5e ANNÉE- - K° 449.
INTERIEUR.
JEUDI, 21 AOUT 1845.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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cepteurs des postes du royaume.
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Le Progrès
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé, francot
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che et le Jeudi de chaque semaine,
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TIRES ACQUIRIT EUNDO.
ÏPKES le 20 Août.
Le temps qui, il y a quelques jours, semblait
encore compromettre la récolte, surtout dans
notre arrondissementparaît décidément vou
loir se mettre au beau: les journées de Dimanche,
de Lundi et la matinée de Mardi, quoiqu'un peu
froides, ont été exemples de pluie, de sorte
que l'avenir se présente nos cultivateurs abat
tus sous des auspices plus rassurants, car,
malgré le dernier orage le soleil qui apparaît
de temps autre, nous annonce encore des
beaux jours.
Il était temps que celte heureuse révolution
arrivât dans l'atmosphère, car les céréales ar
rêtés dans leur développement, demeuraient
complètement slationnaires, tandis que la pom
me de terre, celle base précieuse de la nourri
ture du plus grand nombre, déjà fortement
maltraitée par la perte de sa verdure, sur
laquelle s'étaient abattues des myriades d in
sectes, commençait souffrir de la trop grande
abondance d'eauet se pourrir sur place.
Heureusement, aujourd'hui, sauf quelque dégât,
résultat inévitable d'une année généralement
mauvaise, les craintes commencent a se dissiper,
et nous n'aurons pas encore trop souffrir.
Nous polirions rendre grâces la Providence,
qui aura jeté un regard de bonté paternelle sur
ses enfants.
Le mal qui a atteint partiellement nos champs
de pommes de terre, présente des caractères
assez remarquables, et que nous avons pu con
stater sur plusieurs échantillons qui nous ont
été montrés il consiste en une ou plusieurs
tâches noirâtres qui s'observent d abord l'enve
loppe du tubercule, et envahissent ensuite peu
peu la pulpe; le fruit exhale alors une odeur
fétide, telle que les animaux refusent de le
manger. 11 paraît même que dans la cuis
son, il suffit de la présence d un tubercule ainsi
atteint, pour gâter tous ceux avec lesquels il se
trouve.
Du reste, co.jme ces caractères s'aperçoivent
aisément, il est facile d'opérer un triage, et de
séparer les pommes de terres saines de celles
qui ne le sont pas.
Dans tous les cas. on a, comme il arrive d'or
dinaire, exagéré le mal. et il est croire que le
désir d'exploiter mercantilement une calamité
publique qui semblait prête fondre sur nous,
n'a pas peu contribué jeter dans le public des
bruits alarmants, et produire sur nos marchés
ces hausses prématurées qui n'auront pas, nous
l'espérons, de marche ascendante, parce que.
quand bien même la récolte ne serait pas cette
année, aussi aboudante que l'année dernière,
rien ne justifierait une cherté de denrées outre
mesure, attendu suitoul que le pays possède
encore une réserve de céréales assez considérable.
Samedi dernier, le prix du fromeut a baissé
de fr. 1-50 sur notre marché.
En rendant compte de tout ce qu'il nous a été
donné d'observer l'occasion de la Thuindag,
nous avons négligé de parler de l'ouverture du
nouveau salon de la Société de la Concorde. Ce
n est point par oubli que nous en avons agi
ainsi, car notre intention était de ne traiter ce
sujet, quelorsque le local auraitéléenlièrement
meublé et décoré; il nous semble cependant
qu il convient que nous eu disions quelques
mots. Tous les étrangers qui sont venus vi
siter ce salon ont été unanimes convenir que,
dans peu de villes, une société possède un plus
beau local qu ici; il faut avouer en effet, que
dans l'état même débauche où il se trouve, il
présente déjà quelque chose d'imposant, et qui
fait pressentir dès présent ce que sera la salle
des réunions journalières, lorsqu'elle aura reçu
sa peinture définitive, et qu'elle sera ornée de
ses glaces, de ses lustres, et autres objets d'ameu
blement. Formons des vœux toutefois, pour
que le projet de scinder cette belle salle en
deux par le vitrage que nous y avons déjà vu
figurer, ne se réalise jamais; outre qu'il y aurait
oubli total des convenances placer la salle de
lecture et la bibliothèque côté de la tabagie,
on ne peut disconvenir que l'exécution d'une
semblable mesure détruirait entièrement la sy
métrie qu'on admire aujourd'hui dans le salon.
