JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
4e ANNEE. - N 413.
INTÉRIEUR.
JEUDI, 17 AVRIL 1843.
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et le Jeudi de chaque semaine.
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
YPRES, le 16 Avril.
Une députation du conseil communal est
revenue, il y a quelques jours de Bruxelles. Elle
avait pour principale mission, paraît-il, d'entre
tenir M. le ministre des travaux publics, de la
nécessité de doter la ville d'Ypres et son arron
dissement, d'un chemin de fer qui nous relie
au réseau du railway de l'état vers Courtrai
et le Hainaut. La justice dislributive exi{je que
seuls, nous ne restions pas privés de toute
voie de communication par chemin de fer, et
par conséquent qu'il est indispensable, de son
ger établir incessamment un railway qui nous
permettrait de rejoindre celui de l'étal en une
demi-heure de temps.
La question paraît avoir fait un grand pas.
Grâce la députation du conseil communal et
l'active coopération de M. le représentant
Jules Malou et surtout celle de M. le sénateur
Malou, M. le ministre des travaux publics vient
de demander aux chambres l'autorisation d'ac
corder la concession de quatre chemins de fer,
parmi lesquels se trouve celui d Ypres vers
Courtrai, des compagnies qui les établiraient
leurs frais et sans intervention de l'état.
Si nous ne possédons pas encore celle voie si
désirée si d'autres difficultés peuvent surgir
au moins nous pouvons dire que cette question
vitale pour nous, est en bon train de solution.
Jamais la ville d Ypres, son arrondissement et
ceux qui l'entourentn'auront été si près de
posséder aussi une de ces voies de fer qui dis
pensent les richesses là où elles passent, et qui
font dépérir les cités qu'elles dédaignent de
toucher.
Voici ce que dit le Moniteur:
Dans la séance d'hier (lundi), M. le mi-
nistre des travaux publics a présenté quatre
projets de loi de concession de chemins de
fer, savoir de Louvain la Sambre, de Liège
Namur, et des charbonnages du centre
Mariage et Mons, de la vallée de la Dendre
vers Termonde etGand,de Courtrai Ypres,
de Bruges Thielt, de Thielt Boulers, et
de Roulers Ypres avec embranchement.
ORGANISATION DES CADRES DE L'ARJIEE.
Le rôle de défenseur de l'armée est devenu
plus facile, a fait observer l'honorable M. Rogier,
un changement s'est opéré cet égard dans l'es
prit public. Autrefois les défenseurs des intérêts
de l'armée étaient rares, il était de mode de crier
I économie et de demander une large diminu
tion du budget de la guerre.
C'est avec joie que nous constatons dans
l'opinion publique ce révirement des idées
plus justes et surtout plus gouvernementales.
L'industrie désirait que le budget de la guerre
fut diminué, afin de laisser plus de ressources
la disposition du gouvernement pour la con
struction de canaux et de nouvelles voies de
communication. L'agriculture demandait des
économies, afin que l'impôt foncier put être
supprimé. D'autres, sefon 'antsur la neutralité
qui est imposée la Belgique par les traités,
ne voulaient plus d'armée, sans songer que la
Belgique ne restera neutre qu'aussi longtemps
qu'elle pourra défendre celte neutralité. D ail—
leurs, comme l'a dit M. le prince de Chiraay,
neutralité en langage politique, ne veut pas
dire nullité et c'est cependant ce dégré d'a
baissement qu'on voulait nous amener, en sup
primant l'armée.
Une seule question paraît avoir jusqu'ici
donné lieu un vole: c'est celle de savoir, si
comme le proposait M. Brabant, le nombre des
officiers subalternes de l'infanler e ne s'élèverait
qu'à 886 ou si, comme le demandait le minis
tre, les cadres en compteraient 1098. Par là
se trouvait implicitement résolue la question de
savoir, si les bataillons seraient fractionnés en
quatre ou en six compagnies.
Le ministre a obtenu gain de cause de la
Chambre; les cadres pour six compagnies ont
été admis et le chiffre du gouvernement a été
voté. Nous croyons que la Chambre a été bien
inspirée, car que voulait-on Avoir une organi
sation sur pied de paix, qui put permettre de
placer l'armée sur pied de guerre avec facilité.
D'ailleurs le projet de la section centrale de 1843,
qui ne voulait que quatre compagnies par ba
taillon, prescrivait descadres sans consistance et
sans proportion avec le nombre d'hommes
commander. Pour peu que, d'après ce système,
il eut fallu augmenter l'armée, il était impos
sible de trouver des officiers sans désorganiser
les cadres des régiments.
C'est ce que la Chambre a bien compris. Aussi
une grande majorité s'est-elle rangée du côté
de l'avis du gouvernement. On sentait qu'il fal
lait faire bien, ou pas du tout, qu'il fallait une
armée respectable, ou des corps de gendarmes
et de gardes-champêtres. Il n'y avait pas de
milieu, l'organisation des cadres devait être
forte, car dans une armée, les cadres sont beau
coup. U ne fallait pas surtout des cadres étri
qués, incapables de rendre un service utile en
temps de guerre et qui n'auraient jamais pu
former une armée, qui eut mérité le respect des
nations qui nous entourent.
