Etrennes Pontificates
oJSLS^t
Samedi 6 Janvier 1900 10 centimes ie IV0 35e Année. N2. 3511.
France
TROIS OPIÏNIONS SUR 1900
M. Charles Dupuy
Le général Février M. Ribot
La Basse Cour
Allemagne
Saint-Siège
La guerre Anglo-Boer
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Liste précédente 200.00
M' M*11* Struye, Ypres 200.00
M*"' Gontier, Ypres 5.00
Interviews de M. M. Hutin, de 1 'Echo de
Paris
Chez M. Charles Dupuy.
Qu'espérez-vous, monsieur le prési
dent, de l'année qui vient clóturer le
siècle? Sommes-nous en décadence ou
croyez-vous k l'avenir de notre pays, k tous
les points de vue?
Comment ~et pourquoi n'y croirais-je
pas? m'a répondu M. Chailes Dupuy k brüle-
pourpoint.
Pour ne pas espérer dans l'année 1900
et dans le nouveau siècle qui la suivra, il
faudrait admettre que nous sommes en déca
dence.
Or cela n'est pas. Oii voyez-vous la
décadence
Dans la science? Non, et les preuves en
sont trop évidentes pour être rappelées.
Dans les arts? Pas davantage. Les mer-
veilles que nous allons admirer k l'Exposi-
tion le montreront amplement.
La science, l'art, la littérature se renou-
vellent par une plus grande compréhension
de l'humanité et des problèmes sociaux,
mine inépuisable pour la réflexion et pour
l'expression.
11 y a, dans tout le domaine mental, un
mouvement ascensionnel.
Certes, continue avec une pointe demo
tion M. Ch. Dupuy, le siècle qui finit nous
a fait voir des choses tristes, k cóté des
grandes choses ilnousa montré des doc
trines dont lesuccès serail fait de la haine
et de l'envie réciproques descitoyens mais,
malgré tout, j'ai une foi invincible dans le
bon sens de mon pays.
Au surplus, ajoutel'homme d'Etat après
cette appréciation sans voile sur le collecti
visme, il faut compter beaucoup sur la pé
riode de l'Exposition pour amener l'apaise-
ment nécessaire des esprits.
Nous aurons k cceur de montrer aux
étrangers qui viendront nous voir que nos
discordes ne sont qu'k la surface et qu'au
fond nous sommes solidement unis dans
l'amour indivisible de la patrie et de la Ré-
publique.
Nous donnerons k tous une impression
de force, de conflance en nous-mêmes qui
dissiperont bien des équivoques et qui recti -
fieront plus d'un faux jugement.
M. le gónéral Février, ancien grand-chan-
celier de la Légion d'honneur, a répondu
par une lettre dont nous détkchons
Bientót le code de justice militaire aura
disparu et, au point de vue judiciaire, l'ar-
mée sera plus civile que militaire. Ene fois
le plan réalisé, tout deviendrait possible k
l'intérieur. L'armée, instrument politique,
strait ballottée d'une coterie k l'autre et
l'anarchie serait la situation normale. A
l'extérieur, la France deviendrait une quan-
tité négligeable. Ge serait la fin.
L'armée coüte trés cher, dit-ouet son
budget va chaque année grossissant. G'est
une des raisons qu'invoquent velontiers les
politiciens pour l'amoindrir et au besoin
pour la détruire. Sous prétexte de faire des
économies qui n'empêcheraient pas la ban-
queroute que leur ineptie a rendue inévitable,
ils préparent l'asservissement de ia France
et son irrémédiable décadence.
Si la sagesse pouvait présideraux conseils
des malheureux qui nous perdent, au lieu de
détruire l'armée qui leur a coüté si cher, ils
la conserveraient avec soin et la laisseraient
travailler en paix.
