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5e ANNÉE. N° 455. JEl'DI, Il SEPTEMBRE 1845.
INTÉRIEUR.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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MB A ^TW Tout ce qui concerne la lédac-
II Jn IH ElE JlrMÉ il adressé, franco,
et chez tous les per- H| R I fllll H du
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Pour les autres localités 6-00 0 W Quinze centimes par ligne.
Prix d'un numéro0-25
VIRES ACQMRIT EtJNDO.
YPBES, le 10 Septembre.
entrée en franchise de droits des denrées
alimentaires.
La perle au moins partielle de la récolte des
pommes de terre vient d'inspirer au ministère
des mesures que nous devons louer. Un arrêté
royal en date du 5 septembre, déclare libres
l'entrée les principales denrées alimentaires et
prohibe la sortie du sarrasin et des pommes de
terre. Comme cet arrêté est porté en dehors de
pouvoirs constitutionnels du roi, un second de
même date convoque les chambres pour le 16
septembre prochain, afin de régulariser ces me
sures provisoires et d'en obtenir la sanction
parlementaire.
Le ministère a trouvé que les circonstances
étaient critiques et n'a pas voulu tarder d'y
porter remède, pour autant que cela était en son
pouvoir. Il est constant que la saison rigou
reuse que nous allons subir, sera dure tra
verser pour les classes nécessiteuses. La nourri
ture ordinaire des pauvres sera probablement
un prix exorbitant et il était urgent en effet
de prendre des mesures propres faire arriver
au meilleur marché possible, des denrées pou
vant tenir lieu des pommes de terre qui man
queront celte année, sinon totalement du moins
en grande partie.
C'est ainsi que les droits qui frappaient
l'entrée l'orge et le sarrasin sont abolis, et
cependant ils étaient de 14 et de 13 francs les
mille kilogrammes. Le maïs payait 2 pour cent,
les fèves 10 francs, les pois 19 francs. Le ver
micelle, le macaroni et la semoule ne pouvaient
entrer qu'en acquittant un droit de 24 francs les
cent kilogrammes. Enfin le riz était frappé d un
droit de 5 francs les cent kilogrammes.
A l'aide de ces modifications douanières, on
peut espérer que ces denrées subiront une cer
taine baisse et seront plus ou moins accessibles
aux classes indigentes. Déjà l'abolition des droits
est une prime octroyée par la nation au com
merce qui voudra se charger d'importer ces
marchandises.
Mais il est quelques mesures dont la portée
réelle est nulle notre avis, c'est la prohibition
la sortie du sarrasin et des pommes de terre.
Nous ne blâmons pas le ministère d avoir pro
hibé l'exportation de ces denrées; nous disons
seulement que la seule utilité de cette disposition
Feuillctoii.
(Suite.)
vi.
UNE SCÈNE D INTÉRIEUR.
Le baron de Goetzen habitait un magnifique palais où éclatait
partout ce luxe distingué que donne l'opulence unie au goût des
arts. Les œuvres des meilleurs maîtres resplendissaient au milieu
des détails de la plus grande élégance. Des domestiques en riche
livrée circulaient dans les escaliers et occupaient les antichambres.
Ils étaient étrangers comme leur maître, qui les avait amenés avec
lui, auquel ils paraissaient fort attachés, bien qu'un ordre rigoureux
et inexplicable en apparence leur interdit tout rapport avec les per
sonnes du dehors, excepté pour la nécessité de leur service respectif.
Cette mesure et la réserve habituelle qui en était ta conséquence,
donnaient 1 habitation du baron un air de mystère qui contrastait
avec sa vie extérieure et son caractère un peu turbulent. Il s'absen
tait fréquemment pour ses affaires ou pour ses plaisirs, et alors la
est de tranquilliser les populations et sous ce
rapport, elle mérite d'être approuvée. Il est cer
tain qu'on ne viendra pas en effet acheter en
Belgique, le sarrasin qui y est hors de prix, ou
les pommes de terre qui ont presque tous souf
fert de la maladie et dont les saines seront un
prix très-élevé.
A la réunion des chambres, il faut que le mi
nistère complète les dispositions qu'il vient de
prendre, eu proposant d'accorder une prime
par tonneau de mer, aux navires qui aborderont
dans nos ports chargés de pommes de terre. Il
serait bon en effet de stimuler le commerce par
une faveur concourir l'approvisionnement
du pays. C'est là, notre avis, le meilleur moyen
de réparer le mal, qu'une température peu pro
pice a fait aux productions de la terre, et nous
croyons qu'au moyen de celte mesure, qui n'est
que le corollaire des précédentes, nos popula
tions pourront passer la mauvaise saison sinon
sans douleur, au moins sans détresse.
Il est préférable de charger le commerce du
soin de faire arriver les pommes de terre en
Belgique, car le gouvernement ne peut jouer le
rôle, d importateur, sans que les opérations de ce
genre ne se fassent avec bien plus de dépenses
et de frais qui, en dernière analyse, seraient en
core une perle pour lairtxtion. Mais nous som
mes aussi d'avis, qu'il ne faut pas abandonner la
concurrence privée elle-même sans surveil
lance. Nous désirons que dans les époques de
cherté, les abus puissent être réprimés ou neu
tralisés, car ils sont alors doublement repré-
hensibles.
le chemin de fer d'ypres a courtrai.
