Msaraissant ie Hamedi. l'union fait la force.
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Journal liberal démocratique d'Ypres et de FArrondissement
Marguerite Coppin.
Le cas Ahmed-Riza.
Un État dans l'État.
Saniedi, 4 Décembre 1897. 5 centimes le numéro. 4e année.i\0 4.
PRIX DE L'ABONNEMENT
pour la ville, Par an 3 francs.
pr la province, Par an fr. 3-5O.
Lettres de Ia cilé lloiente.
John Herschel, dans son Discours
sur la Philosophie Naturelle s'expri-
me de la fagon suivante
L'observateur scientifique, quel
que soit son propre département, doit
tenir les yeux ouverts, afin d'ètre frap
pé aussitöt qu'un fait, quelconque s'ac-
complit, qui, selon les théories reques,
n'aurait pas du s'accomphr car ces
faits mêmes sont les indices qui con-
duisent a des découvertes nouvelles.
II est certain qu'un grand nombre de
savants, et une quantité innombrable
de demi-savants feraient bien de se
pénétrer du principe énoncé par i'illus-
tre Herschel. Fiers des résultats acquis
en vertu des principes connus, ils rap
portent tout a ceux-ci, nient ou dédai-
gnent l'mexplicable, et retardent 1a
marche en avant de ia compréhension
humame.
Pourtant, que de mystérieux intan
gible aux procédés connus, inexplica
ble par les théories posées, que d'in-
compréhensible nous entoure C'est
Newton qui disait que nous sommes
comme des enfants ramassant des cail-
loux au bord de l'immense océan de
Yérités qui git inexploré devant nous.
Depuis Newton, nous avons ramassé
assez de cailloux pour fournir aux sa
vants officiels de quoi jeter la pierre
aux savants officieux mais sommes-
nous beaucoup plus avancés que celui
qui découvnt les lois de la gravitation
universelle
Quelle notion a paru plus absurde
que celle de transporter ia pensée hu-
mained'un cerveau a l'autre sans au-
cun moyen maténel de communica
tion
Les croyants afiirmaient l'existence
d'une communion spirituelle et nupti-
que entre les deux esprits les savants
refusaient péremptoirement aucune foi
a l'assertion toute entière.
dependant, cette même question,
exammée de bonne foi et sans parti
pris, est résolue aujourd'hui On sup
pose que la transmission s'opérait,
comme dans les cas lumière, chalenr,
son, par ia vibration moléculaire d'un
intermédiaire quelconque, que proba-
blement, elle serait réfléchie par des
miroirs métalliques, et qu'ainsi on
pourrait concentrer en un foyer la
réflexion matérielle de l'idée et l'ap-
porter a même d'être étudiée. Deux
personnes expérimentées furent pla-
cées aux deux foyers de deux miroirs
concaves se regardantchacune regar
dant le miroir, et munie d'un sac plein
de numéros.
L'un des expérimentateurs fixa son
attention sur un des numéros l'autre,
presque aussitöt devint conscient d'un
nombre qu'il fixa. Après 15 expérien-
ces, 6 furent trouvées concluantes. La
transmission de dessins, pensée par
l'un d'eux, fut moins heureuse. Mais
ils ne marquèrent que dans les cas
d'erreur, le dessin représenté comme
transmis par le récepteur commenqait
toujours par la même syllabe que celui
qui aurait dü être représenté.
Ceci inaugura une nouvelle série de
recherches. Y avait-il une transmission
de mots, de l'un foyer a l'autre?...
L'expérience répétée,on découvrit que
l'un des expérimentateurs entendait au
foyer du miroir les sons produits in-
volontairement par l'autre, bien que
bouche close, etsans qu'un tiers, placé
a cöté de lui, put relever ni son, ni
mouvement.
Ceci fut appelé Le murmure na
sal
Done la fameuse expérience de Cum
berland, qui fit tant de bruit, a été
prouvée comme étant le résultat de la
tendance forcée d'aller a l'objet pensé.
