi, comme remarqua
bles par l'intérêt romanesque, celles qui contiennent
l'histoire singulière de son mariage avec une jeune Vé
nitienne de son nom et de sa famillehistoire dont les
hommes d'affaires faisaient leurs affaires aux
dépens des intérêts de la Belgique. Mais, pour
certains individus, c'était du pouvoir comme il
en faut, et le clergé qui ne recherche que la
déconsidération de tout pouvoir civil parce
que le sien se relève d'autantbattait des
mains en chantant les louanges de la mixture,
l'on se doute pourquoi; la correspondance du
ministère avec les évêques a plus lard dévoilé
le mystère.
M. Alphonse Vanden Peereboomdéputé
d'Ypres, est nommé secrétaire de la Chambre.
(Voir plus loin).
L'atelier d'apprentissage de Passchendaele a
été inspecté par un employé du ministère et il
est convenu que c'est un des mieux organisés
de la province.
Correspondance.
Poperinghe, le 15 novembre 1849.
Monsieur le rédacteur du Progrès,
Après avoir traité, dans notre revue administrative,
de Vinstruction publique; des travaux publics; de la
voirie vicinale; de Y hygiène et de la salubrité publiques;
des taxes communales des finunces; de la sûreté pu
blique; des beaux-arts; du commerce et de l'industrie,
il nous resterait, pour compléter cet exposé de la situation
de nos affaires locales, d'examiner encore nos institutions
de bienfaisance. Cependant, comme ces établissements ne
tombent pas sous la surveillance exclusive et immédiate
de l'administration communale, et que la responsabilité
des abus qui s'y commettent, incombe pour le moins au
tant aux commissions spéciales qui les dirigent, nous
avons cru devoir faire de nos investigations ce sujet
l'objet d'une publication part, qui concerne plus parti
culièrement ces commissions. En attendant, nous nous
bornerons, dans le présent article, donner un résumé
de ce que nous avons fait jusqu'aujourd'hui au sujet de
l'administration proprement dite de la ville, autant pour
expliquer nos concitoyens le but que nous nous sommes
proposé dès le principe, que pour faire voir ce que nous
avons déjà obtenu par notre franche et constante opposi
tion et ce que nous sommes encore en droit d'espérer pour
l'avenir.
Tout le monde connaît ici le déplorable état de nos
affaires communales lors de la dissolution des conseils
communaux en 1848. Un arriéré considérable dans les
finances et un déficit croissant d'année en année, tel était
le bilan de la situation. Nous ne voulons plus revenir sur
les causes qui ont amené cet état de choses. Chacun les
sait, et nous pouvons les résumer toutes dans le mono
pole administratif exercé par le chef de la commune qui,
par une tactique jésuitiquement adroite, avait su parvenir
écarter toute opposition dans le Conseil et faire des
conseillers des automates votants tous mûs par un même
ressort.
Loin de nous cependant de suspecter les intentions
personnelles des hommes qui faisaient cette époque
journaux anglais ont reconnu l'exactitude. Nous ajoute
rons en outre que, par une bizarrerie que nous ne cher
cherons pas expliquer, l'auteur s'est plu revêtir les
personnages qui figurent dans cette scène de noms qui,
quoique hisloriques ou vrais, ne leur appartiennent pas
en propre. C'est ainsi que par une vanité un peu dé
placée, ou bien, pour exciter plus vivement l'intérêt du
lecteur, il se donne comme descendant des Contarini
la famille desquels il n'appartient pas.
Quiconque est né poète a choisi dès son premier âge
Venise comme la ville favorite de ses rêves, comme la
cite bien-aimée de son imagination comme le charme
secret de sa pensée. J'étais Venise depuis deux jours.
A Venise! quelle joie! A peine les yeux de mon intelli
gence s'étaient-ils ouverts, que ma rêveuse et poétique
imagination se plaisait errer dans les lagunes vénitien
nes c'était sur les gondoles et les fusinelles que je m'em-