Sfi^£7y
LOUIS XVII.
S^*7-' Samedi 16 Novembre i 878 13
N° 1,344.
annee.
Les réclame* et annonces judicia* en* se piient 3(1 centimes la
0/j /raiVe a forfait pour les insertions par année.
I Journal parail Ie MercreHi et Ie Samedi. Les insertions content 15 centimes la ligne.
Un numéro du journal, pris au Bureau. 10 centimes. Les numéros supplémenlaires commandés pour articles. Réclames ou Annonces, coütent 10 fr. les 100 exemplaires.
c; 12 E J92 B s u
V E
Et tont cela se résumera en corvees mili-
taires el en dépenses écrasautes. Mais les élec-
teurs font voulu, et ils ne (doivenl s'en pren
dre qu'a eux-mèmes si les sauveurs du
pays ne sauvent pas mème la caisse.
Nous n'avons pas cessé de les avertir que
favénemeiit d'un ministère liberal amène-
rait Augmentation du contingent de i'armée,
la création d'une réserve, le casernemenl
périodique de la garde civique, des frais
énormes pour rarmemenl de cjelle-ciilsoul
eu cpnfiance dans lesdémeutis do la presse
gueuse; mais aujourd'hui le fait est oöicielle-
tnenl proclamé. II produira dans Ie pays
eutier une profonde indignation.
Mais la ne se bornent pas les bienfails que
le pays devra aux hommes qui promeltaiènl
de le faire nager dans un océan de délices:
de nouveaux impöts sont annoncés, et cela
sans egard a la crise commerciale el indus-
trielle qui accable le pays, dom le discours
d'ouverture parle avec une légéreté incroya-
ble.
II est vrai que le ministère accuse les bud
gets de 1877 et de 1878 de seclöturer en
déficit, mais cela est faux, cela sera démontré
ètre lel, et si le ministère cajholjque élait
resté au pouvoir, il n'anrail pas demandé un
sou de plus aux eontribuables malgré le
racbat de nombreuses lignes ferrées.
Un autre coup de parli est menlionné
dans le factum ministerie): il lendra a rendre
furne electorale encore niolns accessible aux
calhpjjqu.es qu'aujourd'hui; mais nous avons
vu, dans notre longue carrière, lomber lant
d'oppresseurs, que nous ne nous alarmons
pas le moins du monde des nou velles mena
ces d'un ministère qui s'appuie sur la force
et l'arbitraire.
Un seul point ne figure pas dans le dis
cours; malgré tons les bienfails que la Belgi-
que a recus du Ciel, le nom de Dieu n'esl
pas prononcé!
La Reine d'Anglelerre, fEmpereur d'Alle-
magne. le Roi de Hollande, Ie president des
Etals Uriis, etc., tons protestants, donnent
toujours a Dieu ce qui revient a Dieti.afin
que le peupie donue a César ce qui revient a
César: en Belgique, nos pelils hommes d'Elal
ne reconnaissenl pas le Tout-Puissant. Le
pays s'en affligera, mais M. Bergé sera con
tent, et a cause de cetle prétératiou, il pour-
ra voter l'udresse.
ATTENTAT A LA LIBERTÉ DU CULTE.
A peine arrivé au ministère, M. Bara, qui
reprèsente dans le cabinet l'élément radical
et seclaire, avec certain collègue, M. Bara se
met aux ordres de la franc-inaconnerie.Voila
ses premiers pas dai s la voie de la persécu-
tion.
II existe a peu prés dans toutes les égfises
des fondations de services reiigieux faites a
la fois au profil des ministres du culte el de
la fabrique d'église. Les fondaieurs ont sti
pule les honoraircs que les fabriques paye-
raienl aux prèlres qui célébreraient les ser
vices religieus établis par eux.
