BILLET
PARLEMENTAIRE
politique
agricole
de l'autriche
a la baltique
SAMEDI 9 DECEMBRE 1939
HEBDOMADAIRE
92me ANNEE No 48
Administration Rédaction 163, Chaussée de Ghistelles, St ANDRE-lez-BRUGES
Publicité 10, Rue St Georges, Bruges.
Abonnement 30,Fr. l'an. C. C. P. 367.225
Le numéro 60 centimes. Téléph. 3 1 5.24
Il n'est pas sans intérêt de faire un
petit tour d'horizon dans le domaine
de l'agriculture, et surtout pour notre
province qui est avant tout une pro
vince agricole. Quelle influence la si
tuation a-t-e!le eue sur l'agriculture
en Westflandre
D'abord, et on le comprend aisé
ment, le lin a retrouvé sa prospérité.
Splendide monnaie d'échange, d'ail
leurs fort bien utilisée sur le marché
de Courtrai, le lin trouve aisément
preneur. La demande est continue et
les prix sont intéressants. Cependant
nous ne croyons pas pour le pays une
forte augmentation de la production.
Il en est de même pour le houblon.
Celui-ci s'est bien vendu sur le mar
ché de Poperinghe, et l'heure ac-
tuel'e la récolte 1939 est enlevée un
prix qui compense ceux des années
précédentes.
Le tabac a très bien donné, et, fort
probablement, sera cultivé l'an pro
chain sur une plus grande étendue.
La cossette de chicorée dont le
cours trop faible l'an dernier, aux en
virons de 70 francs, était déficitaire,
se stabilise cette année vers les 105
francs.
La betterave sucre donne, pour le
fermier, un maigre rendement. Le de
gré de sucre est faible, et l'arrachage,
rendu difficile dans beaucoup de cas
par la mobilisation, a en outre été en
travé par les fortes pluies. Plus d'un
champ est transformé en bourbier et
on ignore comment il sera possible d'y
travailler. Ces multiples inconvénients
et la médiocrité du rendement n'inci
teront pas les agriculteurs augmen
ter la superficie de la culture bettera-
vière l'an prochain
Mais les deux graves problèmes qui
doivent retenir l'attention sont, d'une
part le cheptel et d'autre part les cé
réales. Pour le cheptel les renseigne
ments que nous avons reçu sont très
mauvais. Quoique le prix de la viande
reste, pour la ménagère, aussi élevé,
le bétail sur pied se vend mal, et sur
tout le cheptel porcin. Le prix des
fourrages n'encourage pas le fermier,
dans ces conditions accroître son bé
tail, et énormément de jeunes porce
lets sont abattus et vendus des prix
dérisoires. De ce côté nous nous pré
parons de sérieuses déconvenues.
Quant aux céréales la politique
d ensemencement obligé, dirigé ou
orienté du gouvernement s'avérera un
complet échec.
Pour obtenir une plus grande su
perficie de céréales, il eut suffi au
Souvernement d'indiquer un prix qui
'endait ces cultures intéressantes. Au
tomatiquement le nombre d'hectares
ensemencés eut augmenté, condi-
,'on bien entendu que les agriculteurs
es grosses exploitations puissent di-
''9er les travaux. A cause du mauvais
emps très peu d'ensemencement sont
erminés, et, on annonce que les con-
9es agricoles ne seront plus accordés
mobilisés les ensemencements
.?t terminés.
est encore temps de porter remè-
e 0 la situation. Que le gouverne-
•e?f hxe immédiatement le prix des
1reaies pour 1940 en tenant compte
Vr Cout de la production... et il ne de-
nist -S en*°yer des circulaires admi-
ratives inappliquables pour obtenir
e eugmentation des emblavures.
Mardi dernier la Chambre a commence
l examen du budget des voies et moyens
pour 1940 et celui des nouveaux projets
d'imoôts.
Comme prélude, un concert deux or
chestres celui des communistes dominé par
ta t'ombonne de L"haut et te piston de Re-
lecom, acclamant le père Staline et ses gar
des rouges. L'autre orchestre, celui de la ma
jorité, criant son admiration pour la victime
et sa colère vis-à-vis de l'agresseur Vive
la Finlande
J'entends du côté de la gauche socialiste
des voix qui crient dans la direction de la
cohorte communiste salaud ordure
Ce n'est pas très parlementaire, mais fran
chement Lahaut et ses amis auraient dû faire
preuve d'un p"u de pudeur.
Il appartenait au Premier ministre et
notre chancelier de l'échiquier de dresser le
tableau de la situation économique et finan
cière du pays et de présenter la justification
des nouveaux impôts.
