JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
VPRES, Dimanche
Septième année. N° 14.
4 Avril 1869.
PIÏIX D'tBOllGüIEIT
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Le proces de St-Cténois et la loi de imi.
Le payss'impose, depuis une vinglaine d'années,
des dépenses trés considérables en faveur de l'en-
seignement primaire. II ne s'en plaint pas, il est
prêt h en faire de plus considérables encore, mais
il commence a se demander si les résultats obtenus
jusqu'a ce jour sont bien en rapport avec les sacri
fices énormes qu'il s'est imposés et si, par hasard,
les millions qu'on lui réclame et qu'il paie, cha
que année sans marchander, ne seraient pas jetés,
en pure perte ou a peu prés, dans le gouffre in-
sondable de l'ignorance.
Nous ne croyons pas qu'un peuple puisse jamais
acheter tropcher son affranchissement moral et in-
tellectuel. Nousconsidérons l'enseignement comme
un des premiers devoirs de l'Etat, et nous tenons
que ce dei oir doit être rempli, quoi qu'il en coüte.
Ce n'est pas une raison, pourtant, pour que nous
jetions notre argent par portes et fenêtres et que
nous nous refusions le droit d'examiner s'il est
utilement employé a sa destination.
Cette question se présente tout naturellement
I'esprit quand on parcourt les débats qui se dé-
roulent en ce moment devant la Cour d'assises de
notre province. Voiia une commune importante,
St-Génois, oü règne encore, après vingt-cinq ans
d'enseignement fourni par la loi de 1842, la plus
honteuse, la plus abjecte superstition a ce point
qu'en réfléchissant aux événements dont cette com
mune a été le théètre, on a peine concevoir que
de telles choses soient possibles dans un siècle ci-
vilisé. N'est-ce pas, en véi ité, se uroire rejeté en
plein moyen ège, de voir ainsi toute une popula
tion mise en érnoi par les prédications rididules de
quelques idiots tonsurés Peut-on se figurer des
maiheureux encorece point crétinisés d'imaginer
que la colère de Dieu va s'appesantir sur eux
paree qu'il plait a M. Faict de ne pas permet Ire
leur curé de jeter un peu d'eau bénile sur leur
cimetière
Ces idiots, ces crétins, qui nous font hésiter
entre l'horreur et ia pitié, iIs ont fréquenté les
écoles, pourtant la plupart sont de ceux que les
statistiques officielles classent parmi la partie let-
trée de la population. Si c'est pour arriver a de
tels résultats que nous dépensons chaque année
piusieurs millions, il faut convenir qu'il n'en vaut
pas la peine.
Ce n'est pas a renseignement de l'Etat, c'est
I influence délétère du clergé, nous dira-t-on,qu'il
faut demander compte de l'abjection inteilectuelle
de ces populations. Hé! sans doute mais ne
voit-on que la loi de 1842, loin de la combattre
cette influence pernicieuse, lui donne une consé-
cration nouvelle
Quoi vous reconnaissez que le clergé n'a en
vue qu'une ambition celle de retenir les popula
tions dans l'ignorance et dans la superstition, ces
deux piliersfondamentaux desa puissance et non
contents de lui gararitir la liberté constitutionnelle
commune a tous, vous lui ouvrez la portë de vos
écoles et vous lui permetlez d'y aller contróler
votre propre enseignement, celui que vous entre-
tenez, grands frais, précisément pour neutraliser
son influence Vous voulez que l'intelligence de
l'enfant s'affranchisse de bonne heure du jong cle
rical vous voulez que, sorti de l'école, eet enfant
ait appris penser par lui-même ou tout au moins
que l'instrument de sa pensée soit en état de fortc-
tionner librement,et dans cette école, au-dessus de
l'instituteur quevousavez chargé de cette mission,
vous placez le prêtre, dont vous vous défiez, qui
vous fait peur En vérité, qu'on nous pardonne
l'expression, c'est par trop béte.