Chez M. Ribot
Vous parlez, monsieur le président,
comme si les passions politiques ne devaient
pas avoir sur le projet de scolarité que vous
combattez leur influence pernicieuse. Com
ment l'accord pourra-t-il s'établir
On sera d'accord en acceptant réso-
lument la liberté et en donnant k l'Univer-
sité elle-même la liberté et les moyens qui
lui font défaut.
Nous avons lk des réserves de force et
de dévouement que nous ne savons pas assez
utiliser. Nous rendrons k l'enseignement de
l'Etat sa prééminence légitime et nécessaire.
Mais, pour cela, il faut avoir confiance en
nous mêmes et dans la puissance des idéés
libérales, qui ont toujours été l'honneur de
l'Université.
Nous voulons dire la Haute Cour.
Elle a fini ]a fastidieuse besogne que
lui a douné le fameux grand complot.
Avant d'appliquer les peines, elle a enten-
du les accusés sur cette application.
M. Buffet, remerciant leSénat, dece qu'il
l'avait frappé, a ajouté On parle de
m'appliquer la loi Bérenger Je n'en veux
pas. Si on me l'appliquait et qu'il y eüt de-
main une manifestation dans la rue quelle
qu'elle soit, j'y prendrais part, car je ne
veux ni pitié, ni indulgence.
M. Paul Deroulède se léve de son banc
Puisque, dit-il, vous m'avez accouplé au
vaillant royaliste qu'est M. Buffet et au cou-
rageux antisémite quest M. Guérin, vous me
frapperez avec eux! Mais, si dure que soit la
peine, si lointain que soit l'exil, vous savez
comme moi que je reviendrai
Je reviendrai quand la justice reviendra.
Je serai libre quand la nation sera libérée
Je suis ici par ordre de M. Loubet
Frappez moi done
Accomplissez l'acte qui restera comme
une honte ineffapable dans l'histoiredu Par
lement. Vive l'armée nationale Vive la
République du peuple
Après délibéralion, le Haute Cour pro-
nonce les condamnations suivantes
M. Buffet, 10 ans de bannissement par
115 voix.
M. Deroulède, 10 ans de bannissement
par 115 voix.
La peine de 10 ans de bannissement pro-
noncée contre Deroulède entrafne l'annula-
tion de la condamnation k 2 ans de prison
qu'il a encourue au cours des débats.
M. Guérin, 10 ans de détention dans une
enceinte fortifiée sur le territoire de la
France continentale par 127 voix. Cette
peine entralne la dégradation civique.
M. de Lur-Saluces, par contumace, 10
ans de bannissoment.
lis sont, en outre, tous les quatre con-
damnés aux frais du procés en ce qui les
regarde personnellementMM. Deroulède
et Buffet seront conduits k la frontière beige
Le Conseil fédéral et lE'mpereur ont dé-
cidé, contre l'avis de la science, que le ving-
tième siècle commencerait le 1 er janvier
1900. Les puissants ayant prononcé, il a
fallu s'incliner. Mais la petite principauté de
Reuss, fidéle k son opposition contre la su-
prématie prussienne, se range du cóté de Ia
science et ne veut entrer dans le vingtième
siècle qu'en 1901.
Rome, 30 décembre.
Les nouvelles de la santé de Léon XIII sont
excellentes. Bien qu'il tousse toujours un peu,
le Saint-Père a repris sa vie ordinaire et
donne, presque chaque jour, quelques au
diences particulières. C'est ainsi que, avant-
hier, Il donnait audience k quelques évéques
venus k Rome, k l'occasion du Jubilé et,
qu'hier, II recevait S. A. R. Mgr le Due
d'Alenpon et S. A. R. Madame la comtesse
de Trani.
Léon XIII plaisante volontiers sur sa san
té avec ses familiers. L'un d'eux le félicitait
de ce qu'il avait pu présider avec tant de vi-
gueur la grande cérémonie de l'ouverture
de la Porte Sainte a Je l'ai öuvertc, dit le
Saint-Père, et je la fermerai
On raconte que lors de l'opération doulou-
reuse que le Saint-Père dut subir il y a plu-
sieurs mois, un vénérable prélat ressentit
une telle impression des dangers que cette
opération pouvait entralner qu'il fut malade
plusieurs jours. Lorsque le Saint Père revit
ce prélat, 11 lui dit en riantVotre indis
position m'a tellement impressionné quej'en
ai été malade.