Deux discours, deux tempéraments, deux
méthodes. Monsieur Pierlot est incontesta
blement un caractère. Il dit des choses ex
cellantes. Il est tenace et têtu comme un ar-
dennais. Est-ce la responsabilité qui l'écrase,
l'impossibilité pour son tempérament de
s'enlever d'un coup d'aile Son débit man
que de vie. Il occupe la tribune, tenant
la main une liasse de feuillets, de temps en
temps i fixe le plafond et le déroulement des
phrases continue monotone. Il ne parvient
pas capter l'attention de la Chambre, l'on
se croirait parfois dans une mortuaire. Ses
collègues ministériels sont là par déférence
pour écouter le premier, qui tes a pris dans
son équipe. J'en vois plus d'un qui secoue
la tête semblant dire si c'était moi
Le Premier ministre a parlé deux heures. Il
aurait suffi d'une demie heure, mais pour
terminer le coup de clairon du chef.
Gutt lui succède la tribune. Lui, c'est le
magicien financier.
L'organe est désagréable, l'homme n'a pas
grande apparence. N'importe, la clarté de
l'exposé et l'art de la narration sont tels qu'il
parvient capter l'attention de la Chambre
et l'intéresser des questions de chif
fres, qui se prêtent fort peu des dévelop
pements oratoires. La corporation des méde
cins et des avocats passe dans son discours
un mauvais quart d'heure.
Trois cents déclarations de revenus pré
sentées par les défenseurs de la veuve et des
disciples d'Esculape trois cents bourgeois
qui ta corde au cou glissent silencieusement
dans te cabinet du contrôleur et avouent
avec contrition Augmentez ma déclara
tion de dix cent pour cent
Du Gutt intégral En voici Vous re
prochez au gouvernement de ne pas faire
d'économies voulez-vous des coupes som
bras en matière d'enseignement de la dé
fense nationale de traitements de pen
sions Allons, Messieurs, mettez-vous
d'accord.
Par ci par là des mouvements le minis
tre sourit il a gagné la partie.
Quand Israël est Roi décidément les
juifs sont forts. Gutt est si habile, qu'il se
rait de taille avaler tout vif le contribua-
ble.
Chapeau bas pour Monsieur Gutt. Il est
la grande vedette de ces débats.
Mercredi ta Chambre a continué la discus
sion des budgets et des impôts financiers. Ne
d mandez pas un chroniqueur parlemen
taire de suivre distraitement le cortège des
mandatés qui apparaissent la tribune.
Voulez-vous des instantanés
Voici Truffaut qui représente la jeune
génération socialiste. Petite taille, visage
pâle, un air de gamin intelligent. La cible
qu'il vise les cultivateurs, qui échappent
d'une façon massive au paiement de l'impôt.
Le drapeau qu'il brandit celui de la classe
ouvrière, pour qui les réformes sociales sont
toute la patrie et qui se dress ra farouche
pour écarter les manœuvres réactionnaires.
La haine qui le secoue celle des trusts fi
nanciers, qui font du Congo leur chasse ré
servée. Spaak et Merlot suivent attentive
ment leur jeune poulain, dont les ruades ne
sont pas trop dangereuses et ne mettent pas
le gouvernement en danger.
Voici Elias, porte-parole des nationalistes
flamands. Taille élancée, figure de garçon
bien portant qu'illumine de temps en temps
un regard railleur. Au reste avocat retors,
qui d'une façon modérée critique en homme
d'opposition, ta politique gouvernementale.
Georges Michaux, président de la droite
wallonne ne pouvait pas ne pas parler. Jo
vial et malin notaire, amateur de bons mets,
et, comme tour wallon qui se respecte des
bons vins, connaissant tous les détours du
contrat de mariage et de la législation fis
cale. N'est-ce pas lui qui me disait un jour
en réapparaissant la Chambre après une
éclipse de trois ans J'ai eu une forte
émotion en revoyant la tribune
Le leader communiste Relecom se lève
son tour. Il a certainement une glande qui
distille la haine et l'envie.
Quel danger qu'un avocat qui, aigri par
les rigueurs d'un régime capitaliste, se laisse
embrigader dans les rangs d'un parti révo
lutionnaire Démagogie pure qui pouss"
la révolte le mobilisé qui veille la frontière,
le fonctionnaire dont le traitement est réduit,
le chômeur qui cherche du travail, bref tous
ceux sur qui pèsent les misères de notre si
tuation actuelte. Il a réalisé la gageure de
mettre en colère tous les partis de l'assem
blée. N'a-til pas récidivé en plaidant la cau
se Russe dans son conflit avec la Finlande
Mon impression plus que jamais le com
munisme est un danger public, parce qu'une
agence d'exploitation de tous les méconten
tements, de toutes les rancœurs, de toutes les
inégalités sociales. Les communistes Des
incendiaires qui parcourent la torche la
main les corrons et les fabriques.