En finissant, nous croyons devoir féliciter la
Chambre de la sagesse qu'elle a eue de ne pas
aborder des questions de tactique militaire ni de
stratégie, auxquelles elle n'a rien voir et qu'elle
ne connaît pas. Du reste, si elle était tombée
dans ce travers, un ridicule ineffaçable se serait
attachée elle et la législature serait devenue
la risée des hommes spéciaux, pour avoir voulu
Feuilletou.
sas
C'était le 20 janvier 1705. Les Français venaient de faire leur
entrée daus Amsterdam; les fusils étaient encore rangés en faisceaux
sur les places, et les soldats, groupés autoi£ de leurs armes, atten
daient avec patience que l'on pourvût leurs besoins et leurs lo-
gemeuts.
Malgré la rigueur de la saison, les habitants étaient tous sortis de
leurs demeures et descendus dans les rues pour admirer cette armée
de libérateurs. Le plus grand enthousiasme régnait daus la ville, et,
dès le commencement de la nuit, d'innombrables lumières avaient été
déposées sur les balcons en signe de réjouissance.
Cependant, l'extrémité du port, du côté de l'amirauté, s'élevait
une petite maison dont l'aspect sombre et silencieux contrastait
avec l'extérieur des maisons voisines. Une cour étroite, mais entre
tenue avec soin et fermée, du oolé de la rue, par un mur et par une
porte oochère, précédait l'entrée de celte demeure.C'était l'habita
tion de maître Woerden.
Maître Woerden était un riche négociant hollandais. Exclu
sivement préoccupé de ses affaires commerciales, il était resté tout
fait indifférent aux événements politiques qui se passaient alors dans
son pays; d'un autre côté, il comprenait trop bien l'économie
domestique pour faire participer ses croisées au Juxe d'éclairage
que ses compatriotes avaient cru devoir déployer.
A fhenre dont nous parlons, maître Woerden était donc assis
tranquillement dans un vaste fauteuil garni de coussins, devant une
large cheminée au fond de laquelle brûlaient lentement quelques
rares morceaux de bouille. Sa longue pelisse fourrée était croisée
aveo soiu sur sa poitrine, et sa casquette de loutre enfoncée fort
avant sur son front déjà dégarni de ses cheveux blaucs.
Sur une table, près de lui, se trouvait une petite lampe en cuivre
fort luisante, un grand pot de bière et une pipe de terre blauche,
encore vierge des lèvres du fumeur. A l'angle de la cheminée était
accroupie une vieille servante, dont l'embonpoint révélait l'origine
flamande, et qui s'occupait, dans un respectueux silence, repousser
dans le foyer les petits fragments de charbon qui lombaieut sur le
parquet.
Tout-à-coup, le bruit d'une clochette se fit entendre. A ce bruit,
la servante se releva vivement.
Qui peut sonner cette heure? dit le vieux commençant. Allez
ouvrir.
La servante sortit, et quelques instauts après, un grand jeune
homme entra dans l'appartement. Il jeta son manteau sur un
meuble, et, s'étant approché du vieillard
Bonjour, père, lui dit-il.
Gomment c'est vous, Guillaume? Je ne vous attendais pas
sitôt.
J'ai cependant quitté Broek ce malin; mais les routes sont tel
lement encombrées de groupes fugitifs, que nous sommes restés toute
la joui née eli voyage.
Eh bien! avez-vousvu Van Elburg?
Le jeune homme but un verre de bière, et s'assit, lui aussi, devant
le feu.
Oui, mon père, maître Van Elburg oonsent toujours mon
mariage; mais il persiste ne vouloir donner que quatre mille
ducats pour dot sa fille.
Ah! s'écria Woerden, en fronçant ses gros sourcils blancs; eh
bien! il gardera sa 611e et son dot.
Oh!... mou père
Tai*ez-vous, Guillaume; votre âge on sacrifie tout «on
amour, et l'on dédaigne la fortune; mais l'amour passe, voyez-vous,
et l'argent reste!
Mais, mou père, M. Yan Elburg est un des plus riches négo
ciants de la Hollande, et ce qu il ne veut pas donner durant sa vie,
il faudra bien qu'il le laisse après sa mort.
Eh parbleu! répondit maître Woerdenen se découvrant, je
ne suis peut-être pas riche, moi aussi? Ecoutez, mon 61s; vous allez
bientôt me succéder dans mon négoce; rappelez-vous bien les deux,
principes que je vais vous enseigner jamais il ne faut donner plus
qu'on ne reçoit, ni faire des affaires pour le seul proht des autres.
Aveo cela on réussit toujours dans le commerce, et par conséquent
dans le mariage.
Mais...
Maintenant, mon 61s, n'en parlons plus.
Guillaume connaissait trop l'entêtement et l'absolutisme de son
père pour insister davantage; néanmoins, il ne put dissimuler si bit»