Il paraît que l'administration de la société a
conçu le projet d'éclairer tout l'hôtel de la Cbâ-
lellenie au gaz; nous applaudissons fort celte
idée qui, si elle se réalise, sera pour la société
une source d économie; mais il semble que
quelques voisins s'opposent ce qu'on place un
gazomètre proximité de leurs demeures; nou9
croyons que ces personnes s'exagèrent les in
convénients attachés ce genre d'établissement.
On nous rapporte que pendant une nuit de
la semaine dernière, des voleurs se sont intro
duits en grand nombre dans une ferme de la
commune de Voormezeele, et qu'après y avoir
maltraité le fermier et sa familleils se sont
emparé d'une somme de 2,000 francs, produit
d une vente de denrées que ce fermier venait
de faire.
La justice était samedi sur les lieux.
Le nommé Vandriesscheramoneur, a éic
trouvé pendu dans la matinée de ce jour. Cet
événement qui est attribué un suicide, a été
constaté par la police locale. La mort datait
de longtemps lorsqu'on a détaché le cadavre.
La commission instituée pour faire au comité
de salubrité publique son rapport sur les causes
de la "maladie qui affecte la pomme de terre,
aura bientôt terminé ses travaux les curés de
campagne aidant. Nous voyons dans l'Es
poir de Rennix que ces messieurs sont en train
de lui donnera cet égard sepleins appaisements.
Quel dommage que nous n'ayons pas l'honneur
de connaître le curé d Eenamenous le prie
rions d'écrire de suite au père éternel, pour lui
Feuilletoii.
O H 3 U I,
(Suite et fin.) -VI.
UN DISTIQUE ET UN MAUSOLÉE.
Henri IV ne se rebuta pas des froideurs de la belle Ondine. Il
avait assez d'expérience pour savoir patiemment supporte! nu dédain
de femme. M™* de illars, d ailleurs, l'encourageait daussa passion.
Poussée même par son intérêt a le servir, elle alla jusqu inteicepter
une lettre que sa jeune sœur adiessait a Bellegarde pour rétracter le
continu de la première.
Bellegarde, le cœur horriblement ulcéré et ne sachant que faire
pour s étourdir, commença par Se battre avec d'Aubigné et Marciilae
qui lui adressèrent quelques mots mal sonnants. 11 tua l'un et blessa
1 autre grièvement. Puis, ne trouvant pas que la distraction .lu duel
fût assez efficace, il résolut de s'éloignei deslieux qui lui parlaieut
si souvent de celle qu il aimait toujours En conséquence, il demanda
au roi la permission d'aller servir en Provence so «s les ordres de
Lesdiguieres qui combattait le duc de Savoie. Henri IV sourit de
l'orgueilleuse et maladroite fierté du jeune homme qui abandonnait
ainsi la partie, et s'empressa de lui octroyer sa permission.
Oudine apprit bientôt ce départ, elle en fut vivement affectée
Riais son âme u avait pas l'énergie d une constance soutenue, ussi,
insensiblement, se lais>a-t-elle prendre de ce vague oubli de l'absent
au milieu duquel le cœur se beice et s'endort, laissant un libre accès
tous les piojets, tons les événements. On I a dit depuis longtemps
1 amour est un bénéfice sujet résidence. ILnri IV accabla le
marquis de Cœuvres et sa famille de diguités el d honneurs, et de la
sorte il finit par sattirer la reconnaissance d Ouduie. La reconnais
sance d une temme pour un homme est une avenue qui rneue loin.
Elle conduisit Ondine devenir la maîtresse d Henri IV, après
quelle se lut préalablement mariée, pour la foi uie, au baron Da-
meryal de Liaueourt. Bientôt apies elle eut uu rang la cour où elle
régna en souveraine.
Quand elle revit Bellegarde quelque temps après, elle sentit ce
premier amour de la jeunesse, ce seul amour de sa vie peut êlie, lui
rtfciàir au cceur. Bellegarde, lui aussi, éprouva une secousse pro
fonde. Ils ne tardèrent pal remarquer que des changements
s'étaient opérés eu eux. Bellegarde surtout avait pris des allures
graves et posées.