Ici, on prouve la tendance invincible I
d'exprimer la pensée par le son.
A preuve des singulières découvertes
amenées par des incidents, voici un
livre nouveau paru en Angleterre, par
Barrett, a propos des Recherches Psy-
chiques On s'y occupe beaucoup de
la Baguette divinatoire C'est la fa
meuse baguette de coudrier qui révèle
au sorcier les sources cachées et les
trésors enterrés
Voici ce qu'en dit un parfait scepti-
que, le géologue Whitaker
Le sorcier, ayant entre chaque
doigt et le pouce un fer a cheval d'a-
cier, se promena quelque temps, nous
disant qu'il découvnrait ainsi l'eau
aussi bien que les métaux. Comme ce
fer a cheval s'agitait entre ses doigts,
il saisit une forte baguette de cou
drier, en forme de fourche, et serrant
les coudes contre le corps, il laissa s'a-
giter et se débattre cette baguette, qui
avait l'air enragé. Après une véritable
lutte entre l'homme et la baguette,
celle-ci se rompit en deux et le sorcier
tomba exténué dans nos bras. II nous
dit que son coeur battait a briser. Cer-
tainement, la ou. était tombée la ba
guette, existait un ruisseau.
Après cela, du même procédé, il dé
couvrit une source prés de la portedu
vestibule. Puis deux autres dans les
champs. 11 nous dit chaque fois la pro-
fondeur et la direction du cours d'eau.
Un avocat et moi essayames de tenir
•les mains du sorcier un vieillard
pendant les contorsions de la baguette;
nous fümes rejetés. Le sorcier nous dit
que c'était un don, qu'il reqoit sans
pouvoir l'expliquer.Après, on décou
vrit ainsi, le sorcier étant privé de la
vue par un épais bandeau, une montre
en or, perdue et une autre source.
Devant ces faits, MBarrett examina
les causes. Le professeur suppose que
l'eau cachée se découvre par quelque
eftet au sorcier, et que les contorsions
de la baguette sont causées par les con
tractions musculaires mvolontaires du
médium. M. Holmes déclare que ie sens
de la proximité de l'eau est aussi natu
rel que le sens de la proximité d'un
animal, ou d'une odeur, ce qui est fré
quent et prouvé. Un fait sur est que
nul sorcier ne trouve d'eau sans la ba
guette de coudrier. Celle-ci serait done
de transmission facile, comme ie fer
pour la chaleur, etc., etc.
Maintenant, y a-t-il relation entre
les expériences de la transmission de
la pensée, et celles-ci Un raffinement
du sens de l'ouïe permet-il a certains
êtres de recevoir inconsciemment i'im-
pression d'eau courante, comme ie ré
cepteur des premières expériences en
tendait inconsciemment, le murmure
nasalPourrait-on essay er des mi
roirs concaves, ou de quelque appareil
ressemblant au stéthescope
Ces questions sont intéressantes au
double point de vue de la science ac-
tuelle et de ses progrès, et de la science
du passé et de ses erreurs. Pauvres sor-
ciers et sorcières qui turent brulés,
pendus, écartelés, ensevelis par les fa-
natiques ignorants qu'abusaient, et
l'esprit de parti, et ia bonne foi de
leurs victimes elles-mêmes, peut-on
sans vous plaindre suivre des yeux les
grotesques préjugés, les aveugles argu
ments des fanatiques de nos jours
0 science, lumière, ton règne est ce
lui de la liberté et de la justice.
Bruges, 29 Nov.
LES ERREURS DE M. BEGEREM.
II n'est pas trop tard pour revenir
encore sur cette affaire Ahmed-Riza,
oü ia liberté de presse est en jeu niée
par M. Begerern quand un étranger
croit pouvoir en profiter, entravée par
M. Vandenpeereboom qui interdit la
vente du Peuple dans les gares, la li
berté de presse - cette peste et ce dèli-
recomme disent les papes sera
peut-être un de ces jours enlevée aux
Beiges eux-mêmes par une mesure ad
ministrative quelconque.