D'un autre cöté, il e.xisie dans certains dio
cèses des larifs dits larifs d'obliuion. Les
oblations sont dues aux prètres par les fnlé-
lesa l'occasion de 1'administration du baplè-
me, du mariage, de la célébralion de mes
ses. Le prêtre doil vivre de faciei.
Les oblations et les honoraires des fonda
tions répondent a deux ordres de chose
coinplélenienl differents. D'un cöté, nous
avons un vrai engagement, une sorte de
stitution permanente, réguliére;de l'autre
une offrande accidenlelle, variable, focea-
sion de fails égalemenl variables et passa
gen.
Les ministres du 'culte calholique, depuis
Ic concordat de 1801vivent d'abord des
oblations, ensuitedu produit des fondations,
enfin des traitemenls alloués par l'Eiat, en
retour de la spoliation opérée a son profit
des biensde l Eglise el comme consequence
de la convention que je viens de citer.
Que fait M. Bara? Fidéle a sa devise, digne
des pires soeialisles, qu'il faul rajeunir les
testaments, il rajeunit les fondations et
pi étend que les fondateurs n'ont pas Ie droit
de fixer les honoraires des services reiigieux
établis par eux. Les fabriques d'églises de-
vronl a l'avenir payer ces honoraires aux
laux unilormes des larifs relalifs aux obla
tions.
Ces tarifs, vieux de prés d'un siècle, fi-
xent, parexemple, un franc pour la célébra
lion d'une messe. Depuis leur confection et
en suite de l'avilissement des monnaies mé
talliques, un franc en 1808, reprèsente qna-
ranle centimes aujo"urd'hui
II y a Irois mois, M. Graux, minislre des
finances, prétendait que les ministres du cul-
leavaient élé victimes d'une injustice, lors-
qu'ils avaienl élé coutraints de payer les con
tributions personnelles relatives aux presby-
lères. Pour expulser les prèlres du corps
electoral le gouvernement se monlrail géné-
reu.x envers eux. Cela n'a guère duré, on le
voil.
Aujourd'hui, je me bornerai a réfuter M.
Bara, par deux arguments de bons sens.
Son système est contraire a la pratique suivie
en France, en Hollande, en Belgique, en
Allemagne (provinces rhénaues soumises au:
trement a la domination fi-ancaise), sous tous
les. régimes depuis 1801.
Tous les ministres de la justice beige, qui
se sont suecédés au pouvoir depuis 1830, ont
approuvé des cenlaines et des centaines de
fondations de services reiigieux avec hono
raires spéciaux. Ainsi ont agi MM. Leclercq,
de Haussy, Tesch et M. Bara lui-mème. Je
dis M. Bara:en effet, jusqu'en 1870 M. Bara a
revètu de sa signature des arrètés autorisant
des fomlalions, dans lesquelles les bienfai-
teurs avaienl stipulé des honoraires supé
rieurs aux tarifs.
II lui a fallu arriveren 1870, pour corn-
prendre le veritable sens des décrels de l'em.
pire. Que M. Bara réfute eet argument s'il le
peul el qu'il prouve que pendant longlemps
il s'esl trompé! Nous en appelons en lous cas
de M. Bara a M. Bara el a M. Tesch.
Esl-il impossible de trouver la raison de
conversion de M. Bara? Je vous l'ai dit, il
s'agil d'affamer le olergé. Le changement
d'opinion de M. Bara se produit en Février
1870. Notons oelle dale: il veuail de retirer
la plus grande parliedu projet de loi conlre
leteinporel du culle. Or, il y avait dans ce
projel une disposition, un article spécial qui
disait qu'a l'avenir les fabriques d'église de-
vraient payer les honoraires des services re
iigieux, iiou suivant les volontés des fonda
tions, inau suivant le larif des oblaliotis. La
loi devait avoir elTel rélroactif.
Le projet de loi déclarait expressément
qu'une loi serail nécessaire pour modifier des
fcudalions dünient approuvees par les auto
rités compétentes, par le Boi.