Un trait bien touchant de vénération et
d'attachement pourle Saint-Père: Une dizai-
ne de jeunes filles du diocèse d'Aquila, dans
les Abruzzes, kgées de dix k douze ans,
émues des bruits qu'on faisait courir sur la
santé de Léon XIII eurent chacune séparé-
ment, sans aucune entente préalable.l'inspi-
ration de faire k Dieu le sacrifice d'une an
née de leur vie pour prolonger d'autant cel-
le du Souverain Pontife.
L'évèque d'Aquila informé au bout d'un cer
tain temps, de ces divers actes de grande foi
et de rare dévouement, en informa k son tour
Leon XIII qui témoigna le désir de voir.de
remercier et de bénir ces pieuses enfant#.
Celles-ci furent en effet présentées au Saint-
Père, il y a quelques semaines et l'entrevue
de ces jeunes filles et du vieux pontife fut
particulièrement émouvante.
Les catboliques font des voeux pour que le
Saint-Père, qui célèbre la dernière année du
dix-neuvième siècle, puisse célébrer aussi la
centième année de son kge.
Le Saint Père a prescrit que dans toutes
les églises de Rome une messe soit dite de-
main 31 Décembre k minuit pour célébrer
pieusement les premières heures de l'année
1900.
Dieu veuille que ce concert de prières
s'élevant de la Ville Ëternelle attire sur le
monde catholique en général et sur notre
chère Belgique en particulier les bienfaits de
la paix sociale et religieusel
Golesberg n'est pas pris
La victoire du général French k Colesberg
était fortement exagérée. En effet, voici la
dépêche que publie le War Office:
Rensburg, 2 Janvier.
Ce matin la situation s'est modifiée d'une
facon inattendue k Colesberg.
On a découvert que les Boers étaient re-
venus pendant la nuit et avaient de nouveau
occupé les positions dont le général French
les avait chassés.
Leurs canons k tir rapide que l'on croyait
avoir mis hors d'état, ont rouvert le feu sur
notre cavalerie. Les obus n'ont pas fait ex
plosion et le tir a produit peu d'effet. Nous
mainterions toutes les positions que nous
avons prises hier.
Les Boers ont certainement repu des ren-
forts importants depuis qu'ils ont été mis en
déroute.
Les pertes d'hier et d'aujourd'hui s'élèvent
k 6 tués et 20 blessés.
La situation k Ladysmith,
dépêche Anglaise
Ladysmith, 29 Décembre. Les Boers
ont redoublé d'énergie depuis la Noël ils
lancent des obus sans discontinuer, ne s'ar-
rêtant que lorsqu'il fait nuit.
Un projectile a malheureusement éclaté
prés de la tente des officiers du régiment de
Devonshire.
Autremcnt, nous n'avons pas de grandes
pertes k signaler.
Le temps est lourd.
Les Boers se tiennent prêts k toute alerte;
ils tirent la nuit des milliers de coups de
fusil contre des sorties qui n'existent que
dans leur imagination.
Le nombre des malades s'accrolt, mais
létat moral reste excellent.
Ladysmith, 30 Décembre.
Le feu de l'ennemi se ralentit.
Ladysmith, 1 Janvier.
L'ennemi a célébré le jour de l'anen nous
bombardant pendant la nuit. Nous avons
peu de nouvelles. Nous entendons des coups
de fusil presque toute la journée dans la
direction de Colenso. L'ennemi se montre
trés agité.
Le manque de médicaments se fait vive-
ment sentir.
Le temps s'est remis au beau.
Le niveau de la rivière est descendu.
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