Pour expliquer son ukase, M. Bege
rern a dit pis que pendre du journalis
te turc sur qui la süreté publique s'est
livrée a un chantage non déguisé.
M. Ahmed-Riza rétablit la vérité
dans une lettre a VEloile beige dont'
voici quelques passages
M. Begerem a prétendu que le Mech-
veret turc était un organe d'injures et d'ou-
trages, et que son langage était plus violent
que celui du supplément francais. C'est faux.
Dans l'une et l'autre éditionles mêmes prin
cipes sont défendus et cela dans le même
langage.
A cause de ce inême langage violent, a dit
encore M. Begerem,la publication du Mech-
veret turc a été interdite en France. C'est
la circulation et non la publication de cette
édition qui a été interdite et cela non a cause
de son langage plus ou moins énergique.
mais tout simplement pour des considéra-
tions d'ordre diplomatique.
M. Begerem a soutenu, sans doute sous
i'inspiration de M. Carathéodory, que j'a-
vais insulté ce dernier. J'ai blamé, il est
vrai, la conduite de certains représentauts
du Sultan qui, oublieux de leur dignité di
plomatique, s'abaissaient jusqu'a se faire les
agents policiers d'Abdul Hamid. En agissant
ainsi, ai-je dit, ils sacriflent a leurs propres
intéréts, les intéréts et l'honneur de leur
pays. Je lui rappelais qu'il était de leur de
voir d'éviter toutes les affaires oü la dignité
du gouvernement pouvait être exposée aux
attaques de l'étranger. J etais loin de m'at-
tendre a ce que Carathéodory Effendi voulüt
se mettre sur la liste des personnes visées.
Mo comparant a un vulgaire pick-pocket,
M. Begerem a prétendu aussi que j'avais
déclaré dans mon interrogatoire que je vio-
lerais la loi beige. Mon interrogatoire est si-
gné je n'ai jamais tenu ce langage. J'ai
dit, au contraire, que si une loi beige m'in-
terdirait de publier mon journal a Bruxel
les. je tn'y soumettrais respectueusernent.
Je defie, d'ailleurs, M. le ministre de trou-
ver, soit dans eet intorrogatoire, soit dans
mes publications, soit dans ma vie entière
un mot, un acte justifiant que je ne suis pas
un homme paisible et inodéré. (1)
Après avoir ainsi dénaturé la vérité, M.
Begerem a njouté qu'il n'entendait pas sacri-
fier les intéréts des citoyens beiges, en
Turquie, a un Ahmed-Riza. II ne s'agit pas
ici de ma petite responsabilité, mais de la
cause que je défends et qui est celle de tous
les peuples civilisés. D'ailleurs les étrangers I
sont couverts chez nous par les capitulations I
et n'ont done rien, absolument rien a crain-
dre de la part du Sultan. Affirmer que l'in-
térêt commercial doit seul guider la politi
que d'un gouvernement, n'est-ce pas pré
senter le peuple beige aux yeux des nations
étrangèras comme plus soucieux de ses in
téréts matériels que de son bon renom de
fierté morale
Rien ne reste debout des raisons de
fait que M. Begerem a invoquées a
l'appui de son arbitraire elles étaient
toutes fausses. Voila une foia de plus
mis en relief le manque de scrupule
que nos trés chrétiens ministres met
tent au service de rnauvaises causes.
La confession efface tant de faussetés...
Quant aux raisons de principe en
vertu desquelles M. Begerem s'arroge
le droit de supprimer la liberté de
presse pour les étrangers, la Constitu
tion est la pour les condamner formel-
lement la preuve en a été faite a la
Chambre.
(1) M. Delatour, directeur-général de la Sü
reté publique, m'avait dit, a deux reprises,
que j'avais eu lort de compter sur la liberté de
la presse et sur l'hospitalité beige. M. Be
gerem le nie, moi je l'alïirme et je le jure sur
mon honneur.