Ab! monsieur de Bellegarde, dit-elle avec un sourire mélan
colique, que votre caractère paraît sérieux maintenant! V ous autre
fois si moqueur, si gai,si rieur
Les auiiées nou> modifient toujours un peu, répondit-il sur le
même ton. L'expéiience ne donne-t-elle pas plus de gravité au cœur,
plus de maturité I esprit?
11 y a si peu d années encore d'écoulées.
A.-sez pour m avoir permis de beaucoup réfléchir et de beaucoup
apprendre....
Avez-vous appris être heureux, au moins? c'est la meilleure
des sciences et la plus difficile aussi.
Je ne pos-è le pas encore celle-là... Oserai-je vous demander si
vous l'avez acquise?
Elle hocha doucement la tête.
L éclat ne fait pas le bonheur, dit-elle; j'étais si contente
(.œuvres avec mes enfantillages el mon balelel. Jy vais bien encore
quelquefois, mais si rarement!
Heureux temps' heureux temps, en effet! dit Bellegarde d'une
voix légèrement altérée G est pourtant moi qui suis cause qu'il
S est enfui jamais, ajouta-t-il eu baissant ta voix.
El»' commentM. de Beilegaide?
G est qu «lois jetais un maladroit et uu étourdi; c'est qu'alors
je ne savais pas ce <«ue je sais aujourd'hui, ce que recommande un
grand poète qui oi'a fourni désormais ma devise d amour.
Que recommande d«-nc ce grand poele?
G est uu précepte latin.
Un précepte latin? voilà qui est un peu grave et savant. C'est
égal, dites loojouis Je sais un peu 1 italien, je comprendrai peut-être.
Vous le voulez?
Je vous écoute.
Voyons donc si vous comprendrez.
Hei mihij non tutu m est, quod amn, laudare sodali;
Quùui t.bi iaudauti cred.dit, ipsu subit.
Eh bien! comprenez* vous? reprit Bellegarde.
Un peu,... 11è- peu Explique*-moi Cela.
Gela veut dire u Hélas: il est imprudent de vanter un ami
l'objet de son amour, s'il croit tes éloges, il devient teu rival.
Votre poète a bien raison, dit la jeune femme. Comment le
nommez- vous'
Ovide.... Mais Ovide n'a pas su compléter ce précepte. Aussi
ai-je ajouté deux mois au-dessous du distique.
Lesquels?
Prœsertim régi
Oui signifient?
Surtout un roi!...
Il y eut un moment de silence après lequel Ondine, qui ne s'ap
pelait plus Ondine, car elle avait repris son vrai nom, changea la
conversation.
Depuis qu'elle n était plus la noble batelière de l'Aisne et qu'elle
voguait sur l'océan de la cour, elle avait perdu son surnom el sa
gaité. Faible et bonne, elle n avait «l'autre ambition que celle qu'on
lui suggérait, mais cette ambition factice fit sa perte.
Le roi lui avait formellement promis de la faire reine; elle avait
déjà les honneurs attachés a ce titre. Mais Henri IV, toujours épris
d'elle, voulut tenir sa promesse tout entière. Deux maiiages entra
vaient sa résolution il fit dissoudre 1 un pour cause d'impuissance
du côté du mari, du côté de Dameival y-i avait eu quatorze enfants
d une première femme, et poursuivre avec activité les négociations
de son divorce avec M argué ite de Valois.
Mais ou ne franchit pas facilement les degrés du trône, quand on
n'appai lient pas une caste royale.
Sur le point de ceindre la couronne, la maîtresse d'Henri IV
mourut empoisonnée dans une fête chez le riche fii'-ncier Zamet.
Ainsi, sur l'âpre chemin de 1 ambition qu'elle suivait contre son
cœur, elle avait d abord perdu le repos elle y perdait encore la vie.
Henri IV I avait beaucoup aimée, et il en porta le deuil comme
d une priuce.sst» du *ang; mais il l'oublia bientôt dans 1 intimité
d Ht miette de Balzao d fcutragues, puis de Marguérite de Montmo
rency, ses deux dernières maîtresses.
Une seule personne r. sia fitlèle son souvenir ce fut Bellegarde.
Il acheta le château de Cceuvres qui se trouvait vendre, et fit
élever dans le parc, au b«>rd de l'eau, un mausolée sur lequel on
lisait ce seul nom déjà oublié:
ONÔ1HE.
Ondiue n'était autre que Gabrielle d'Eslrées, fille d'Antoine
d Estrées, marquis de Cœuvres.
Etienne Ewault.