Cetle disposition est tombéeen 1870. Que
fait M. Bara? II la reiève administrativetnent.
II fallait une loiune loi avec effet rélroactif,
disait on avant le relrait du projet, pour
commencer la spoliation du clerge calholi
que. Aprés le relrait on se passé de loi el en
1878 M. Bara prétend, de sa seule autorité,
faire disparaiire les volontés des fondateurs,
les engagements biilatéraux, les signatures
minisiérielles, les signatures royales!
Voila l'aUilude de M. Bara parfailement ca-
ractérisée.
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Routers
Ynres-Courtrai, 5,31 9,52 11,20 2,40 5 25.
rnl.^„T»Allt 7 90 4 2.Oh 6,0/, (lö S<
^angemarck a Ypres)
Coiirtrai-Ynres, 8.0S 11,05 2,56 5,40 8,49,
Ynres-Thourout, 7,20 12,06 6,07, (lé Saraed^A 5,50 du
lKi .i:T/T9n dii m T
matin jusqu'a Langernarek.) Thourout-Ypres, 9,00 1,23 7,45 (le
^almed'A®<^^™Q^^qUgt^o^i|.nM^A.rrri0litWes, 6,00 12,00 3,35.»- Armentiöres-Houplines-Le Touquet- Warnêton-
Commes-Warn io 1 Coulines_vVantótou, 8,45 mat. 9,30 soir, (le Lundi 6,30.) Wariieton-Gommes, 5,30 11,10 (le
Commes, 4>w i,™-
Ingelmunster-Deynzé, 6-10,7-15. Gand-Deynze-Ingelmunster, 6-58, 11-20, 4-41.
Ar Q .10 K 00
Sëlzaete
Nieuport-Dixmude, 7,15 11,55 4,20 5,56 6,50.
ïourout, 7-35, 10,16 12,20 6-15 9,15.
10-20, 5-05.
Gand-Terneuzen (station), 8-17, 12-25, 8-05. (Parte d'Anvers) 8-30, 12-40, 8-25. Terneuzen-Gand, 6-00, 10-30, 12,30 5,55
Selzaete-Lokeren, 9-04. 1,25, 9-03 (le Mereredi, 5-10 matiii).Lokeren-Selzaete, 6-00, 10-25, 5-25 (le Mardi, 10-09).
C O a H BSPONDANOH9
COURTRAI, BRUXELLES.
Conrtrai dép. 6,37 10,53 12,33 3,42
Bruxelles arr. 9,20 1,35 2,25 6,10
BRUXELLES, COURTRAI.
6,35.
8,54.
Bruxelles dép.
Gourtrai arr.
5,22 8,28
8,00 10,46
12,21
2,46
5,35
7,56
6,47.
8,44.
COURTRAI, TOÜRNAI, LILLE.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
Gourtrqi dép.
'fournai arr.
Lille
6,37
7,28
7,42
9-37
10,15
10-42
10,56
11,47
12,03
2,54
3,48
4,00
5.27
6,39
6,37 10,04.
8,47.
9,41.
Lille dép.
Tournai
Conrtrai aim.
5,10
5,42
6,34
8,12
8,56
9,17
11,05
11,32
12,26
2,21
2,40
3,38
4,10
5,21
6,33
8,10
8,50
9,28
COURTRAI, GAND.
GAND, COURTRAI.
Courtrai dép.
Gand arr.
6,32
8,01
6,42
7,21
9,49
11,08
12,31,
1,51,
3,44
5,04
6,40
8,00
9-32.
10,20.
Gand dép.
Gourtrai arr.
5,15
6,34
8,45
9,33
9.24
10,51
1,28
2,49
4,14
5,23
7,21.
8,12.
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruges d. 6,49 7,04 9,39 12,34 2,52 3,59 6,43 8,43 Bruxelles dép.5,22 7,20 7,25 9,00 11,06 1,35 3,02 4,53 5,55 5,01,
Gand «.7,34 8,19 10,54 1,49 4,07 4,44 7,58 9,28. Gand arr. 6,00 8,38 9,36 10,27 1,23 3,25 4,16 6,13 7.23 7,35.