La presse doctrinaire s'indigne de la conduite
du clergé dans les affaires de St-Génois. Nous
partageons son indignation mais elle aura beau
faireaussi longtemps que Ie clergé sera dans
l'Etat un ordre privilégié, subsidié par le budget
et jonissant d'immunités de toute espèce, il exer-
cera sur les ètnes une influence que la Société
civile ne parviendra jamaisècontrebalancer. Quant
a espérer que le clergé fasse tourner un jour cette
influence au profit de la liberté, nous ne ferons
pas a la presse doctrinaire l'itijure de croire qu'elle
pousse la naïveté jusque-la.
N'est-ce pas une chose curieuse 1 les journaux
doctrinaires ne laissent pas passer unsenl jour sans
signaler le clergé au mépris public. Mais qu'on leur
dise Puisque que le clergé est aussi mépri-
sable que vous le prétendez, unissez-vous nous
pour demander que l'accès des écoles lui soit
fermé. Aussitót ils battent en retraite et s'é-
crient que le moment n'est pas venu.
Quand le moment sera-t-il venu Mori Dieu,
e'estbien facile a dire le moment sera venu quand
le parti clérical triomphant aura chassé les doc
trinaires du pouvoir. Alors, on les reverra comme
on les a vus chaque fois que la fortune électorale
les a rejetés dans l'opposition, s'armer en guerre
contre la loi de 1842 et demander a grands cris
l'exclusion du clergé des écoles publiques. Au
besoin, on rêuriira un nouveau Congrès libéral et
on proclamera, comme en 1846, I'urgence de
celte réforme; sauf n'en plus parler et en
injurier ceux qui prendraient l'audace de leur rap-
peler leurs promesses, Ie jour oü un nouveau re-
virementdu scrutin leur aurait rendu la possession
du pouvoir. Heureuserneut ce vieux truc doctri
naire a fait son temps. Le jour oü l'on voudra le
remettre en scène, la Belgique tont entière rira au
nez de ces vieux comédiens fardés de libéralisme
qui lont si longtemps abusée. Quant a la loi de
1842, soyons tranquilleselle se fera malgré eux.
Tout n'est dans ce bas monde
Qu'un jeu,
Le vrai sage le fronde
Au temps-pascal, la mode et la pratique de la
duperie imposent au croyant, agenouillé devant
le guichet qu'abrite l'augure romain, la renon-
ciation ('oeuvre de Satan, sauf l'intention bien
arrêlée d'avance de recommencer le lendemain
une nouvelle série de coups de canif dans les
commandements de l'Eglise. Ainsi fait le doc-
trinarisme en tous temps. Ceci date d'hier
Le clan ministériel allait laver dans le sang clé
rical la ruade du Sénattransformée en caserne, la
Chambre beige neretentissait plus que de cliquetis
d'armes et il s'en échappait une odeur de poudre
5 faire éternuer les plus bouchés. Résolutious
de confessionnal que tout cela!... A la première
mêlée, propos de listes éleetorales, le général
Pirmez baisse piteusement pavilion, s'humilie bien
bien bas, et s'enfonce nouveau et un peu plus
profondément dans Ia vase de la modération et
de la conciliation.
Au temps de Boileau, le naturel, pour revenir,
prenait un modeste galop; de nos jours ii em-
prunte la télégraphie électrique tant le
doctrinarisme est pressé d'étouffer le libéralisme,
tant il éprouve une béate jouissance s'adminis-
trer publiquement la discipline! Nous l'avons
prédit, paree que nous connaissons les apótres et
que la longue pratique de M. Vandenpeereboom
nous a initiés a toutes les roueries des Bertrand de
la haute politique plus fort ils crient et moins
ils s'exécutent. Cela s'appelle, en termes du
métier, une manoeuvre aussi habilement concue
que bien exécutée les honnêtes gens n'y voient
qu'une escobarderie de plus ioscrire a l'actif
doctrinaire.
Croquignoles.
Ce siècle est Ie siècle de l'émulation et de Ia con
currence l'oeuvre engendre l'oeuvre avec une verli-
gineuse fécondilé et une inerveilleuse gradation
exemple Le corps des chanoines genuit Brillat Sa-
varin; Brillal-Savarin genuit le baron Brice; le baron
Brice genuit... Monseigneur Descharaps, archevêque
de Malines, primat de Belgique, premier moutardier