ANNONCES
Annonces 10 centimes la ligne.
Réclames25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
Sous ce titre, la Justice Sociale publie
un bel et éloquent article qui signale
le danger que l'institution de la süreté
publique fait, courir aux iibertés con-
stitutionnelles. Nous en reproduisons
volontiers les principaux passages
Aujourd'hui que le débat est terminé,
nous entendons tirer la moralité si mo-
ralité il y a de cette aventure adminis
trative et parlementaire.
Cette moraiité, la voici II existe en
Belgique, au-dessus de la loi, au-dessus du
Parlement, une institution qui se moque de
la loi et qui se contremoque du Parlement,
et cette institution s'appelle la Süreté
publique.
II est permis a ce nouveau Conseil des
Dix d expulser brutalement un ingénieur
honorable comme M. Antoine, paree que
celui-ci a eu l'audace de raconter en un livre
net et documenté ce qu'ont été les massa
cres JArménie il est permis a ces argou-
sins d'interdire a M. Ahmed-Riza l'exercice
d'un droit qui appardent en Belgique a tout
homme, en vertu de l'article 18 de notre
pacte fondamental... Demain, il lui plairait,
en vertu de l'arbitraire qui est désormais sa
loi, de défendre aux nombreux étrangers qui
honorent 1'enseignement universitaire et
congréganiste en Belgique, de poursui-
vre leur enseignement il lui plairait de
défendre aux anglicans ou aux calvinistes
qui viennent en Belgique, de professtr leur
culte, qu'aucun des membres de la majorité
conservatrice de Mercredi ne serait en droit
de blamer ia Süreté publique sans se contre-
dire outrageusement.
Qu'on ne dise pas qu'en toute circonstan-
ce, la légalité des décisions de la Süreté
publique reste garantie par la responsabilité
ministérielle et le controle des Chambres.
Ce sont Ia, désormais de bons billets La
responsabilité d'un ministre est bien a l'aise
quand il sait qu'au moindre de ses éternü-
ments, une majorité de mamelouks est toute
prête a répondre en s'inclinant jusqu'a
terre Allah vous bénisse
Jadis, les gouvernants et les parlementai-
res catholiques avaient une autre allure, et
lorsque des souverains étrangers, plus puis-
sants cependant qu'Abdul Hamid l'Assassin,
les incitaient a, violer en leur faveur, les li-
bres institutions de la Belgique, ils ne se
laissaient pas dévoyer par la peur, ni lier
par les grands cordons. Le mot historique
de Vilain XIIII Jamais mérite d'être
opposé aux pleutreries d'aujourd'hui.
Que devra-t-on, qu'a-t-on dit pourjusti-
fier le régime de faveur que les pachas de
Süreté ont inauguré en faveur d'Abdul
Hamid Invoque-t-on le sang des trois cent
mille chrétiens que ce boucher fremblant a
fait étriper ou assommer dans les vilayets
d'Asie Mineure
Non, on préfère hausser les épaules,
invoquer en termes vagues des convenances
et des intéréts problématiques a ménager,
et pourfinir, on stigmatise les démocra-
tes chrétiens, ces éternels empêcheurs de
voter en rond.
Et la Süreté publique, adoptant désor
mais en toute sécurité le régime du bon
plaisir dont elle aurait vraiment tort de se
départir, continuera a se moquer de la loi
et a se contremoquer du Parlement, jus-
qu'au jour sans doute oü ce dangereux Etat
dans l'Etat jouera de nouveau au parti ca-
tholique quelque méchant tour, dans le genre
de la machination Pourbaix.
On ne pourrait; mieux prêcher dans
le desert.
La di'oitc ct les massacres d'Armenie.
Le Journal JYpres prétend que, a
propos de i'expulsion Ahmed-Riza, le
gouvernement et la droite n'ont pas
approuvé les massacres d'Arménie.