Bruxelles 8,50 10,35 12,39 4,00 7,15 5,58 9,31 10,42. Bruges 7,15 9,23 10,51 11,20 2,38 5,01 6,50 8,15 8,50.
L'OUVERTURE du feu.
Le discours du Tióne inspire a la Value
les reflexions suivaulcs:
Certes, la gneuserie extravagante accueil-
lera avee bonheur le projet bannissant la
Religion cathobque de tout enseignement
quelconque; il est vrai que le discours trés
peu royal ne parte que de l'enseignemenl
dohné aux frais de l'Eiatqui doit ètre aus
si civil que l'enfouissement des libres-pen-
seurs, mais Ie paragraphe y relatif. quoique
restant dans le vague, ne laisseaucun doule
series vues de la gueuserie au pouvoir. II
est vrai que l'cewrre de transformation
est annóncée connne ne pouvant ètre actie
vee dans une seule session; et cela semble
indiquer que d'accord sur le principe, le
ministère issu de la tricherte ne sail pas en
core comment il appliqnera ce principe.
D'ici la un devoir inéluctable s'impose aux
catholiques: avant que le ministère ail pn
mettre la main a I'ffiuvre, ils doivenl, eux
aussi. étendre et fortifier fenseigneineut
calhobque.
Le projet d'organiser une instruction athée
est suivi du gage assigné a ceüe promesse,
el le discours annonce:
Que notre organisation militaire est
demeurée incomplete
Que la nécessité et Copportunilé de la
creation d une réserve nationale sotU recon-
nues\
Que des propositions seront soumises a la
legislature en ime de cornbler cette lacune
el Supporter a C institution de Varmée les
cornpléments gae l'expêrience a rendus in-
dtspensables; (Nous citons, mais n ad
meltöns pas.)
■i QWil est temps de pourvoir notre mUne
citoyenne d'un armemenl efficace.
Suite. Voir le numéro précédent.
XI. Mort de Louis XVII.
Le mal faisait de rapides progrès. L'enfant ne
pouvait plus marcher, et, lorsqu'il allait respirer
l'air snr la platej'orme, il f'allait 1 y porter. Ses
mains et ses pieds s'ankylosaient, et, quoique sa
tête rest at belle encore, sa poitrine se resserrait
et de larges tumours couvraieut ses genoux. Le
3 mai 1794, les gardiens, effrayés, écrivirentsur
le registre: - Le petit Capet'est indisposé.Le
surlendeinain, ils ajoütèi'ent11 y a crainte
pour ses jours. Malgré ces instances, ce ne fut
que le 6 mai qu'un chirurgien, M. üesault, fut
envoyé au Temple il examina longuement le
malade et jugea qu'il n'y avait pas d'espoir.
II ordonnna une potion et des frictions. Les lric-
tions furent laites la potion prise, quoique
avec répugnance', mais sans résultat. II n'y avait
rieh a faire; on n'avait appelé les secours de l'art,
que lorsque le mal était sans ressources - G'est
un enfant perdu - demanda au médecin un com-
missaire de service. Je ie crains, rèpondit M.
Desault: mais, ajouta-t-il 4 voi'x basse, - il y a
peut-ètre des geus qui l'espèrent.
Le pauvre enfant s'affaiblissait de jour en jour;
11 ue marebait plus; a peine parlait-il. II se con-
tentait de lever les yeux au ciel avec une douceur
sereine, comnie s'il n'attendait plus de soulage-
ment que do IA, ou plutót comme s'il cherchait
dêjA a y remarquer sa place. Le 1 juin, M. Desault
mourut subitement; au bout de cinq jours, il fut
remplacé par M. Pelletan. Gommesou pródéces-
seur, M. Pelletan jugea ia situation sans remède
et demanda qu'on lui adjoignit un de ses collè-
gues, M. Dumangin. Du moins s'eflorQa-t-il d'a-
doucir les derniers moments du martyr; il or-
donna de lui donner plus d'air et de lumière.