Dewinde représente la vieille droite con
servatrice, ne connaissant que le chiffre, ne
se laissant pas griser par la cadence des bel
les phrases, fervent de la finance orthodoxe.
Je songe au vieux bâtonnier janséniste dé
crit par Bordeaux, qui d'une voix bien pe
sée, mais sans passion et véhémence laisse se
dérouler avec élégance les phrases d'une lan
gue châtiée.
Emportons pour cette semaine notre ap
pareil photographique, en gardant de ces
débats l'impression que le gouvernement
aura partie gagnée.
Les quittances de réabonnement LA PATRIE
seront présentées ces jours-ci. Nous prions nos
lecteurs, de leur réserver bon accueil et de don
ner leurs instructions afin que ces quittances
soient payées la première présentation.
par
Louis HABRAN
La Finlande restera dans l'histoire comme
la plus héroïque et la plus tragique victime
.des fautes des vainqueurs de 1918 et des
mortels caucus de Genève. Mais la Belgique,
dont la position géographique est terrible
ment exposée et la position diplomatique
exceptionnellement délicate entre trois des
principaux belligérants et les garanties con
ditionnées qu'ils lui ont accordées, ne peut
cependant, par réflexe sentimental ou pas
sionnel, ni par entraînement des propagan
des L'engrenage saisit les neutres écrit
le directeur du Jour-Echo de Paris
chercher un désastre pour réparer des er
reurs et des manquements dont elle n'est pas
responsable.
Voyons les faits.
Les journaux consacrent des colonnes
qualifier l'agression des Soviets contre la
Finlande. En stratégie militaire et diploma
tique, le cas est cependant simple l'ordre
européen reposait sur la victoire remportée
en 1918 par l'Angleterre, la France et l'Ita
lie coalisées, sur la répartition des territoi
res des vaincus, organisée par le traité de
Versailles et les traités connexes, et sur le
pacte de la Société des Nations lié au traité
de Versailles de manière que l'échec du pacte
devait entraîner l'écroulement de l'architec
ture politique élevée par le traité. Ce traité
avait démembré l'empire russe en Occident,
le refoulant des rivages de la Baltique et du
golfe de Botnie, de la Russie Blanche et de
l'Ukraine occidentales, de la Vistule, de la
Bessarabie, et lui fermant les détroits médi
terranéens.
Aujourd'hui, après que les vainqueurs se
furent divisés, après que l'Angleterre et la
France se furent, dans une circonstance mé
morable, désolidarisées de l'Italie, après
qu'elles eurent accepté le concours du com
parse moscovite dans le conflit espagnol,
après les défaites sans combats, mais réelles,
qui s'ensuivirent pour elles en Rhénanie, en
Ethiopie, en Autriche, en Tchécoslovaquie,
en Albanie, en Pologne, elles font figure de
vaincues et elles ne pourront reprendre leur
ton, leur autorité, leurs manières et décisions
de 1918 que si elles remportent une nouvel
le victoire militaire. Mais dans l'entre-temps,
les petites nations qu'elles avaient appelées
ou rappelées la vie il y a vingt ans et qui
s'appuyaient sur leur force et sur leur pres
tige, disparaissent de la carte. Les vaincus
prennent leur revanche l'écroulement de
Versailles s'effectue tragiquement sous nos
yeux. Et aujourd'hui c'est sur les rivages de
la Baltique qu'un des ex-vaincus opère son
redressement.
Nous disons redressement puisque,
jusque maintenant, ce n'est qu'à l'intérieur
des frontières de la Russie impériale que l'U.
R. S. S. s'agrandit et ce titre, les Soviets
se nationalisent et font figure de restaura
teurs en réparant les brèches causées au ter
ritoire par les défaites du tsarisme. Ils n'en
sont encore qu'à ce stade de leur évolu
tion. L'avenir dira si, comme la Révolution
Française, ils projetteront leur force au de
hors, et si ce sera principalement sur l'Asie
ou sur l'Europe.
A un point de vue moins général, l'effa
cement des Etats baltes sortis de Versailles
Lituanie, Lettonie, Estonie, Finlande
leur subordination la politique russe, sont
le résultat de la politique de la Pologne
l'égard de ses voisins et de la politique de
l'Angleterre et de la France l'égard de
l'Allemagne et de la Russie.
Le bouclier avancé de la Pologne contre
l'Allemagne, c'était 'Autriche, c'était le qua
drilatère de Bohême ceinturé de puissantes
fortifications naturelles et techniques, occu-