Ce que nous avons craint est arrivé. La ville
d'Ypres est encore une fois gravement lésée
dans ses intérêts. Le chemin de fer de Bruges
sur Courtrai est déjà en voie d'exécution et jus
qu'ici, Ypres nous n'avons vu, ni ingénieur,
ni concessionnaire qui aient daigné s occuper
de notre ligne sur Courtrai
Il faut en convenir, c'est maudire et le gou
vernement et ceux qui près de lui sont chargés
de défendre les droits de la ville d Ypres. Quoi!
on commence par relier deux villes qui jouis
sent déjà d'un chemin de fer et l'on ne s occupe
pas de la construction de la ligne d Y"près; Y près
qui depuis longtemps eut dû être dotée d un
chemin de fer et qui n'en possède un que sur
la carte, sans autres garanties que les pro
messes d'une compagnie anglaise
maison devenait toul-à-fait inaccessible. Souvent, après une brusque
disparition, il revenait tout-à-coup sans qu'il fut possible de donner
son retour, aussi bien qu'à sou absence, d autre raison que le ca
price. Il s'était présenté comme Allemand d'origine, mais depuis
longtemps éloigné de son pays. Il était riche, élégant, prodiguej on
ne lui demanda rien de plus.
Le baron de Goetzen fit panser sa main et s'étendit sur un lit en
touré de courtines de soie. Deux hommes dont le costume jurait
aussi étrangement avec l'élégance qui les environnait, que leur
langage avec celui du baron, étaient entrés dans la chambre presque
en même temps que lui. L'uu se tenait assis sans façon sur le pied
du lit, l'autre se tenait debout son chevet. Tous deux étaient cou
verts d habits en désordre. Leur physionomie exprimait la fois la
bassesse et l'iusolenec. Quant au baron, sa figure pâle et habituelle
ment mobile, ne trahissait en ce moment, ni émotion ni surprise.
Taudis qu'il attachait tour tour sur chacun des deux hommes un
regard profond, son front haut respirait plutôt le contentement que
!e dédain, et sa bouche entr'ouvertc ne laissait deviner que ce senti
ment de bien-être résultant du repos après une grande fatigue.
Et qu'on ne dise pas que la construction du
chemin de fer n'est pas commencée. On a pu
lire dans tous les journaux que du côté de Heule,
village peu éloigné de Courtrai, les travaux pré
paratoires sont déjà faits. Les arbres sont déjà
abattus et les jalons indicateurs sont posés.
Nous ne sommes pas encore aussi avancés, nous;
aucun fondé de pouvoirs de la compagnie ne
s'est encore donné la peine de se mettre en rap
port avec l'autorité communale et nul habitant
de l'arrondissement d'Ypres, ne peut dire qu on.
a vu même l'ombre d'un ingénieur.
Mais quelle nécessité de relier Courtrai Bru
ges, qui déjà sont en possession d'un chemin de
fer A l'aide d'un délour prestement parcouru
sans doute, les relations entre ces villes n'étaient-
elles pas faciles et le gouvernement ne pouvait-il
stipuler en bonne justice, qu'au moins les
travaux sur la ligne d'Ypres seraient entrepris
en même temps que sur la ligne de Courtrai
Bruges. Mais non, il faut que la ville d'Ypressoit
sacrifiée, soit blessée dans ses intérêts. A la tête
du gouvernement provincial, se trouve l'homme
qui a toujours ballu en brèche et fait échouer
nos plus justes réclamations, pour favoriser
scandaleusement Bruges et Courtrai aux dé
pens de nos intérêts. Courtrai n'est-il pas son
arrondissement électoral et Bruges le siège du
gouvernement provincial? Qu'importe les justes
plaintes des autres localités de la province! Une
politique égoïste et sans âme s'inquiète peu de
ces clameurs impuissantes. L'art de gouverner
ne consiste plus être juste et équitable, mais
donner satiété aux uns et traiter les au
tres en parias.
El cependant il restait au gouvernement un
moyen d'engager la compagnie se rendre
nos justes désirs. L'acte de concession voté par
la chambre laissait la disposition du ministre
le choix du tracé de l'embranchement de Thielt
vers le chemin de fer de l'état.
Il est de fait que la direction sur Deynze était
infiniment plus favorable la compagnie, que
celle sur Aeltre. N'y avait-il pas moyen de n'ac
corder l'embranchement Sur Deynze, que sous
la condition, que les travaux s'exécutassent si
multanément sur la ligne d'Y pres Courtrai et
sur celle de Bruges Courtrai?
Eh bien! l'embranchement sur Deynze a été
concédé la compagnie. Mais dans celte négo
ciation rien n'a été stipulé en notre faveur,
tandis qu'il était si facile M. Malou, le mi
nistre des finances, d'obtenir une convention de
Jacopo, demanda-t-il nonchalamment, quelle heure est-il?
Signor, le sablier vient de s'arrêter; il est une heure.
C'est bien, nous avons encore le temps de causer... Tu es un
brave et je suis content de toi. Rocco, ajouta-t-il, en s'adressant au
second personnage vêtu d un costume de gondolier, et qui n'était
autre que I homme qui 1 avait accompagné dans la soirée, tu as fine
ment besogné, mon vieux dogue.
A ces mots, l'homme qui était assis sur le lit fit entendre une
sorte de grognement qui pouvait exprimer indifféremment la joie ou
uu remerciaient.
Jacopo, poursuivit le baron, tu as de l'enthousiasme et le coup
d'œii sûr... Toi, ou Rocco, il vous faut me débarrasser au plus vite
du petit Vénitien que je Vous ai montré... Tiens, Rocco, prends cette
bourse, et partage avec Jacopo ce qu'elle renferme.
A la vue des pièces d'or, les yeux des deux hommes s'enflammè-
rent. Le partage ne put se faire également. Il restait une pièce d'or
sur la table Jacopo avança la main... Rocco tira son poignard. *-
La crois-tu rouillée depuis ce soir? demanda-t-il en présentant la
pointe son compagnon.