Vour ne pouvez, dit-il avec une vivacité indi-
gnée aux commissaires de service, qui faisaient
quelques objections, vous ne pouvez vous oppo-
ser a ce que nous transportions eet enfant dans
une autre chambre; car nous sommes,je suppose,
envoyós ici pour le soigner. - Le prince, éinu,
fit signe au docteur d'approcher: Parlez plus
bas, je vous prie, lui dit-il, de peur qu'elles ne
vous entendent la-hautje serais bien faclié
qu'ete apprissent que je suis maladecar cela
leur ferait beaucoup de peine. Pauvre petit,
c'ótait toujours la pensee de sa more qui survi
val chez lui jusqu'a la derniöre heure
Les ordres du médecin furent exécutós. Gomin
prit le malade dans ses bras et le porta dans une
pièce de la petite tour, qui avait jadis servi de
salon. L'aspcct en était gai; l'air et le soleil y
entraient librement. En se voyant installé dans
cette salie, en voyant des rideaux blancs et des
fenêtres sans barreaux, l'enfant sourit; il sembla
renaitre un instant. Ktes-vous content d'etre
dans cette chambre lui demanda Gomin. Oh!
oui, bien content, murmura-t-il. Le 7 juin, il
eut un évanouissemeutle soir, il allait mieux.
Vous souffrez moins!lui dit Gomin. -Moins»
C'est a cette chambre que vous le devezici
l'air circule; la lumière pénètre; vous devez ètre
un peu consolé. Une larme brilla dans les yeux
du mourant. - Qu'avez-vous?lui demanda son
gardien, Toujours seulrépondit le pauvre
petit. Ma mère est restée dans l'autre tour
G'est vrai. vous êtes seul, ré[>liqua Gomin, et
c'est bien triste; mais vous n'avez pas ici, comme
ailleurs, le spectacle de tant de méchants hom
mes. - Oh j'en vois assez, soupira-t-il; mais
ajouta-t-il, en regardant Gomin, je vois aussi de
braves gens et ils m'empêchent d'en vouloir a
ceux qui ne le sont pas.
Gomin reprit: - N'" c'était un municipal
I dont le prince avait eu beaucoup se plaindre
I N"* a étó arrèté, il est maintenant en prison.
- J'en suis faclié, répondit le captif, est-ce ici!
- Non, a la Force. L'enfant s'arrèta, puis il
reprit lentenicnt«J'en suis bien faehó; car,
voyez-vous, il est plus malheureux que nous il
mérite son malheur. L'intellizence redevenait
plus vive, a mesure que la délivrance appro-
chait.
11 lallut se quitter, le reglement interdisait
aux gardiens de rester prés du prisonnier pen
dant la nuit. Cette nuit, qui allait ètre la derniöre,
le pauvre martyr la passa seul. Le 8 au matin,
Lasne entra le premier dans la chambre; par une
illusion fréquente en pareil cas, ilcrut le malade
mieux et le leva; mais au bout de peu de temps,
la faiblesse reprit et l'enfant demanda lui-mème
a se recoucher. Les médecins vinrent, les symp-
tómes étaient effrayauts. A onze heures, Gomin
remplaqa Lasne; il s'assit prés du lit. - Que je
suis malheureux de vous voir souffrir comme
celadit-il. - Consolez-vousrépondit le
captif, je ne soulfrirai pas toujours.
Gomin S'agenouilla et se mit a prier. Le prince
lui prit la main et éleva ses regards vers le eie),
comme pour s'associer a la prière de son ami.
Ils restérent quelque temps ainsi: l'enfant ne
remuait pas, - J'espère, lui dit Gomin, que vous
ne souffrez pas en ce moment. Oh sf, je
souffre encore, mais beaucoup moins: la musique
est si belle - De quel cöté, reprit Gomin
surpris car on ne faisait de musique, ni a la
tour, ni dans les environs de quel cöté enten-
dez-vous cette musique- La haut. - Y
a-t-il longtcmps Depuis que vous êtes a
genoux. Est-ce que vous n'avez pas entendu
Ecoutez, écoutez. Et, l'oreille attentive, les
yeux grands ouverts, la poitrine haletante, de
sa main défaillante it montrait le ciel.
Au bout de quelques instants, un tressaillement
indiéible agita ce petit corps agouisant. Son ceil
étincela et, avec un accent, oü vibrait le bonheur:
- Au milieu de toutes ces voix, dit-il, j'ai reconnu
ma mère
Pauvre cher enfant, c'était sa mère qui l'atti-
rait a elle c'étaient les anges qui l'appelaient et
qui faisaient place dans leurs coeurs k cette petite
ame si noble, si belle, si digne des óternelles
joies; car elle avait taut souffert
Vers deux heures, Lasne vint reprendre la
place de Gomin; il s'assit, comme lui, au chevet
du malade. - Crois-tu, lui dit l'enfant, poursui-
vant sa pensée, crois-tu que ma soeur ait pu
entendre la musique Comme cela lui uurait
fait du bien!.... J'ai une chose A te dire...,»
ajouta-t-il.... Lasne lui serra la main et s'approcha
de lui. La tcte du mourant s'inclina sur la poi
trine du gardien, comme pour lui parler. Lasne
écouta la voix ne parlait plus. Lasne mit la
main sur le coeur du prince: ce cosur avait cessé
de battre. II était deux heures et quart.
La Convention était satisfaite. Ge fantöme de
roi, dont l'image troublait sa tranquillitó, n'exis-
tait plus. Fidéle au programme de Chabot et de
l'homme de Varennes, elle ne l'avait pas tuó,
elle s'en était défaite. On a dit que Louis XVII
avait été empoisonné. II n'en est rien uu empoi-
sonuement eut été inutile, et la Convention n'ai-
mait pas a commettre de crimes inutiles. - Le
seul poison qui ait abrégé ses jours, dit Madame
Royale, c'est lamalpropretéjoiute aux horribles
traitements, a la cruautó et aux duretés sans
exempie qu'on a exercées envers lui. Et c'est
la px^cisérnent ce qui fait de la mort de Louis
XVII le plus hideux de tous les attentats de la
Terreur. On niaudit, mais on compreud l'écha-
faud de Louis XVI; ou s'explique móme l'écha-
faud de Marie-Antoinette, il y avait la des pas
sions ameutóes de longue data ct de vieilles
ï'ancunes A assouvir. Mais assassiner lentement,
froidemont, systématiquement, un pauvre enfant,
qui n'a d'autre tort que d'etre l'héritier do la
plus noble race do rois qui ait existé, s'acharner
A tuer son intelligence en tuant son corps, A force
de coups, d'isolement et de misèrevoila ce
qu'eussent A peine imaginé des peuplades sau-
vages dans les ages barbares ou dans les deserts
de l'Afrique. VoilA cependant ce qui s'est vu. en
plein dix-liuitième siècle, dans le pays le plus
eivilisé du monde, par l'ordre d'une Assemblee
qui prótendait inaugurer le regne de la liberté
et du progrès. Je ne sache pas de plus offroyable
défl porté A Injustice divine et a la conscience
humaine par une génération sans foi et des
législateurs sans entrailies.
Mais un jour arrive oü la justine divine reiève
le déii et oü la conscience humaine reprend ses
droits. Le supplice de la victime a duré deux
anstant qu il y aura un coeur dans la poitrine
des rnères, la flótrissure des bourreaux sera
immox'telle. maxime de la rochetterie.